Amanogawa : Quart de final HAKO VS SHISHIO (Match 2)

Uchiha !  Uchiha ! Uchiha !

Debout au beau milieu de l’arène qui devait être le théâtre de son combat suivant, Shishio était visiblement intimidé. Quoiqu’en dise l’arbitre, c’était avant tout grâce à une chance extraordinaire que le jeune représentant de Konoha était parvenu à venir à bout de Yukimura, poussant le puissant épéiste à abandonner pour laisser au garçon la chance de fleurir au cours du tournoi. Il n’était pas sans fierté à la mention de cet exploit, bien sûr - à vrai dire, il ne pensait pas avoir jamais été aussi fier de quelque chose qu’il était fier d’avoir remporté ce premier combat – mais l’idée que l’on prenne ce duel très inhabituel pour lui comme un acquis qu’il devrait reproduire, c’était de nature à le terrifier. Rien n’était plus effrayant, après tout, que la sensation d’avoir déçu ceux qui vous observent ; qu’il s’agisse de son père, de Yurikô-sensei ou de cette foule qui clamait son nom, Shishio voyait tout à la fois une motivation et une source de craintes dans chacun de ceux qui croyaient en lui.

Ses propres anxiétés n’avaient pas leur place dans cette arène, cependant ; ce n’était pas seulement pour répondre aux attentes de cette audience bruyante et anonyme que Shishio était venu se battre. Ce n’était même pas seulement pour Yurikô, qu’il avait pris soin de ne pas informer de sa présence directement. Ce qu’il était venu prouver au tournoi d’Amanogawa, c’était avant tout à lui qu’il voulait le prouver. Que son adversaire soit un puissant Inuzuka inconnu ou la Chūnin qui lui avait permis de se rendre dans les archipels dès le début, le jeune Uchiha était décidé à tout donner. Il était encore trop faible pour se présenter comme un shinobi de Konoha, ou même un membre du clan Uchiha, sans avoir l’impression de salir ces noms couverts de gloire, cela ne faisait aucun doute ; pour autant, chacun de ses combats l’avaient laissé un peu plus fort qu’il n’était avant de les disputer. Les poings serrés, il avala difficilement sa salive ; une fois de plus, il était temps d’accepter sa peur étouffante de prendre une vilaine dérouillée et de se lancer à corps perdu dans une nouvelle bataille. Et si son chemin devait s’arrêter là pour ce tournoi… *Non, je refuse de penser comme ça. Je vais gagner, quoiqu’il arrive.* La tête haute, il toisa son adversaire du jour.

Il ne connaissait pas bien Hako ; son apparence de farfadet vert pomme, pour le dire franchement, lui était absolument terrifiante. S’il y avait une chose que fréquenter des ninjas toute sa vie lui avait apprise, c’était que les personnages les plus excentriques étaient souvent les plus forts. Ou au moins, les plus dangereux. Sachant qu’elle était l’une des deux coéquipières d’Uchiha Akira, son cousin, il avait usé de cette relation commune pour demander à la jeune Aburame de le chaperonner, lui permettant de quitter le village pour arriver au tournoi. Il n’avait pas prévu qu’il devrait l’affronter avant de pouvoir lui repayer cette faveur dignement, mais ce n’était pas une raison pour lui faire des cadeaux ; il n’en avait, après tout, absolument pas le luxe.

« Que le meilleur ninja gagne, pas vrai ? » Lança-t-il avec un petit sourire forcé, définitivement mal à l’aise, le poing tendu vers elle en guise de salutations.

Alors que le son assourdissant du gong venait lui secouer les tympans, il sauta immédiatement en arrière, mettant autant de distance qu’il lui était possible de le faire entre lui et Aburame Hako ; s’il voulait pouvoir prendre le contrôle du rythme du combat en la harcelant de multiples techniques, il aurait besoin d’espace entre elle et lui.

Les quelques mètres qu’il mit entre lui et la Chūnin ne les sépareraient pas longtemps, cependant ; joignant les mains, il enchaîna rapidement de multiples mudras, convoquant dix des kunais qui étaient soigneusement ordonnées dans son sac à dos pour les faire flotter autour de son dos.

« À nous deux, Hako ! » l’heure était à la provocation ; le bluff ne marchait jamais sur un adversaire parfaitement calme.

S’élançant vers elle, le corps penché vers l’avant pour aller d’autant plus vite et mieux cacher les nouveaux signes qu’il exécutait pour malaxer son chakra, il manifesta cette fois-ci un simple clone non-matériel qui poursuivit sa course. Shishio, lui, profitant de la silhouette visuelle pour cacher ses actions, relâcha sa prise sur les dix kunais flottants tout en se jetant en arrière. Grâce à la vitesse du clone, il faudrait un certain temps à un observateur extérieur pour réaliser que les lames avaient déjà pris leur propre essor et s’étaient libérées du contrôle du garçon en pleine course. Légèrement pointées vers l’intérieur, elles étaient toute prêtes à s’abattre sur Hako pour percer sa chair. Le clone, lui, servait deux objectifs ; il était là pour laisser croire à la jeune Aburame que les kunais n’étaient pas encore lancés, mais surtout pour dissimuler Shishio tandis que le garçon dégainait une nouvelle lame, faisant tournoyer le kunai entre ses mains avant de le lancer droit en direction d’Hako, de sorte que le projectile ne traverse son clone intangible qu’au dernier moment avant l’impact.

Dès que son tour de passe-passe serait exécuté, l’Uchiha se contenterait de reculer, conservant un maximum de distance entre son adversaire et lui ; les feintes, c’était bien amusant pour le public, mais ça ne le garderait pas en un seul morceau longtemps contre une Chūnin.

Shishio ne tenait pas la comparaison contre Aburame Hako. Il en avait pleinement conscience ; il était sans doute aucun le participant le plus faible du tournoi d’Amanogawa, et c’était de cet état de fait qu’il tirait actuellement sa fierté. Car malgré sa faiblesse, malgré son retard en tant que ninja sur cette adversaire d’un âge identique au sien, il était arrivé jusqu’au second tour et était bien déterminé à ne pas s’arrêter là. La redoutable réputation dont pouvaient se targuer les trois villages cachés n’avait jamais été une question de puissance brute ; bien sûr, certains étaient monstrueusement forts : des combattants pouvaient briser ou trancher des montagnes, incendier des forêts en un souffle de feu et bien plus encore. Mais ce qui faisait véritablement la terreur d’un shinobi, c’était sa ruse : sa fourberie, sa réactivité, sa capacité à piéger son adversaire et à improviser des plans variés au beau milieu d’un combat. Si Uchiha Shishio manquait cruellement de capacités pures, son combat contre Yukimura avait indiqué à toute l’audience qu’il pouvait compenser cette faiblesse, simplement parce qu’il raisonnait et se battait déjà comme un véritable shinobi.

Sa façon d’ouvrir le combat contre Hako fut donc à la hauteur de leurs attentes : réalisant instantanément qu’il ne pouvait pas la rencontrer dans un combat à la loyale, le jeune konohajin avait immédiatement mis en place une stratégie rudimentaire pour la prendre par surprise même au sein d’une arène sans réelle couverture. Tandis que le garçon sautait en arrière pour conservait un peu de distance entre la kunoichi Aburame et lui-même, ses multiples lames se plantaient dans la peau de celle-ci, arrachant un peu de son sang et déchirant sa tenue à de multiples endroits. La foule – du moins, la petite moitié des spectateurs qui l’avaient vu affronter Yukimura et espéraient le voir accomplir un nouvel exploit – appela à nouveau son nom, se félicitant de voir leur poulain engager la rencontre en tirant le premier sang. Shishio, lui, ne se permit même pas l’ombre d’un sourire ; s’il pouvait être satisfait de cette ouverture, il était évident que des blessures aussi superficielles n’entameraient pas le moins du monde les capacités de la jeune fille au combat. Il était hors de question pour lui de baisser sa garde ou de crier victoire trop vite ; aussi, campé sur ses appuis, les genoux fléchis pour conserver un maximum de réactivité, il attendit la réponse de la Chuunin, prêt à esquiver de son mieux.

Malheureusement pour lui, être préparé ne suffit pas toujours.

Les yeux noirs s’écarquillèrent légèrement lorsque le jeune Uchiha réalisa que le kunai qui lui fonçait dessus à toute allure était suivi par un parchemin explosif. Poussant sur ses jambes, le garçon se déplaça sur le côté, évitant la lame – mais il ne s’en éloigna pas suffisamment. Alors que la commande d’Hako résonnait à travers l’arène, l’explosion du parchemin le frappa en plein dans le dos, chassant tout l’air de ses poumons. Un sifflement stridant lui vrillant les oreilles et une douleur brûlante envahissant ses voies respiratoires tandis qu’il essayait d’inspirer à nouveau, Shishio tituba sur quelques pas, trop sonné pour voir, entendre ou même sentir son adversaire approcher. Le coup de pied de la Chuunin le frappa de plein fouet, emplissant son corps d’un bruit de craquement inquiétant et le propulsant en arrière. Le goût du sang envahit sa bouche et un voile sombre se déposa devant ses yeux.

*Ça fait mal…*

Mobilisant toute sa volonté, Shishio se fit violence pour garder les yeux ouverts – mais voir ce qu’il passait n’allait pas vraiment l’aider, loin de là. La douleur le rendait complètement incapable de bouger, le sang qui emplissait sa bouche l’empêchait de reprendre son souffle et l’une de ses côtes brisées appuyait contre son poumon droit, ce qui était loin d’arranger le problème respiratoire. Si Hako s’était arrêtée là, le garçon serait sûrement tombé dans les pommes quelques secondes plus tard, son corps tout entier choqué par la quantité de dégâts qu’il avait encaissée en si peu de temps. Mais sa peine n’était pas finie, loin de là même ; en une seconde, son adversaire était sur lui, un poing levé.

*Y-Yurikô-sensei… J’ai mal…*

Les appels à l’aide silencieux, seules pensées que Shishio parvenait encore à formuler dans son état actuel, restèrent sans réponse tandis que le poing s’abattait sur lui. Il pensa à lever les bras pour protéger son corps du plus gros des dégâts, mais ses épaules restèrent parfaitement immobiles. Avant qu’il ne puisse cligner des yeux, le petit poing le frappait à une vitesse ahurissante – mâchoire, cage thoracique, abdomen, épaules, chaque endroit du haut de son corps en prit pour son grade. Le garçon fut propulsé en arrière, son dos s’écrasant contre le mur de l’arène, lui arrachant un nouveau cri de douleur qui s’accompagnait d’une gerbe de sang venant rougir les dalles devant lui. Contrairement à Hako, son corps ne saignait pas et ses vêtements étaient intacts : toute l’essence carmin qui s’échappait de lui le faisait depuis sa bouche ; c’étaient de dommages internes qu’il souffrait le plus. Sa lèvre inférieure était fendue et son corps se couvrait déjà d’ecchymoses, seules marques visibles du passage à tabac qu’il venait de subir.

*Papa…*

Le voile noir s’assombrit encore plus, cachant complètement le monde à sa vue. Le choc d’avoir heurté le mur le poussant vers l’avant, Shishio commença lentement à basculer. Dans une dernière tentative de se maintenir debout, son corps tituba un instant, ses jambes avançant pour tenter continuer à porter son poids – un premier pas, puis un deuxième. Son torse penchait trop, et trop vite ; il tomberait avant le troisième pas.

*J’ai mal, Papa…*

« Tu veux devenir un shinobi comme moi, Shishio ? »

*C’est pas le moment…*

Intérieurement, Shishio pesta contre son cerveau. Qu’est-ce que cela pouvait bien lui apporter, de lui montrer ce souvenir maintenant ? Cette mémoire ravivée lors de sa victoire contre Inuzuka Yukimura, il ne l’avait pas perdue en quelques jours. Il se souvenait bien, de ce jour où Aketora avait fièrement déclaré que son fils le surpasserait un jour. Shishio s’était même attaché à cette idée, il avait eu la sottise d’y croire à nouveau, et voilà où cela l’avait mené : son corps tout entier était prêt à tomber en miettes, il ne tenait plus debout, le sang qu’il avait vomit rougissait le sol autour de lui. Si ce n’était la douleur, tout ce qu’il ressentait se limitait à la fraîcheur de l’air contre son visage tandis qu’il tombait au ralenti vers l’arène. Combien de temps pouvait bien durer une chute ? Il était certain qu’il aurait déjà dû toucher le sol…

Y avait-il jamais eu une autre destination pour lui, de toutes façons ? Tomber et rester au sol, c’était encore ce qu’il faisait de mieux. C’était le meilleur moyen pour qu’on arrête plus rapidement de le frapper. Rien n’agaçait plus ses tourmenteurs que de le voir se relever ; il valait toujours mieux jouer les serpillères et s’en tirer avec quelques coups de pied que de se faire passer à tabac, encore et encore. Il n’avait qu’à accueillir l’embrassade du sol de pierre, laissant son corps s’y écraser confortablement, reposer son visage dans son propre sang et attendre que les restes de sa conscience l’abandonnent pour de bon. L’humiliation ferait toujours moins mal que les coups de poing.

« Tant que tu gardes cette flamme en toi… Tu y arriveras, Shishio. »

Encore cette histoire de flammes… C’était bien beau, de parader avec ses éventails blancs et rouges peints sur ses vêtements, de se faire appeler Uchiha. Shishio connaissait la vérité sur lui-même, cependant ; cette chaleur au creux de sa poitrine, qu’il avait eu l’arrogance d’appeler son feu, ce n’était qu’un brasier de pantomime, une vaste blague, un mensonge qu’il s’était raconté pour lui donner l’impression qu’il était le digne disciple de Yurikô, le digne fils de son père. Peu importe combien de fois il mentait, combien de coups de chance il avait, la destination restait la même : le sol. La douleur, puis l’humiliation. Pas nécessairement dans cet ordre.

La sensation de chaleur qui l’habitait depuis quelques jours se refroidissait à grande vitesse. La farce avait suffisamment duré ; la flamme fantasmée était condamnée à faner pour ne jamais réapparaître, révélant Shishio pour ce qu’il était au monde : le dernier des ratés, à peine digne du nom de genin et certainement pas de celui d’Uchiha.

*T’es trop nul, Shishio…*

« Non. »

Le bruit retentissant de la sandale de Shishio se posant sur le sol pour le troisième pas lui semblait sonner comme un coup de tonnerre dans le silence de l’arène.

« Je n’ai… Pas… Fini. »

La voix du garçon était rendue rocailleuse par la douleur intense qui lui marquait encore les poumons et la gorge, laissant entendre un sifflement chaque fois qu’il respirait.

*Dis ce que tu veux,* grogna-t-il, comme un défi à sa propre conscience, *mais je n’ai pas fini de me battre. Tant que mon corps sera en un seul morceau… Peu importe la douleur, je refuse de tomber ! Tu ne me dicteras plus ma volonté !*

Un nouveau sifflement, une nouvelle gerbe de sang. Les dents de Shishio claquèrent les unes contre les autres tandis qu’il serrait les poings de toutes ses forces, se faisant violence pour reprendre le contrôle de son corps. Le voile noir avait disparu pour de bon ; lorsqu’il releva les yeux vers Hako, c’était en rouge qu’il voyait le monde.





Ne laissant à cet échange de regard qu’une fraction de seconde, il disparut instantanément, propulsant son corps dans les airs à la force de ses jambes meurtries. Se saisissant de l’imposant shuriken accroché sur le côté de son sac à dos, il en déplia les quatre lames, ses yeux toujours fixés sur la jeune Aburame.

« Attrape-ça ! »

D’une torsion du haut de son corps, il se fit lui-même tournoyer dans les airs, donnant de l’élan à l’arme pour la lancer droit sur sa cible. Tandis que ses pieds touchaient le sol, à la fin de son saut, il renchérit avec une volée de shurikens vers les jambes de la jeune Aburame. De l’extérieur, on aurait pu croire qu’il voulait la blesser aux jambes pour réduire l’écart de vitesse entre eux, mais la vérité était bien plus simple : il voulait simplement attirer l’attention d’Hako sur autre chose que le second Fuma Shuriken qui fondait droit sur elle, caché dans l’ombre du premier.

Uchiha Shishio ne s’était pas encore rendu compte de ce qui lui arrivait ; il se contentait de se battre avec tout ce qu’il avait, de rétorquer en envoyant une pluie d’armes sur son adversaire. Ses jets étaient plus précis qu’ils ne l’avaient jamais été, mais ce n’était pas le genre de détails sur lequel il avait le temps de s’attarder : l’heure était au combat, au sang, non à l’introspection.

*Je peux la voir ! … Je peux la voir ?*

Si l’esprit d’Uchiha Shishio n’était pas intégralement focalisé sur le combat qu’il était en train de livrer, sa perplexité face à l’exacerbation soudaine de ses sens l’aurait sans doute arrêté net. Ce n’était pas seulement ses yeux : ses pupilles étaient désormais capables de suivre les mouvements d’Hako malgré sa vitesse bien supérieure, certes, mais le progrès instantané de Shishio ne s’arrêtait pas là. L’éveil de son Sharingan l’avait fait entrer dans un état second : son cerveau éliminait instantanément toute pensée inutile au combat qui se présentait dans son esprit. Le garçon avait entièrement oublié la présence de l’audience, ou même de l’arbitre ; il ne voyait, ne ressentait qu’Hako. La partie de son esprit qui, à l’accoutumée, remettait en question et rabaissait chacun de ses gestes et chacune de ses décisions avait entièrement disparu ; à sa place, une liste en constante évolution des mouvements qui lui étaient possibles, le nombre d’armes encore présentes dans son sac, une constatation progressive de ce qui fonctionnait sur la jeune Aburame. Elle était encore en dehors de sa catégorie, cela ne faisait pas le moindre doute ; mais là où cette idée effrayait Shishio quelques minutes plus tôt, le forçant à se faire violence pour se présenter dans cette arène et faire face à son accompagnatrice sans trembler des genoux, c’était ici une information neutre, sans aucune portée émotionnelle. Elle était plus forte que lui, donc il devait se montrer plus futé qu’elle. Elle avait esquivé sans peine ses grands shurikens, mais n’était pas si rapide qu’elle pouvait échapper complètement à une pluie continue. Aussitôt cette réalisation présente dans son esprit, sa main plongeait dans son sac, s’emparant de nouveaux projectiles.

Cette transe guerrière, chassant de son esprit son doute habituel, l’empêchait de réaliser ce qui était en train de lui arriver. Il n’avait simplement pas le temps pour ça. Aussitôt ses jambes à nouveau sur le sol, Aburame Hako lui courait déjà dessus à pleine vitesse, armant l’une de ses paumes et l’interpellant avec quelque chose qui ressemblait à… De la joie ? La chuunin trouvait-elle cet instant plaisant ? Chaque parcelle du corps de Shishio hurlait à la douleur, chaque fibre de son être était prête à se déchirer d’un instant à l’autre, au premier faux mouvement.

Mais tant que l’un des deux adversaires s’amusait, ça pourrait être pire, n’est-ce pas ?

*Mes yeux légendaires ? Mais de quoi parle-t-elle ?*

Aussitôt la pensée formulée, elle disparût de son esprit ; Hako était déjà trop proche. Lançant des shurikens en avant dans l’espoir de la retarder, Shishio se précipita en arrière, tâchant de gagner quelques précieuses secondes sur l’assaut. Lançant sa main vers la droite, un unique shuriken fila à travers les airs, sans aucun espoir de croiser le chemin de la jeune Aburame. Au lieu de cela, le projectile fonçait droit vers un autre – le Fuma Shûriken dissimulé précédemment par la technique de Shishio, maintenant planté dans le sol de pierre. Les yeux rouges passèrent en un éclair du shuriken à Hako. Un clignement d’yeux de latence et il manquerait sa fenêtre de tir ; parvenir à agir avant que la paume armée ne le frappe en plein abdomen relevait déjà presque du miracle.

Shishio referma son poing, se saisissant du fil d’acier presque invisible qui était accroché à son projectile. Plus qu’une poignée de secondes avant l’impact. D'un geste infime, il altéra la trajectoire du shuriken, faisant s'enrouler le fil autour de l'anneau d'acier au centre du Fuma Shuriken.

*Allez…!*

Tirant de toutes ses forces, il arracha le Fuma Shuriken de terre, le propulsant dans sa direction – et celle d’Hako. Laissant l’élan déjà donné faire le reste, il lâcha le fil d’acier pour joindre ses mains en un seul signe, dirigeant ses yeux rougeoyants sur les iris verts de la jeune Aburame, tandis que la paume de celle-ci se rapprochait dangereusement, prête à mettre fin au combat d’un seul coup.

Le Fuma Shuriken était presque là, prêt à les frapper tous les deux en même temps – l’espace d’un instant, Shishio donnait sérieusement l’impression qu’il voulait les empaler tous les deux.

Alors que la réalité était beaucoup moins subtile que cela.

« Katsu ! »


Le Fuma Shuriken se trouvait entre les deux combattants quand le parchemin explosif soigneusement collée sur l’une des pales, prêt à exploser au signe de son propriétaire, se révéla enfin au regard d’Hako, s’illuminant de façon destructrice.

Malgré ses yeux rouges, Shishio perdit aussitôt la Chuunin de vue ; dans un dernier effort pour « abattre l’adversaire », il avait délibérément déclenché l’explosion à quelques centimètres de son corps. Il fut soulevé de terre, propulsé dans les airs par le souffle destructeur du parchemin ; sa carcasse roula à plusieurs reprises sur le sol dallé avant de finalement s’arrêter. Tous ses membres tremblaient de douleur lorsque le jeune Uchiha plaça ses paumes sous lui, poussant malgré la douleur pour tenter de se relever ; ses yeux balayaient le terrain, à la recherche de l’adversaire, cherchant à établir la situation, à se préparer à la suite du combat. Le souffle court, sa cage thoracique se soulevant douloureusement à chaque inspiration, le garçon semblait à une pichenette de l’inconscience – sinon pire.
Presque incapable de bouger, Shishio saisit un kunai dans chaque main, se préparant malgré tout à la suite du combat – il ne faisait aucun doute, cependant, qu’il était bien trop blessé pour poursuivre en respectant les règles du tournoi. Ce qui, pour le garçon qui en avait oublié qu’il était dans un tournoi et non en mission en train de lutter pour sa vie et son village, n’était bien sûr pas un problème.