[Training] L'heure de la trempette [PV Nozomo Brother]

Depuis que je connaissais les frangins, j'avais l'impression de cumuler les heures d'enseignement et d'entrainement. Si j'avais aucun problème avec la seconde partie, la première était souvent la plus chiante. Déjà parce que je me sentais pas pédagogue et puis tout simplement parce que c'était clairement la galère quand on voulait échanger nos impressions. Je perdais un temps fou à tout écrire et ça me gonflait. La merde... ou le karma. Mais voilà, les deux Nozomo m'avaient surpris par leurs caractères. J'irais jusqu'à dire qu'ils m'étaient relativement sympathiques, raison pour laquelle je leur faisais quelques fleurs. Noter que je ne le faisais pas pour tout le monde. Pourquoi? J'en savais rien. Peut-être que je ne faisais que machinalement leur rendre leur amabilité, ou peut-être que je les remerciais de faire des efforts que la plupart des gens ne feraient pas.... genre apprendre le langage des signes. Qui irait se faire chier, hein? Bah apparemment eux. De plus, Yukio prenait le temps de m'enseigner des techniques de kenjutsu et Hayato.... bah.... on allait dire qu'il me donnait l'impression d'être quelqu'un de normale. Il me parlait sans complexe comme si on se connaissait depuis des années. Chose qui était résolument très bizarre à tous les points de vue. Un peu le même délire que Kalida mais avec un autre caractère.

Tout ça pour dire que je les dépannais une nouvelle fois, les deux ziozios. J'avais cru comprendre que les types s'étaient tellement concentrés dans le domaine de prédilction qu'ils maîtrisaient pas des trucs de genin. Entendons-nous bien, j'allais ni me foutre de leur gueule, ni les juger. J'étais exactement pareil et d'ailleurs, ce que j'allais leur apprendre et bien c'était Kalida qui me l'avait enseigné, le truc le plus con du monde même. C'était un peu la honte pour des gens de haut niveau de pas le maîtriser. Pour eux j'entendais. Moi, la honte, je connaissais pas trop ça.

Je leur avais demandé de me retrouver devant les grandes portes du village et indiqué dans mon message que je comptais les emmener dans un endroit sympas. Le territoire du vent était grand et il existait un grand nombre d'endroits insoupçonné, surtout pour ceux qui n'avaient pas grandi dans le désert. Je voulais mêler le plaisir au boulot, ça rendait toujours les choses plus agréables, mais aussi leur montrer un endroit que j'aimais beaucoup. C'était une autre façon pour moi de remercier les deux bonhommes.

J'allais les faire marcher un bon moment, sans trop leur dévoiler quoique ce soit, tout en leur ayant donné un message de bien enregistrer la route dans leur mémoire. Il fallait dire qu'on se perdait très facilement dans les dunes changeantes. On s'était arrêté plusieurs fois en cours de route mais jamais bien longtemps jusqu'à arriver à destination : une oasis. C'était pas celle que l'on croyait, pas la touristique, pas celle qui était le checkpoint du désert. Cette oasis-là, il n'y avait personne, une petite perle au milieu de nulle part dont les eaux restaient étonnamment fraîches. Très peu de gens devait connaitre le coin, à moins d'être des vieux nomades. On voyait clairement qu'il n'y avait aucune activité ici, que presque personne ne passait et c'était peut-être la raison pour laquelle l'endroit était aussi bien préservé.

" On est arrivé. "

Je leur fis signe des mains. Puisqu'ils s'amélioraient dans le langage des signes, dans le pire des cas, ils auraient deviné d'eux-mêmes... je supposais. Bref, cela se dépeignait comme une marre en matière de taille, c'était pas grand, pas petit non plus, et contrairement aux apparences, il y avait tout de même une certaine profondeur au cœur du point d'eau. Il devait sans doute y avoir une source en dessous. Pour le reste, c'était le classique des points humides du désert. Des palmiers avaient trouvé de quoi pousser, des plantes piquantes autour, de grosses caillasses qui apportaient aussi un peu d'ombre en fonction de la façon dont tournait le soleil. Mais cela avait son charme, un charme propre au désert, un point de couleur dans un paysage fait d'un ocre presque monotone.

Nonchalamment, je déposais mes affaires au pied d'un des grands palmiers et je repris mes habitudes avec mon carnet pour leur expliquer le pourquoi et le comment.

" Je vous ai emmené ici pour apprendre la marche sur l'eau. On aurait pu faire ça au village mais cela aurait été moins fun. "

Je leur montrais ma première note avant d'en écrire une autre.

" Ce coin est quasiment jamais visité. J'y viens quand j'ai besoin de m'éloigner de Suna. Vous n'aurez jamais personne pour vous emmerder si vous avez besoin de rester seul. Vraiment seul je veux dire. Si vous avez bien enregistré la route, vous pourrez venir ici quand vous voulez. "

D'ailleurs, quand j'avais besoin de rester seule, je venais dans le coin régulièrement. J'avais pas cinquante endroits où me planquer : les remparts au lever ou au coucher du soleil, mon atelier et ici. Peu-être dans un bar aussi mais ça... c'était pas vraiment une planque. Une fois que je leur eu tendu mon message, j'en revins vite aux choses sérieuses : la technique de marche sur l'eau. Je ne les fis pas miroiter cinquante ans et d'un pas tranquille, je quittais le sable chaud pour me mettre en déambuler sur la surface du lac avant de faire une sorte de singerie qui signifiait "tadam".

Je revins vers le rivage et pris mon calepin.

" Pour ce résultat, il vous faut malaxer une petite quantité de chakra sous vos petons. Tout est une question de dosage, d'équilibre avec la surface sur laquelle vous voulez marcher. C'est comme avoir un coussin d'air sous les pieds. Pour l'image. "

Je savais pas si cela leur parlerait, mais c'était par l'apprentissage directe qu'on maîtrisait.

" Votre chakra agit comme s'il repoussait la surface sur laquelle vous marchez. Faut l'adapter à la nature de l'élément que vous traversez. Il faut le modeler comme de la glaise. "

On verrait bien ce que ça donnerait.

Technique à enseigner:

Les leçons de base, c'était souvent les plus chiantes à apprendre quand on avait du bagage derrière soi. On se mettait à cogiter de trop alors qu'il fallait juste être simple. Plus on voulait devenir des shinobis qualifiées, plus on se mettait de la difficulté et de la technique... au point de plus saisir les bases. Le Suimen hoko no gyo était de celle-là, de ces bricoles qu'on oubliait et qu'on galérait un peu à gérer parce qu'il fallait revenir aux fondamentaux. En tout cas, Yukio n'eut aucun mal à reconnaître que cela lui était totalement passé sous le nez, quant à Hayato, il me suffit de croiser son regard pour comprendre qu'il en était au même point, mais il n'avait pas grand-chose à rajouter au propos de son frère.

Alors que pour l'anecdote, j'avais précisé aux frangins qu'ils étaient libres de venir ici quand ils le voulaient, je fus surprise par le cadet des Nozomo. Je m'étais peut-être mal faite comprendre puisque j'avais pas tellement l'intention de les dégager à coup de pied si je devais les croiser ici. C'était pas ma propriété non plus après tout. Je n'eus qu'un vague haussement d'épaules pour lui dire "tu feras comme tu veux". Puis sans trop tarder, je les poussais à passer à la pratique après une rapide explication.

Alors que je déambulais tranquillement sur l'eau, le premier qui voulut se lancer fut bien évidemment Yukio. Le plus tête brûlé des deux. Rien d'étonnant. De mon point de vue, c'était assez drôle. Je le voyais un peu galérer et surtout je pouvais lire toutes ces émotions sur son visage. La concentration, l'hésitation, la frustration et une forme de satisfaction lorsqu'il parvint à choper un peu le coup, se montrant plus stable... sans pour autant prendre le risque de trop quitter le rivage.

De l'autre côté, Hayato avait une autre approche, un autre style. Plus prudent. On lisait moins facilement sur son visage aussi, au point de m'interroger sur la réalité de leur lien de sang. Ils ne se ressemblaient pas du tout. Il s'avança plus pensif, plus dans la réflexion. Je crus même qu'il serait capable de réussir dès la première tentative... jusqu'à ce qu'il s'enfonçât dans l'eau. Visiblement un truc l'avait perturbé. Je restais "muette", il avait pas besoin de mes commentaires. Ni Yukio d'ailleurs. Ces deux-là étaient pas du genre à laisser tomber au premier essai.

Alors que j'avais les deux Nozomo à moitié défroqué devant moi, je me rendais compte que j'étais toujours entièrement vêtue. N'allez cependant pas vous faire des idées, c'était juste un peu merdique de me dire que je pouvais aussi me retrouver entièrement trempée... jusqu'à ce qu'une idée me vint. Tranquillement, j'abandonnais un peu les frangins à leur tentative pour me rendre près du bord où j'avais déposé mes affaires. Je finis par déposer mon katana qui était toujours à ma ceinture, retirer mes chaussures et mon futal. Comme je vous disais, ne vous emballez pas. Je gardais le principal sur moi  - un peu de décence quand même bien qu'en soit, je m'en foutais un peu, j'étais pas pudique - et de toutes les manières, j'étais pas dans la catégorie des jolies filles à reluquer, surtout quand on voyait la grande cicatrice qui faillit me couter la jambe. Enfin bref.

Alors que je trouvais Yukio et Hayato encore un peu hésitant, j'arrivais derrière eux, silencieuse jusque là bien évidemment, avant de tenter de "parler", puisque je n'avais plus mon carnet.

" Pas réfléchir. Marcher. Confiance. "

Comme si je désirais leur donner un peu d'impulsion, je les poussais un peu dans le dos pour leur dire d'aller de l'avant. C'était que de l'eau après tout, il ne risquait rien et s'il ne savait pas nager.

" Si pas nager. Moi aiderait. "

De la même manière que la première fois, et peut-être de façon plus égale puisque j'étais aussi dépouillée qu'eux, je marchais sur l'eau en leur passant devant et me rendis au centre de l'oasis avec aisance. C'était aussi une façon de dire, si moi je peux le faire, vous devriez y arriver sans mal. Puis une fois en plein centre, je relâchais totalement le chakra de sous mes pieds pour plonger, m'enfonçant dans l'eau d'un coup comme si je venais de plonger. J'aimais bien. Être dans l'eau - oui j'étais pourtant une sunajin pure souche. Surtout la sensation quand on remontait à la surface, lentement, comme un berceau vers la lumière, le soleil qui se reflétait sur les vagues tremblantes en scintillant alors que le corps semblait être porté avec légèreté. Mais j'étais pas là pour mon petit plaisir. Lorsque je sortis la tête de l'eau, j'eus encore quelques mots brisés pour mes camarades.

" Moi regarder. Sous l'eau. Pieds à la surface. Maintenez chakra. Uniforme. "

Mes mots étaient saccadés et on voyait clairement que je faisais des efforts. Cela me cramait la gorge mais j'avais pas le choix. Ils ne maîtrisaient pas encore le langage des signes. Je leur fis un signe de main pour continuer à avancer et marcher, moi je vérifierais si leur semelle de chakra était valable.

Technique à enseigner:

Il y avait des types qui rêvaient de regarder la vie d'en haut, moi je la matais d'en bas. Alors que j'avais expliqué mes intentions aux deux frères, je pris une bonne bouffée d'air avant d'aller sous l'eau comme promis. J'étais pas une professionnelle de l'apnée donc autant dire que je ne comptais pas y rester longtemps, cela ne m'empêchait pas de me défendre, chose ironique quand on savait que je fumais beaucoup. Le premier que je vis courir comme un dératé, ce fut bien évidemment Yukio. Si au début ses pas semblaient maladroits, il se rattrapait au fur et à mesure, commençant naturellement par ajuster d'instinct le chakra sous ses pieds. C'était clairement un intuitif, du genre on fonçait et on voyait si ça marchait, sans pour autant forcément foncer comme un cinglé. Lorsque je remontais à la surface, il semblait assez content de lui et pour lui confirmer que c'était pas trop mal, je fis le signe "ok" avec les doigts. Mais peut-être que j'étais allée trop vite en besogne. À peine avais-je fait mon geste qu'il finit à la flotte, se mettant à gesticuler comme un futur noyé. J'étais à deux doigts d'intervenir pour lui sauver les miches, mais il se rattrapa... en quelque sorte. Je pris un air blasé quand je le vis faire des galipettes, mais si ça pouvait l'aider... j'allais pas juger.

Du côté de Hayato, c'était une autre ambiance. Déjà, il se sentit obligé de me préciser qu'ils savaient nager. Une bonne chose. Personnellement, je n'avais pas fait la remarquer parce que je les sous-estimais, mais plutôt pour jouer les bouées de secours au cas où. S'ils en n'avaient pas besoin, je ne me plaindrais pas et je supposais que c'était sa façon de me dire qu'ils étaient de grands garçons. Cela me fit un peu sourire. Il était si facile à titiller celui-là. En tout cas, de la même manière que pour son frère, je m'attelais à l'observer sous le rideau du lac. Cela faisait un peu étrange en y repensant, un peu comme observer le monde de façon omnisciente, être là sans y être. M'enfin, tout ça pour en revenir sur le fait que lui aussi, il gérait bien le truc. De toute façon, ces deux-là apprenaient vite, ils avaient un bon esprit et plus de sérieux que les apparences le laissaient croire.

Quand je réapparus à la surface de l'eau, je fis le même signe à Hayato pour lui dire que tout était bien... mais visiblement, l'aîné des Nozomo avait répondu à l'affirmative au défi du cadet. Je ne pus m'empêcher de soupirer de leurs enfantillages et pourtant, je souriais également. Ils me faisaient rire. C'était aussi con que ça. Il y avait quelque chose de léger chez eux, de rafraîchissant qui étonnamment me faisait oublier nos vies merdiques. Ou bien c'était de voir leur complicité, leur manière de s'épauler... je supposais que je les enviais inconsciemment.

Bon par contre, on devait clairement avoir l'air bizarre. Trois adultes à moitié nu dans un oasis avec un type à quatre pattes, un qui faisait des saltos et une femme en plein milieu avec seulement le nez qui sortait de la flotte... Bonjour l'image des sunajin. On avait plutôt l'air de gosses que de shinobis à l'entrainement. Alors que Yukio réussit à se redresser sur ces deux jambes, Hayato, lui, se montra plus aventureux et semblait vouloir tester les possibilités de la marche sur l'eau. Je découvris que le gars était un vrai dauphin mais...  il devait retravailler ses chutes. Pendant quelques secondes, je crus le voir rougir mais avec le soleil dans la gueule, j'avais dû rêver.

En attendant, Hayato nous fit un beau plongeon et revint à la surface un peu penaud. Je me mis à sourire avant de le pointer du doigt.

" Carpe. "

On ne voyait que sa tête dépassée et ça me faisait penser au poisson. Je me mis à rire à ma propre connerie. Ouais, avec ce que disait la légende sur ce poisson, c'était un peu cocasse. Et ouais, je pouvais déconner sur ma propre situation. Je me tournais alors quelques secondes vers Yukio.

" Adapte chakra. Force du pas. Mais bien. "

Je me tournais maintenant vers Hayato.

" Bonne semelle. Pas te laisser troubler. Mais bien. "

Puis pour la déconne, je frappais de mes bras la surface de l'eau pour leur envoyer un jet de flotte dans la tronche.

" Félicitations. Marcheurs. "

Les voilà béni les Nozomo.

Technique à enseigner:

C'était amusant de regarder les deux frangins, beaucoup plus que ce que je croyais. Lorsque Yukio me regarda pour me demander si je ne m'emmerdais pas, je lui fis un signe en levant le pouce pour dire que tout était bon. Avec toutes leurs cabrioles, j'assistais carrément à un spectacle de cirque, j'allais pas me plaindre... et c'était gratuit. De toute façon, ils pouvaient très bien se détendre tous les deux, ils avaient maîtrisé le suimen de manière remarquable, bien que je leur balancerais jamais la chose de cette façon. Il fallait pas non plus qu'ils prirent le boulard.

Du coup, comme j'avais sonné la cloche de la récréation, on se surprit à tous redevenir de véritables gosses, une parenthèse plutôt enchantée dans le contexte de nos vies bordéliques. M'enfin, on avait fait un sacré bond dans le temps avec nos conneries... et dire qu'on se faisait passer pour des shinobis. On était au top de notre crédibilité. D'ailleurs, n'avais-je pas donné le départ en aspergeant mon camarade ? Yukio en saisit le bâton en tout cas, courant dans ma direction avec une esquisse sur le visage qui n'annonçait rien de bon. Je pouvais vous dire que j'affichais une tête clairement pas rassurée jusqu'à ce que brusquement, il fit une bombe dans l'eau, relâchant son chakra pour plonger. Par réflexe, je levais les bras pour protéger mon visage, mais j'avais bien cru boire la tasse.

Est-ce qu'il s'arrêta là le bougre ? Nenni ! Je sentis ses mains se saisir de mes pieds - cela me chatouilla un peu d'ailleurs - pour le balancer de toutes ses forces comme un sac. Autant vous dire que le vol plané, je l'eus bien senti, et j'affichais pas une tête des plus jouasses lorsque je réussis à ressortir le bout de mon nez de l'eau, crachant un jet de flotte avec un regard blasé. Je me vengerais... je savais pas encore comment, mais ça lui pendrait au nez.... jusqu'au mauvais plan. Un type qui prétendait avoir une idée, généralement ça sentait pas bon.

Alors du coup, autant vous dire que j'avais rien compris à ce qui m'arrivait. Yukio avait eu l'idée, Hayato suivait étrangement alors que je ne le pensais pas dans ce genre de délire - même s'il fallut noter le petit instant d'hésitation. Ils étaient peut-être pas frangin pour rien après tout... à ceci près que je me retrouvais entrainer dans leur délire, et je suivais. Impressionnant le genre de connerie dans lesquelles ils étaient capable de me faire faire. Je n'eus cependant pas trop le temps de donner le change qu'Hayato me saisit la main pour monter littéralement sur son frère, qui, de son côté, devant supporter notre poids tout en maintenant le suimen.

Quand je parlais de jeu du cirque tout à l'heure, j'étais véritablement pas loin du compte et d'un autre côté, notre petite pyramide, c'était également un peu un jeu de confiance, le genre de jeu auquel je ne m'adonnais clairement pas d'habitude. J'étais de celle qui n'attendait rien des autres, je ne donnais aucune valeur aux promesses pour en avoir connu trop qui ne furent jamais tenues, je ne me reposais pas non plus sur l'idée de devoir être protégée par qui que ce fût, même mes coéquipiers. Chacun avait après tout son rôle à jouer, c'était à nous d'être compétent ou pas, le reste, ce n'était que de la banale coopération. Mais là, pour le coup, j'acceptais leurs mains tendues, j'acceptais leurs jeux idiots, j'acceptais d'entrer un peu dans leur monde et redevenir la gamine que je ne fus jamais. Il était temps à trente balais bien qu'il ne s'agissait là que d'un aparté, mais un intermède où nous pouvions afficher des sourires éclatants, amusés, peut-être le genre de figure que l'on aurait pu avoir si nous avions été de simples civils, si nous n'avions pas connu nos vies respectives.

Je ne pouvais pas prédire combien de temps nous pourrions conserver cet esprit léger, mais nous semblions tous étonnamment d'accords pour le faire durer un peu plus. J'eus un petit sourire malicieux quand je vis celui d'Hayato qui proposa d'aller un peu plus loin. Je lâchais un petit "ha" de défi et lui fit un signe que je voulais monter sur ces épaules à lui. On allait faire la grande échelle. Il était temps de voir si les Nozomo avaient les épaules solides au sens littéral du terme. Bon, je vous cacherais pas que ce fut sacrément cocasse et un véritable jeu d'équilibriste pour pas éclater le dos de Yukio. Il fallait qu'Hayato prit les bons appuis pour me permettre à mon tour de grimper sur lui. Est-ce qu'on faillit se casser la figure ? Oh que oui. Au moment même où je tentais mon ascension sur l'aîné des frangins, le cadet vira un peu trop sur sa gauche, me faisant glisser - on était tous mouillés après tout. J'étais littéralement accroché à Hayato comme un koala.

" Oups. "

Mais est-ce qu'on allait abandonner ? Non. Cela serait vachement con si près du but. Me raclant la gorge comme pour me donner un peu de motivation - et un peu de dignité - je fis un petit regard au Nozomo pour m'excuser de cette petite glissade pour trouver la force de monter sur ses épaules, jusqu'à ce que lui eût la force de se redresser à son tour. Voilà comment on créerait une belle brochette de sunajin, monter les uns sur les autres comme des dominos. Noter qu'il fallait pas avoir le vertige parce que j'avais une sacré vue de ma hauteur... tout comme je savais que ça ferait pas long feu non plus. Pas que j'avais pas confiance dans les capacités musculaires de Yukio mais.... Autant prendre les devants pour mieux gérer la catastrophe.

C'était l'heure du saut de l'ange. Je me mis à siffler pour prévenir les deux frères avant de plonger la tête la première dans le grand trou d'eau que formait cette oasis. Il me fallait pas me rater sinon je pouvais me briser la nuque mais comme disait le proverbe : on était pas là pour trier des putains lentilles et à Suna on était pas des frileux. J'espérais simplement que la hauteur et la vitesse ne me fit pas perdre mes fringues en pénétrant dans la flotte. Bah... si ça arrivait, on aurait qu'à dire que c'était pour compenser ce que j'avais trop vu pendant l'entrainement du Dai Henge.

Les situations gênantes, ça me connaissait. J'avais l'art et la manière de les provoquer ou de les attiser. Généralement, c'était parce que je trouvais ça drôle de foutre les autres dans l'embarras alors que moi, je m'en tamponnais le coquillard. Mais là pour le coup, déjà que je pensais avoir un karma assez pourri, j'atteignais des sommets. Mais replaçons-nous un peu dans le contexte de la loose.

Avec les frangins, on faisait clairement les cons comme des gosses en vacances. Il lançait des boutades, j'affichais une mine blasée quand je pris gratuitement celle de Hayato en ce qui concernait mon poids. Il avait de la chance que je ne pouvais pas répliquer, ni dans les paroles, ni dans les gestes. J'aurais toujours pu lui dire un petit "crétin" mais cela ne valait pas le coup. Ce fut alors le début de la première galère, celui de mon ascension. Si Yukio supportait tant bien que mal notre poids, j'avais eu en tête de grimper sur l'autre grande perche de Hayato. Forcément, il y eut un petit problème d'équilibrage que le cadet finit par rattraper... et qui couta quelques marques de griffures dans le dos de ma branche de sauvetage. Il aurait des histoires à raconter comme ça, il survivrait.

Bref, tout cela pour en venir au fait que nous parvenions à exécuter notre grande figure et que j'eus la formidable idée de plonger.... l'ainé des Nozomo crut bon de m'aider dans ma tâche, mais je fus surprise par la force de l'élan qui me fournit. Qui disait plus d'élan, disait un saut plus haut et donc une chute qui prenait plus de vitesse aussi. Les lois de la gravité furent implacable et mon saut en piquet approximatif. Est-ce que je m'étais tapée la honte dans la chute ? Non. J'avais bizarrement eu assez d'instinct pour faire les choses comme il faut et ne pas me briser le coup. Par contre, cela me conduisit profondément dans le petit lac. Heureusement que j'avais assez d'apnée pour remonter à la surface sauf que....

... sauf qu'il y eut un petit problème. Généralement ce type d'exercice réclamait d'avoir le bon équipement, ou un minimum qui pouvait assurer un peu de sécurité... du genre une ceinture ? Alors j'allais vous faire un putain de dessin : saut en piquet, sous-vêtement classique, violence de la vitesse de chute, arrachage de fringue en dessous de la ceinture parce que pas de putain de ceinture. Donc là, j'étais littéralement défroquée. Je n'avais que mon pauvre t-shirt sur le dos et la lune qui semblait un peu trop profiter du lagon. Le seule avantage que j'avais était que les mecs en surface étaient pas entrée dans le mode plongeon et je pouvais tenter de sauver ma dignité.

Sans oxygène, j'allais pas pousser ma réflexion trop loin, j'étais pas non plus une championne de natation. Me grouillant, je retirais mon t-shirt pour le déchirer et recouvrir décemment ce qu'il y avait à cacher. Pour le reste ? Osef. C'était le moins mauvais. Plus facile à cacher avec mes mains une fois à l'air libre. Et puis les types, ils n’allaient pas me faire croire qu'ils avaient jamais vu de femme alors il ferait avec. C'était des shinobi après tout et des adultes. Enfin... on était censé être des adultes.

Sans plus attendre, je bataillais pour remonter vite à la surface parce que l'air allait pas tarder à me manquer, mais je pus m'empêcher de zieuter le fond... quand je crus voir un machin passer. Bizarre. Je ne m'attardais pas et finis par sortir la tête de l'eau en prenant une grande bouffée d'air. À ce moment-là Yukio surgit de nulle part et fit une bombe monumentale qui m'éclaboussa alors que je cherchais du regard mon fringue perdu. Putain le type m'aidait clairement pas là. Mais puisque les deux frères s'éclataient, cela me laisserait le temps de trouver mon dû... ni vu... ni connu... ou presque. Quelle chienlit.

C'était la merde. Clairement la merde. J'avais beau tenté de trafiquer mon t-shirt comme je pouvais, il était pas assez grand et il y eut le moment de gêne. À quelques mètres de moi, je vis Yukio regarder dans ma direction les sourcils froncés. Il y avait deux possibilités : soit il reluquait comme un cochon, soit il ne comprenait pas la situation. Quoiqu'il était peut-être capable de faire les deux en même temps le type. Ce fut à ce moment-là que je le vis s'avancer vers moi et je ne pus m'empêcher d'avoir un regard un peu suspicieux jusqu'à ce qu'il m'indiquât qu'il allait me chercher quelque chose. Tenant tant bien que mal le tissu qu'il me restait, je réussis néanmoins à faire un petit signe de la main maladroit pour lui dire "merci"... avant de couler un peu. La merde je vous disais. Heureusement que j'étais pas manchot.

En tout cas, aussitôt il repartit à pleine vitesse près du rivage récupérer son propre t-shirt et me le rapporter. Je tendis naturellement la main pour le lui prendre et hocha à nouveau en guise de merci alors que j'étais clairement agacée. Pas par lui, par la situation. Comme je l'avais dit, je n’étais pas pudique de base, mais ça m'emmerdait. Sans déconner, comment un truc pareil ça pouvait disparaitre comme ça ? C'était un tissu léger, ça devait flotter non ? Je tournais la tête dans tous les sens, avant de finalement trouver la force de dire quelques mots.

" Perdue. Le bas. "

Noter que j'avais bien galéré à lui faire comprendre le soucis principal mais je ne m'attendais clairement pas à ce que cette histoire partie autant en sucette qu'à cet instant. Yukio se mit alors à brailler auprès de son frère qu'ils avaient une mission de haute importance, tout un scénario déluré dans laquelle l'objet qui dissimulait mon intimité devenait une sorte de saint-graal. J'étais... dépitée.... et d'un autre côté, cela semblait particulièrement amusé les Nozomo qui affichaient un grand sourire de gamin. On voyait que c'était pas eux qui se baladait la lune à l'air, hein! M'enfin bref. Cela nous ferait sans doute une belle anecdote pour plus tard bien que j'étais pas particulièrement dans le mood.

Pourquoi ? Parce qu'après que les frangins se soient séparés pour leur "mission", me laissant galérer comme je pouvais pour rester à la surface de l'eau, l'histoire prit une dimension à laquelle on s'attendait vraiment pas. Alors que moi dans ma tête j'espérais qu'ils en profitassent pas trop sous l'eau - parce que ouais, derrière la marionnettiste, il y avait quand même une dame, cette blague - je vis sortir Hayato accroché à un énorme poiscaille comme un dauphin. La saloperie avait ma culotte sur la tronche et semblait pas désireuse de la rendre. À cet instant précis, je pouvais vous dire que l'image était assez lunaire, du genre à se demander si on avait pas pris quelques substances tant tout était surréaliste.

Moi? Je buguais totalement. J'affichais une tête surprise, le regard écarquillé en me demandait ce qu'il se passait jusqu'à.... jusqu'à ce que notre canne à pêche nationale balança une technique futon si violente que le bestiaux se retrouva littéralement coupé en deux au moment où mon camarade lui réclamait de me rendre... mon sous-vêtement. Je me tapais front de ma paume de main. Putain.

On aurait pu croire que j'aurais été soulagée, que tout allait entrer dans l'ordre et qu'on allait bien se marrer comme des gosses... à ceci près que ma culotte avait aussi subi des dommages collatéraux de la brutalité du Nozomo. Elle était en charpie... et avec des écailles de poisson. Je l'aimais bien cette culotte. C'était peut-être un signe pour me dire que les couleurs girly s'étaient pas fait pour moi. Blasée, je m'enfonçais quelques instants sous l'eau, ne laissant dépasser que mes yeux déprimés alors que je faisais des bulles. Je jetais un regard en direction de Hayato qui en disait long alors que Yukio se fendait sans doute la poire. Je lâchais un petit râle avant de me mettre à nager vers le rivage.

Au point où on en était, je supposais qu'on était plus à ça près, mais je n'hésitai pas à sortir de l'eau. Tant pis. Ils pourront dire qu'ils ont vu la lune en plein jour. Je commençais à essorer le t-shirt pour tenter de retirer le plus de flotte possible avant de me diriger vers mes affaires pour enfiler mon pantalon, manière d'être descente. J'avais le dos tourné bien sûr, donc il ne voyait que le côté verso de ma personne, ce qui était déjà bien suffisant. Toujours un peu blasée, je finis par me tourner vers eux.

" Rien..vu. Rien... passé. "

La loose. Consternée, je cherchais mon paquet de cigarettes pour m'en allumer une, avant de m'écrouler assise aux côtés de mon sac. Je finis cependant par voir un petit sourire en secouant la tête. Quelle putain de journée. Ces deux-là me faisaient faire vraiment n'importe quoi.