Endoctrinement progressif

Pic des Géants
Salle sombre et peu éclairée
Milieu de la nuit

Introduction:

La masse difforme se trouvant devant l'homme commença à se tortiller en bruissant doucement. Un souffle court, apeuré, suivi de gémissements pathétiques. Murami Shingo était ficelé à une poutre de la charpente, les pieds dansant une bonne vingtaine de centimètres au-dessus du sol. Avait-il pensé se retrouver ainsi à un quelconque moment de sa vie? Certainement pas. Mauvais comme un pou, ce vieil homme avait usé de tous les vices des hommes et joué de toutes les astuces hideuses que sa famille mal éduquée et vilaine avait pu lui apprendre. Le business de l'orphelinat qui permettait de revendre des enfants? Une version un peu plus élaborée d'une arnaque d'un de ses oncles. Bah tiens. Il s'était toujours tenu à l'écart des shinobis. Leur puissance l'inquiétait. A juste titre.

Depuis sa chaise de l'autre côté de la pièce, Yu se balançait doucement. Combien d'ordures de ce genre pulullaient en ce monde? Il n'osait pas l'imaginer. Avait-il l'impression d'apporter un peu de justice ici-bas en réglant son cas à cet individu? Non pas vraiment. Il savait que ce qu'il faisait n'était qu'une goutte d'eau dans l'océan. Son acte serait dilué avant d'avoir un quelconque impact. Il ne le faisait pas pour cela. Il le faisait pour défendre des valeurs. Comme n'importe quel autre individu. Enlever une vie? Rien de plus facile tant que sa croyance en ses propres valeurs n'était pas ébranlée. Jamais elle ne l'avait été en quarante années d'existence, elle ne le serait pas aujourd'hui. Le serait-elle pour le gosse?

Kuang marchait lentement autour de son tortionnaire de toujours. Pourquoi l'homme assis sur la chaise les avait-il amenés ici? Que leur voulait-il? Il n'avait aucune confiance en lui. Les amadouer avec de la nourriture avait fonctionné sur ses camarades mais pas lui. Il savait que cette personne avait un motif ultérieur. Leur voulait-il du mal également? Il ne le savait pas pour le moment mais comptait bien le découvrir. Pour le moment, son attention était focalisée sur l'homme courtaud devant lui. Il aurait aimé le faire souffrir, il aurait aimé lui faire découvrir chaque nerf de son corps et lui montrer à quel point la douleur pouvait rendre les hommes fous. Il voulait... il voulait... Ce qu'il voulait n'avait pas de mots pour être décrit. Ses yeux se dirigèrent vers la table dans un coin. Un couteau était posé sur celle-ci, comme un appel au crime.

Pendant ces instants, le gros bout de lard saucissonné perlait à grosses gouttes et commençait à couiner comme le porc qu'il était. Il ne méritait pas de mourir ainsi. Pas lui. Il avait tout fait pour s'en sortir. Toute sa vie, il avait tout fait. Il se mit à hurler malgré le baillon quand une surface métallique le frôla. De l'extérieur, on aurait pu penser à des jappements étouffés. Sa terreur était totale. Qu'allait-il bien pouvoir lui arriver? Qu'avait-il fait pour mériter cela? Pitié. Pitié. Il ferait tout ce qu'on lui demanderait. Absolument tout.