Vingt coudées sous les mers, rencontre du troisième type. [Entraînement]

Le rp qui suit fait directement suite à celui-ci



L'académie D'Uzushiokagure était une enceinte militaire. On y apprenait l'art de se fondre dans les ténèbres, de contrôler les sens des ennemis, de lancer les éléments à l'assaut. En somme, c'était un dojo pour tueur professionnel. Pourtant, la violence avait tellement emplie la terre du Sekaï au cours des derniers siècles que rien ne paraissait amorale pour les soldats en herbe.
La plupart ne faisaient que perpétuer les traditions de leurs clans ancestraux tandis que d'autres entraient dans les armées shinobis poussés par des parents avides de prestige et de ryos. Tout cela rendait l'établissement étrangement semblable à une école ordinaire. Les intrigues qui rythmaient les couloirs avaient pour nature l'amour, les amitiés et les trahisons.

Ce matin, Sanada avait un cours avec Kawabata Yasunari.
Le professeur avait proposé un cours facultatif plus approfondi sur l'étude des invocations animales affinitaires et Sanada était bien décidé à maîtriser la murène éthéré maintenant qu'il avait dompté l'anguille. Bien sûr, il avait pu parfaire sa maîtrise de la technique au travers des nombreux entraînements auxquels il se soumettait en prévision de l'examen chuunin.
Le livre de Fukui Kenichi entre les mains, il pénétra donc dans les jardins qui jouxtaient les terrains d'entraînement. Les hommes organisaient toujours une société au sein d'un ensemble, que ce soit un village ou une maison, l'université des arts shinobis ne dérogeait pas à la règle et un véritable microcosme se déployait devant le regard du jeune genin.

À droite de la grande entrée, quelques Fuma étaient assis en bande. Ils brillaient autant par le shuriken géant qui trônait à côté de certains d'entre eux que par leurs bijoux et habits ostensiblement onéreux. Pas méchants, ils ne se mélangeaient pas tellement avec les autres et préféraient la proximité de la sortie, car, selon une des filles qu'il avait entendu parler une fois, “les cours n'étaient pas rémunérés”. Le long de l'allée principale, près du grand bassin à Koï, les éternels rebelles avaient établi leurs quartiers. Ils se grimaient de masques et de maquillage noir, jetant avec une nonchalance peu raccord au style vestimentaire agressif, des pierres dans le bassin, changeant pour une seconde la course des poissons, avant que ceux-ci ne reprennent leur quête permanente de nourriture.

Sanada ne connaissait pas ces groupes, à la fois androgyne et étranger, il n'avait formé aucun lien dans les classes silencieuses du village. Caché au fond de sa capuche et derrière son nuage de fumée odorant, le soldat des Cinq continua son chemin.
Aux portes qui menaient à l'intérieur, une petite place était le théâtre principal des dénouements. C'est ici que les couples se formaient et s'affichaient devant tout le monde, s'embrassant au son d'une clameur tantôt enthousiaste, tantôt moqueuse. Ici aussi que les règlements de comptes s'entamaient, souvent d'abord à coups d'insultes, puis à coups de poings sur le dernier terrain d'entraînement, entouré d'une foule attisant le feu de la colère. Une petite échoppe au centre de la place vendait des boissons froides et chaudes, que les élèves pouvaient déguster entre deux cours pour trois fois rien. La vieille vendeuse était la seule à connaître et reconnaître Sanada au sein de cette place. Les plantes qu'il fumait ayant pour effets secondaires d'assécher son palais, il était un client régulier du petit commerce.

- Et bien bonjour Itomi.

- Quelle chaleur aujourd'hui, tu veux un jus de gingembre bien frais ? Il est resté toute la nuit dans ma boite en terre cuite.

- Avec plaisir ! Dit le genin en détournant le regard pour suivre la démarche d'une Miyamoto particulièrement aguicheuse.

- La chaleur semble avoir du bon pour certain.

- Quoi...?  Non mais pas du tout... C'est une camarade de classe, c'est tout ! Baragouina-t-il en s'empressant d'avaler le liquide tellement froid qu'il lui brûla les dents. C'est pas tout, dit-il encore rouge vif, mais j'ai un cours moi.

- Ouais, un cours derrière la bibliothèque avec la jeune Miyamoto…

- Pas du tout... C'est…

- Allez file ! Lui dit elle avec un sourire.

Sanada pénétra donc dans l'académie, le large couloir abritait l'élite populaire de l'établissement. Toujours accoudé contre les rambardes des escaliers qui menaient aux salles de classe, le groupe vedette des étudiants du village était composé de membres des clans principaux du village. *

Selon la croyance populaire, c'était les plus beaux et les plus forts, chaque élève rêvant de “sortir” avec un membre de ce club qui ne semblait pourtant qu'admettre l'entre-soi.
Les couples les plus célèbres de l'académie se liaient et se déchiraient au sein de cette assemblée, avec les commérages que cela créait dans les couloirs. Très peu intéressé, plus par dépit que par réel dédain pour les intrigues amoureuses de l'école, le soldat des Cinq ne les connaissaient que de vue, il ne rétorqua pas quand la splendide Miyamoto qu'il avait reluquée juste avant lança une phrase glaçante quand il arriva à leur hauteur.

“Toujours en train de nous enfumer avec son bout de bois qui pue celui-là."

Sanada ne voulait pas entrer dans un affrontement, surtout pas contre elle, ici, face à autant de monde. Elle avait déjà gagné. Il continua donc son chemin comme si de rien n'était jusqu'à la petite salle réservée pour l'occasion.

Lorsqu'il entra, seuls trois élèves faisaient face au vieil homme. Le visage luisant du professeur s'illumina et c'est avec une joie ostensible qu'il présenta le genin aux autres.

- Voilà, je vous parlais à l'instant du développement d'une technique à la lumière de la théorie de Fukui Kenichi. Sanada, genin, a maîtrisé une invocation de Godaï Seishitsu Henka en quelques jours. Bien Sûr, il lui faudra encore plusieurs semaines, voir des mois avant de créer une symbiose avec son incarnation, mais pour cela, il faut déjà l'invoquer. Nous avons donc Mademoiselle Omura Hase qui maîtrise le katon. Mademoiselle Maki Hoto, qui est une brillante manipulatrice de Suiton. Et Kan, qui travaille sur son affinité futon. Nous allons donc faire deux groupes de…

Le vieil homme fut interrompu par le bruit grinçant de la porte. Un peu décoiffé, la jeune Miyamoto, star de l'école, se présenta succinctement.



- Je m'appelle Miyamoto Mahina, mon sensei de l'École de l'Air m'a “vivement conseillé” de participer à votre petit cours. Je suis d'affinité raiton.

Le contraste entre les traits si fins de la jeune fille et la grossièreté dont elle faisait preuve la rendait aussi agréable pour le corps qu'insupportable pour l'esprit.
Son ton hautain et son air blasé ne tentaient même pas de camoufler sa désapprobation quant à sa participation à ce petit colloque. Le professeur, cependant, ne fut pas décontenancé une seconde et de sa voix nasillarde lui répondit avec la politesse qui le caractérisait.

- Bienvenue jeune fille. Nous allons donc changer les groupes ; je serais avec Kan, c'est mon élève et c'est donc bien naturel. Hase, Hoto, vous vous connaissez si je ne m'abuse, vous allez donc être ensemble. Sanada s'entraînera avec Mahina.

La jeune épéiste regarda le soldat des Cinq de bas en haut lentement, une lueur de mépris scintillant dans ses yeux ambre.

- Bon, l'objectif est simple, maîtriser une technique assez avancée, ou inventer une technique simple d'invocation animale. Sanada et Kan ont déjà une technique à apprendre, à vous de voir si vous voulez emprunter un rouleau de l'académie ou modeler votre chakra à la force de votre imagination. Nous nous reverrons dans deux jours. Bien Sûr, je vous encourage vivement à l'entraînement avec votre binôme pendant ce temps. Je vous testerai tous dans exactement deux semaines sur l'efficacité de votre technique sur le terrain. Allez jeunes gens, au boulot ! Dit-il en claquant des mains visiblement plus enthousiaste que les élèves qui quittaient la petite salle.

Mahina ne regarda même pas son partenaire désigné dans le couloir, elle le dépassa en lui donnant un coup d’épaule et partit rejoindre ses amis qui l'attendaient, avides de savoir pourquoi elle était dans une salle avec autant de loosers.

Sanada passa la soirée à étudier la technique de la murène d’orage. Pour ce faire, il avait emprunté une dizaine de bouquins à la bibliothèque qui concernait la vie marine. À force de lecture, il en apprenait beaucoup sur l’animal longiligne, gardien des rochers de l’océan.
C’est la tête recouverte par un livre qu’il s’endormit enfoncé dans le hamac, sur le toit qui lui servait de maison.

Le lendemain, sans nouvelle de la Miyamoto, le genin mit son expérience à contribution. Si l'observation directe de l'anguille dans les marécages l'avait aidé, il n'y avait pas de raison pour qu'il n'en soit pas de même pour la murène.
C'est avec une barque dédiée aux élèves de l'académie qu'il traversa le port pour rejoindre le versant le plus rocheux de la côte qui jouxtait le village. Avec la dextérité d'un marin confirmé, Sanada guida sa petite embarcation au travers des sommets, seule partie des montagnes abyssales qui voyait le bleu du ciel. Le bateau amarré, Sanada se sépara de sa cape et de son kimono.
Sans attendre une seconde, il pénétra dans l'immense bassin turquoise.

Il aimait plus que tout la sensation de l'eau sur sa peau, cette liberté de se mouvoir dans les trois dimensions sans le joug de la pesanteur. Depuis tout petit, l'océan faisait partie de lui, il comprenait maintenant la raison de sa fascination pour le royaume aqueux et ses profondeurs. Lui appartenait au ciel, pas au monde sous-marin. Il se sentait comme un étranger qui découvre une terre exotique.

Tout était nouveau, les algues multicolores qui dansaient avec le courant, les bancs de poissons voguant à l'unisson sur des trajectoires qui paraissaient, cependant, très aléatoires. Après plus d'une heure à sonder les eaux depuis la surface autour des récifs, il trouva enfin une murène qui semblait être sorti de sa tanière. Sans une once d'hésitation, le genin prit une grande inspiration avant de plonger. L'animal était à une dizaine de mètres sous la surface, ce qui était encore une profondeur très facile à atteindre pour celui qui avait grandi en pêchant des huîtres perlières.

Ne voulant pas effrayer la bête, il s'approcha doucement, calculant chacun de ses gestes pour qu'ils soient le moins brusque possible. Lorsqu'il arriva à sa hauteur, il s'arrêta, laissant le temps à l'animal de le voir approcher. Le prédateur ressemblait à un monstre. Sa gueule jaune était allongée et dotée d'une rangée de dents à faire pâlir les scalpels de la Sorcière. Son long corps bleuté était tacheté d'une couleur rappelant la tête. Le camouflage aurait pu paraître farfelu si les coraux environnants n'avaient pas exactement les mêmes couleurs. Ainsi la nature était faite.

“ Tout est lié” se répéta-t-il intérieurement.

Le prédateur de plus de deux mètres de long s'arrêta net à la vue de l'intrus. Il le fixa quelques secondes de ses yeux effrayants, puis fit demi-tour à toute allure avant de se glisser dans une fente entre deux énormes rochers. Sanada s'approcha pour analyser la paroi du bloc de pierre. Tailladé de toutes part par le courant et l'érosion permanente, la montagne regorgeait de trous et de cavernes, mais Sanada était bien trop grand pour passer dans ceux-ci. Ne voulant pas brusquer celle qu'il voulait comprendre, il remonta à la surface une dernière fois, cessant ses allers-retours pour analyser la maison de la murène et retourna au village. Sans prendre le temps de déjeuner, il se rendit sur une des plages près du port pour pratiquer sans la gêne que pouvait occasionner les autres élèves de l'académie.

Après avoir relu les mudras, le genin concentra son chakra ranton entre ses paumes avant d'écarter ses bras pour modeler son chakra comme il le faisait pour l'anguille. Le chakra semblait plus dense, le corps qu'il formait était bien plus large que le petit poisson d'eau douce, mais à peine avait-il sculpté la moitié que le corps se dissipait, repartant vers les nuages, tout comme son énergie qui fondait rapidement. Sanada n'avait plus le luxe du découragement, plus il grandissait au sein du village, plus il voyait le chemin qui lui restait à faire pour être digne de la mission que les dieux lui avaient confiée. Il fallait qu'il devienne plus fort, et le chemin qu'il devait suivre pour le moment le guidait vers l'orage et ses pouvoirs.
Il ne connaissait personne ayant la même affinité, il ne pouvait donc pas se comparer ou même jauger de l'efficacité de ses techniques en combat réel, cependant, si les cieux lui avaient confié la clé des nuages, cela relevait du blasphème que de ne pas utiliser pleinement ce pouvoir.

Toute l'après-midi durant, Sanada pratiqua la technique sans relâche.

Centimètre par centimètre, il voyait l'animal prendre de plus en plus forme, mais pour le moment, sa création ne ressemblait qu'à un tube légèrement transparent qui semblait avoir la douceur des nuages.
C'est quand son estomac gargouilla si fort qu'il ne put l'ignorer qu'il se résolut à rentrer.

Le souper fut copieux, les efforts avaient affamé le jeune homme qui n'avait rien mangé depuis la veille. Le jeune rendait l'esprit plus alerte, certes, mais il ne pouvait pas se permettre une dépense d'énergie trop grande. L'examen approchait à grands pas.

Sous le soleil naissant à l'horizon, Sanada se rapprochait de la tanière de la murène. Il avait fait le choix de passer la journée sur la côte, aussi bien pour la découverte de l'animal que pour la pratique de sa technique. Tous ces allers-retours prenaient un temps qu'il n'avait plus vraiment, le lendemain, il devait faire le point avec Yasunari. Les autres avaient sûrement bien plus avancé que lui. Plongeant à l'endroit où il avait vu la murène disparaître, il attendit aussi longtemps qu'il pût devant le trou, tapant quelques fois sur la paroi minéral avant de remonter par manque d'air. Il eut beau faire le pied de grue devant l'entrée de la petite caverne, l'animal ne voulait pas se montrer aujourd'hui et c'est avec une certaine déception qu'il se mit à la pratique après un petit en-cas.

Il invoqua d'abord l'anguille de l'orage qui vola autour de lui quelque temps avant de disparaître dans un flash lumineux, faute de proie. Il recommença l'exercice plusieurs fois, toujours avec le même succès. Il ne comprenait pas pourquoi la transition entre la technique de base et son évolution était aussi difficile. Certes, il s'agissait de deux espèces bien distinctes et donc, de comportements différents, mais le chakra qui éveillait cette créature était le même. Il répéta les mudras sans relâche, et bien que le corps de la murène prenait de plus en plus forme, Sanada n'eut rien de très probant à montrer à son professeur le jour suivant.

Encore épuisé de ses entraînements et de sa courte nuit, il regarda d'abord la jeune Omura invoquer une sorte de petit oiseau rouge vif.
Celui-ci avait du mal à voler tant ses ailes étaient petites. Les flammes semblaient couler le long de son plumage apportant une chaleur réconfortante.

- Pour le moment, je n'arrive pas à faire grand chose avec. Il peut un peu réchauffer les mains si on l'attrape. Dit-elle en joignant le geste à la parole.

L'oisillon sembla se poser un instant au creux des paumes de la jeune médecin, puis, après un petit cri de lassitude, il s'effondra sur lui-même, laissant un tas de cendre disparaître au gré de la brise.

- C'est un très bon début Hase ! Dit Yasunari d'un air enthousiaste. Pouvoir créer une émanation tangible de chakra d'une forme animale n'est jamais facile, encore plus quand cela est une création complète. Je te félicite !

Hoto, sa partenaire, fit la démonstration d'une technique qui ne parut pas très impressionnante. Plaçant ses mains sur le cours d'eau à côté du petit terrain réquisitionné pour l'occasion, des petits poisons de la taille d'une sardine semblèrent jaillirent de ses mains. Les poissons se formèrent en banc, sculptant de leurs courses une sphère presque parfaite, puis, dans un éclaboussement qui trempa tous les élèves, ils disparurent. Le teint rouge et la mine honteuse, elle s'inclina longuement devant ses camarades pour s'excuser.

- Je veux utiliser ce banc pour détecter le chakra. Je suis senseur, et donc, je pense qu'une technique passive à même de “dénicher” les différentes sources de chakra serait très utile. Le problème, c'est que pour le moment, je n'arrive pas à le faire, sans compter qu'ils n'arrivent pas à survivre une seconde en-dehors de l'eau.

- Tu y arriveras ! C'est parfait tout cela, vraiment excellent. Dit le vieil homme de plus en plus heureux du travail accompli. Malheureusement, Kan est en mission et ne pourra pas finir les leçons avec nous. Il nous reste donc mademoiselle et Sanada, mais bien sûr, galant comme il est, il va laisser sa partenaire faire sa démonstration avant lui.

La belle jeune fille s'avança, toisant la petite assemblée avec l'air hautain qui ne semblait jamais quitté son visage fin. Avec une précaution qui tenait de l'étrange, elle déposa l'énorme sabre qu'elle portait toujours avec elle sur le sol, en sortit la longue lame qui étincelait sous les reflets du soleil et se posa devant le vieil homme.

- Je compte apprendre la panthère noire, mais pour le moment mon chien de foudre n'est pas très obéissant.

L'allure toujours fière, la Miyamoto leva son arme d'une main avant d'effectuer les mudras de l'autre. Sanada ne connaissait qu'une personne capable de composer ses signes invocatoires avec la moitié des doigts manquant, il s'agissait de Rokuro, celle qui lui avait appris toutes les bases à son arrivée. L'usage du katana étant très répandu dans le clan gardien de l'honneur, il était logique qu'ils aient trouvé un moyen de parer à cette difficulté. Malgré toute l'antipathie que lui inspirait cette jeune nantie insolente, il ne pouvait s'empêcher de l'admirer un petit peu. Elle était belle, sans doute brillante, et dotée d'une confiance à toutes épreuves.
Absorbé dans ses pensées, Sanada n'eut pas le temps d'esquiver le chien de foudre qui s'était rué sur la première chose qu'il avait vu, lui.

Il sentit une douleur lancinante lui transpercer le bras, tandis que les crocs du canidé électrique se plantaient dans sa chair. Passé la douleur fugace de la surprise, il se rendit compte avec horreur que l'électricité paralysait les nerfs de son membre. Malgré toute la volonté du monde, il n'arrivait pas à le bouger.

- Je vous avais dit que je n'arrive pas à le contrôler. Dit Mahina sans cacher un sourire de satisfaction en regardant le soldat des Cinq se masser le bras.
Je vais continuer à apprendre le chien de foudre avec vos conseils, mais pour la panthère, je vais me débrouiller toute seule. M'entraîner avec les étrangers au clan me fait souvent perdre mon temps, surtout quand il s'agit de non-clanique. On ne peut pas rattraper des décennies de traditions martiales en quelques années. Vous devriez arrêter d'être un poids pour notre village. Dit-elle en pointant du doigt Hoto et Sanada.

La jeune fille senseur se mit à pleurer à chaudes larmes avant de partir en courant, suivie par son amie Omura qui n'avait pas omis de jeter un regard noir à la peste.Sanada bouillonnait, cette fille n'avait aucun respect, il fallait qu'elle reçoive une leçon, qu'elle paie pour ses actions.

- Voyons donc si c'est une perte de temps. Dit-il en s'avançant vers elle. Professeur Kawabata, auriez-vous l'obligeance d'arbitrer ce combat ? La première goutte de sang qui tombe à terre désignera le perdant.

Prenant une posture plus droite et autoritaire, le vieil homme se plaça entre les deux uzujins prêts à en découdre.

Après quelques secondes où ils s'inclinèrent tous, le vieil homme leva la main.

“ Hajime” s'écria-t-il alors que déjà, les deux ninjas s'apprêtaient à composer des mudras.

Sanada resta sur place, composant les mudras qu'il connaissait si bien, il invoqua un nuage de pluie qu'il transforma en orage grondant au-dessus de l'arène. Avant même de pouvoir prendre le contrôle des cieux, le soldat des Cinq devait d'abord y jeter une partie de son âme.
Son art nécessitait un cadre, et, chaque fois qu'il usait de son pouvoir ranton, le genin devait d'abord se présenter au ciel pour qu'il accepte de se soumettre à son autorité temporaire. Mahina aussi était restée en retrait.
Contrairement au jeune homme, elle ne s'agitait pas, mais semblait au contraire méditer. Surpris de pouvoir mettre en place son royaume, le jeune homme ne laissa pas passer sa chance. Au son du clocher éthéré qui grondait la colère du genin, il s'élança au combat. La Miyamoto ne bougeait toujours pas.
Lentement, une aura d'une couleur bleutée semblait émaner de son corps pour l'entourer. Sanada était encore loin, il avait pris une grande distance avec son adversaire pour pouvoir invoquer l'orage. Tout en courant de toutes ses forces, il composa rapidement des mudras avant de sculpter des senbons de chakra raiton, aidé par le tonnerre qui lui donnait de la force. La salve éclaira un instant le ciel gris, fonçant sans entrave vers leur cible.
Mahina ouvrit les yeux pour la première fois depuis le début du combat et plaça son arme devant elle comme une barrière. Il en jaillit une onde qui désintégra les senbons et frappa le genin en plein torse. La sensation n'était pas particulièrement douloureuse, mais il sentit clairement son chakra être drainé hors de son corps.

Le choc le stoppa net.

Si Rokuro l'avait entraîné des dizaines de fois, jamais elle n'avait utilisé cette technique pour le contrer. La vieille shinobi tenait sans doute aux arcanes secrètes de son clan.

La jeune Miyamoto profita de la surprise provoquée par l'onde spirituelle pour s'élancer vers ce gamin paumé de l'académie, la force de son ancêtre la portant à une vitesse qu'elle n'aurait jamais pu atteindre seule. Ils engagèrent un combat au corps-à-corps qui tourna sans surprise à l'avantage de l'épéiste. Ce n'est qu'avec la technique paratonnerre que Sanada parvint à mettre un peu de distance entre lui et son adversaire. Il profita de la courte accalmie pour invoquer un clone d'orage, qu'il savait particulièrement efficace contre les utilisateurs d'armes en tout genre.

Le clone fut rapidement coupé en deux, ce qui ne fit que dévoiler sa nature vaporeuse. Encore galvanisé par son allié l'orage, Sanada bombarda littéralement la jeune fille de senbons de foudre et autres éclairs, son clone restant proche de la cible pour la distraire tandis que l'original restait en retrait. Mahina avait beau découpé le nuage humanoïde, elle ne ressentait qu'une douleur vive alors que sa lame traversait le corps blanc, la fatiguant encore plus. À cela, vint s'ajouter une anguille de l'orage qui s'enroula autour de la taille de jeune fille, la rendant plus vulnérable encore.
Alors que la victoire se dessinait dans l'imagination de Sanada, la shinobi composa des mudras qui n'étaient pas du raiton et souffla sur le clone.
La bourrasque fut si puissante qu'elle déstabilisa le soldat des Cinq tout en détruisant la réplique orageuse.

- Ça suffit ! Cria le mec en se mettant entre les élèves pour arrêter le combat. Je vous ferais remarquer que vous saignez tous les deux depuis un moment.

- Je ne saigne pas. Rétorqua Mahina d’un air glacial, la main encore tremblante sous l’adrénaline du combat à peine achevé.

- La foudre provoque des brûlures, et vous êtes plus en état de combattre.

- Je suis parfaitement en état de combattre ! Rétorqua la jeune fille en élevant la voix.

À ce moment, un groupe de gardes du village qui passait non loin fut interloqué par le bruit et s’approcha. Plusieurs Miyamoto faisaient en armure s’approchèrent de la jeune fille pour lui murmurer quelque chose à l’oreille. Celle-ci parut honteuse et s’inclina longuement face au vieux professeur.

- Je m’excuse de vous avoir parlé ainsi professeur. Sanada, nous nous verrons demain ici même pour l’entraînement, je vais rentrer avec eux.

Et sans un autre mot, la jeune fille repartit accompagnée par les membres de son clan.

Sanada salua son professeur, tout aussi gêné que lui par la scène qui venait de se dérouler.

- Ne t'en fais pas. Lui dit Yasunari. La famille Miyamoto accorde une grande importance à l'étiquette et la politesse. Surtout à l'encontre des supérieurs hiérarchiques. Mais je suis certain qu'elle n'aura qu'une remontrance. Allez, va te reposer, tu l'as bien mérité. Et n'oublie pas de travailler la compréhension de l'animal si tu veux l'invoquer correctement.

Le genin n'avait pas envie de se reposer, il emprunta donc une petite barque de l'académie et plongea le long de la paroi sous-marine, pour tenter de revoir la murène qu'il avait aperçue la première fois. Arrivé à la fissure où il avait vu l'animal de glisser, il colla son œil dans le trou. Un autre iris était braqué sur lui. De stupeur, Sanada avala la tasse et il dut se contraindre à remonter vers la surface, toussant de longues secondes pour expulser l'eau salée. Une fois son souffle stabilisé, il repartit vers la faille. L'œil était toujours là.

Cette fois-ci, le genin garda son calme, observant avec difficulté les détails magnifiques qui ornaient la pupille noire de jais. Après plusieurs remontées, il décida de s'éloigner un peu pour indiquer à la murène qu'elle pouvait sortir. L'attente fut longue et c'est sous les couleurs orangés du coucher de soleil qu'enfin, le long corps gracieux de l'animal glissa entre les parois rocheuses pour se dévoiler.

La murène s'approcha lentement, ondulant avec une régularité qui, instinctivement pour Sanada, était un message de paix. Tendant la main délicatement, Sanada ressentit le corps de l'être aquatique glisser dans sa paume. Elle semblait visqueuse, pourtant, rien ne restait sur les mains. Pendant de longues heures qui lui parut être des minutes, Sanada joua avec l'animal, en parfaite harmonie. Lorsqu'il remonta pour la dernière fois, la sensation du toucher encore empli des expériences nouvelles qu'il avait vécues résistait. Il réitéra donc ses essais, avec beaucoup plus de succès.
La lune était déjà haute quand enfin, une véritable murène d'orage émergea de ses mains.

La créature, étrangement semblable à sa nouvelle amie, tournoya quelques secondes dans les airs avant de se retourner vers son créateur. Les yeux bleus électrique de l'animal fixèrent une seconde le genin, puis sans aucun signe avant-coureur, elle l'attaqua. La morsure ne servit que de point d'appui pour enserrer le jeune homme de son corps. La sensation était non seulement douloureuse, mais extrêmement contraignante, et Sanada, qui ne brillait pas par sa force brute, ne pouvait absolument pas faire bouger le corps de la bête. Il eut beau lancer un éclair qui le toucha au passage, rien n'y faisait, la bestiole restait accrochée dans une étreinte douloureuse.

Au bout d'un très long moment, enfin, elle sembla mourir d'elle-même, laissant le genin épuisé, allongé de tout son long sur la roche régulièrement balayé par les vagues.

Le lendemain, il attendait Mahina en fumant son calumet assis contre un arbre. Celle-ci, redevenu beaucoup plus froides que lors de ses au revoir de la veille, le salua à peine avant de se mettre en place.

- Tu utilises aussi du raiton, c'est ton affinité ? Tu peux me montrer comment tu provoques des nuages comme ça.

- C'est du ranton, un godai, mon affinité est double. Suiton et raiton. Ce qui me permet d'invoquer des nuages ou des clones sans substances; comme ce que tu as vu hier.

- Je comprends mieux, c'est vrai que je ne connaissais pas, c'est pour cela d'ailleurs que tu as réussi à me toucher, ne t'y trompe pas, tu es un bien piètre artiste martiale.
- Je n'ai rien dit. Répondu Sanada entre deux lattes de calumet. La plante qui lui servait à embrasser l'air l'apaisait souvent quand il faisait face à un saut d'humeur. Il n'était pas du type sanguin. Il préférait réfléchir à une vengeance bien menée plutôt que de se jeter dans le tas. Tout le contraire de la jeune Miyamoto.

Ils s'entraînèrent toute la journée. L'un conseillant l'autre sur l'exécution de leurs techniques. Tous les deux savaient invoquer l'animal à présent. Aucun ne l'avait encore dompté. Si Sanada se faisait irrémédiablement attaqué par la murène, Mahina, elle, se faisait littéralement traîner par le chien de foudre avant que celui-ci ne se dissipe, ou, plus grave, s'en prenne à un élève sur un terrain adjacent.

Le soleil allait disparaître, ils n'avaient pas mangé, et pourtant, ils continuaient inlassablement leur pratique. Chacun voyait l'autre avancer et aucun ne voulait voir son partenaire le dépasser.
Sanada invoquait maintenant une murène majestueuse. Elle n'attaquait plus si vite, grâce au dosage de chakra qui s'affinait. Il avait même le temps de l'observer avant qu'elle ne se jette sur un papillon et disparaisse. L'animal semblait être composé de véritable cumulus si denses qu'ils semblaient palpables. Le tonnerre au travers de sa peau mouvante formait les figures complexes que la nature gravait sur l'animal marin. Ainsi, des tâches phosphorescentes au parcours hypnotique dansaient sur la murène, accentuant la magnificence de la créature malgré sa tête objectivement repoussante.

La pensée qu'il puisse créer, un instant, une incarnation de la nature le rendait plus heureux qu'il ne l'avait jamais été. Pour la première fois, il percevait ce qu'était réellement le fruit de l'effort et la sensation de jouissance qui en découlait. Sentir sa maîtrise du flux divin s'affiner, être plus rapide, plus endurant, plus stratège, était une satisfaction proche de l'extase religieuse. La puissance qu'il prenait n'était pas un vol, c'était un don de la Nature à mesure qu'il se rapprochait d'elle.

Quand les derniers élèves quittèrent les terrains d'entraînement, Sanada invita Mahina à dîner au port. Celle-ci refusa plus poliment qu'il ne l'aurait cru, puis, sans un regard, repartit vers le quartier de son clan.

Ce n'est que trois jours plus tard que Sanada fut convoqué à l'académie pour une réunion de groupes concernant les progrès de chacun.
Il avait passé son temps à s'entraîner sans relâche tout en nageant avec sa nouvelle amie, résidente des fonds marins, ce qui accentuait sa compréhension de l'espèce, et l'aidait à former sa murène à l'image de la résidente de la paroi.

Comme à l'accoutumé, les bandes distinctives traînaient sur leurs territoires, toisant les “intrus” qui ne faisaient que les traverser avec mépris et défiance. Bien sûr, la plupart étaient des enfants ou de jeunes adolescents, ce qui rendait cette guerre de territoire plus folklorique que problématique pour les professeurs. Rare étaient les élèves qui étaient véritablement capable de tuer un homme. Si Otohime avait fréquenté les salles de cours plus souvent, elle aurait pu faire partie de cette liste restreinte, mais la magnifique Uzumaki préférait le souffle d'une explosion à la quiétude d'une bibliothèque. Pourtant, ce matin-là, pour une raison que Sanada ignorait, elle était là.

Les formes plus que généreuses de la jeune shinobi étaient devenues une légende au sein des clubs d'ados boutonneux de l'académie. Sa rareté dans l'enceinte de l'école accentuait encore plus cette idolâtrie. Chaque garçon présent ne put s'empêcher de la regarder, tout en tentant de le faire discrètement. La réputation d'Otohime dépassait la déesse aux formes parfaites, ils savaient tous qu'ils risquaient littéralement leurs vies s'ils s'approchaient trop près. Sanada lui-même en avait été témoin lors de la mission qu'il avait remplie avec elle et le reste de l'équipe Tsubaki. Pourtant, il avait peu à peu appris à connaître la jeune fille, à apprécier sa franchise presque naïve, son entrain communicatif et son courage qui penchait, parfois, vers l'inconscience.

Il vint à sa rencontre pour la saluer et lui parler du prochain examen qui allait déterminer s'il montait en grade. La discussion fut amicale et assez brève, les deux ayant une vie plutôt chargée. Sanada repartit donc directement vers l'intérieur de l'enceinte, sans faire attention aux garçons qui le regardaient avec des yeux ronds.

- Tu connais Uzumaki Otohime ? Dit l'un des leaders de la bande de Mahina, et, accessoirement, le caïd de l'école.

- Laisse-le tranquille. Dit Mahina d'un air assez froid.

- Oh, voilà que maintenant, c'est ton pote ? Un non-clanique qui ressemble à une fille et qui fume sans arrêt un truc puant ?

- Ce n'est pas mon ami, il ne t'a rien fait, c'est tout.

- Et alors, il existe, et il parle à Otohime. Se retournant vers Sanada, il continua. Tu vas m'arranger un rendez-vous avec la plus pulpeuse des poupées, sinon, je te brise les os. Tu as compris ?

Pour toute réponse, Sanada éclata de rire et continua son chemin. Pendant que ce minable passait son temps à poursuivre les petits ou faire la loi dans le hall de l'académie, il engrangeait du savoir, pratiquait son taijutsu, travaillait sa vitesse. Il avait un objectif, et il devait à tout prix montrer à la Sorcière qu'il était un digne combattant, il n'avait jamais appartenu à ce monde, mais jamais il n'en avait été aussi éloigné.

Rapidement, il fut rejoint par Mahina, qui, elle aussi, devait montrer son évolution à Yasunari.

- Je suis désolé, ils sont vraiment pas très malins mes potes.

- Tu étais la pire avant que l'on se parle, je te rappelle. Dit calmement Sanada en la regardant dans les yeux.

La jeune fille sembla profondément touchée, mais garda les épaules droites et le menton haut. Sans un mot, elle dépassa le soldat des Cinq et pénétra dans la petite salle de classe.

Le cours théorique fut assez court, et très vite, le petit groupe prit le chemin des terrains jouxtant l'académie pour pratiquer la technique qu'ils avaient tous perfectionnée. Le petit terrain habituel était aujourd'hui composé d'une dizaine de mannequins de bois tous disposés anarchiquement.

- Nous allons donc tester le champ d'action de vos techniques et leurs effets sur ces mannequins, chacun passera plusieurs fois, afin de tester les différentes possibilités applicables sur le terrain.

C'est la Miyamoto qui s'avança la première.

Le chien de Mahina ressemblait maintenant à un doberman élancé, noble, et menaçant. Un peu à son image. Le molosse sauta sur le premier mannequin à porter, lui mordant le bras au niveau du coude qui noircissait sous les assauts des crocs électriques. Le professeur fut enchanté par le spécimen de foudre et félicita l'intéressée qui eut un sourire sincère en entendant les louanges du vieil homme.

L'Omura, elle, créa cette fois-ci un oiseau de belle taille, ses plumes dans les teintes de rouge-orangé s'illuminaient littéralement sous les caresses du soleil. L'oiseau vola vers une cible que la lanceuse semblait avoir désignée et s'écrasa dessus, en explosant en un nuage de cendre qui masqua l'arène pendant plusieurs secondes.

- Quelle évolution mademoiselle Hase. L'impact ne semble pas très puissant, mais le nuage peut être très utile pour le camouflage ou la diversion.

- Et il est grandement inflammable. Dit elle en sautant de joie.

Sanada regarda Hoto lancer une marre d'eau avant d'y jeter un poisson sans vraiment observer. Les mudras tournaient dans sa tête avec une régularité de métronome. Il fallait absolument réussir.

S'avançant enfin, il eut moins de mal qu'il aurait pensé à modeler la murène, qui ressemblait maintenant parfaitement à celle qui l'avait inspiré et aidé. Elle ondula vers une cible si vite qu'elle laissait une traînée de matière parcourue d'éclairs derrière elle. Puis, elle s'enroula autour de la cible, attachant solidement son corps à ce que semblait être son nouveau territoire. Sanada laissa la murène un certain temps, puis, demanda à son professeur de la détruire.

Le vieil homme lança une salve de kunais chargés de chakra qui transpercèrent la murène. Celle-ci disparut dans une gerbe d'éclairs en produisant un flash lumineux qui aveugla un instant l'assemblée. Fier de sa réussite, mais se sentant coupable pour son attitude envers Mahina, il ne fut pas très démonstratif devant les compliments de Yasunari.

Les élèves pratiquèrent plusieurs heures avant que le professeur les convoquent autour de lui.

- Ce cours marque donc la fin de notre collaboration sur la théorie de Fukui Kenichi. J'espère que cela a été aussi enrichissant pour vous que pour moi. Sachez que ma porte sera toujours ouverte si jamais vous avez besoin de moi ou d'un livre sur le ninjutsu.

Après un dernier salut, le professeur qui avait gagné le respect de ses élèves s'éloigna sans jamais se retourner. Sanada voyait la fin de ce cours comme la fin d'un cycle.

Il devenait un véritable combattant et plus il s'entraînait, plus l'étude de l'art du combat le procurait une sensation de jouissance, tant intellectuel que physique.
Il y avait bien plus à apprendre des coups et de ses théories que dans les romans qu'il lisait auparavant.

Il prit la décision de passer le lendemain à la librairie de son ami Sugihara pour y emprunter des essais concernant le ninjutsu.

Il voulait créer sa première technique ranton.

Le regard plongé dans ses pensées enfumées, Sanada ne remarqua pas qu'il était seul avec Mahina. La jeune fille se racla la gorge pour signifier sa présence, révélant par là même le genin.

- Je suis désolé de t'avoir mal parlé, la première fois. Je t'ai vu me reluquer près de la buvette et ça m'avait énervé, et puis, j'aime bien être impolie et méchante ici. Dans mon clan, la rigueur est de mise, je ne peux qu'acquiescer. Tout le temps.

- Je m'excuse aussi pour tout à l'heure, je n'aurais pas dû être méprisant alors que tu venais de prendre ma défense. Je comprends, le poids de la famille est lourd chez les civils, alors, dans les clans ninjas, j'imagine même pas.

- J'en ai marre de devoir être obéissante et fidèle. On ne peut rien faire dans ce clan qui ne soit pas contrôlé pour être acceptable par “l'étiquette”. Depuis que je suis petite, je n'ai droit qu'à l'excellence. Être moyen est une faute chez nous. Douter de la parole d'un supérieur est une faute. Ne pas obéir aveuglément est une faute. Il n'y a qu'une voie. La soumission jeune, la domination plus tard.

- Tu sais, je comprends bien ce que tu veux dire. Plus on me force à faire quelque chose, moins j'ai envie de le faire. J'ai la chance de ne pas connaître un cadre aussi strict, même si, crois-moi, ma mère est parfois étrange et attachée à toutes sortes de traditions. Mais au village, je ne me sens pas comme devant être fidèle au kage ou aux autorités. Je ne suis pas un soldat pour servir “le village”. Ma fidélité, elle va à Kaede, la meilleure cuisinière du port et ses calamars grillés au charbon. Elle va à Haruka et nos escapades, à Hatsumomo et nos entraînements, à Shun et son orphelinat. Je ne me soucie pas de la “hiérarchie” et de leur plan politique. Les hommes chercheront toujours à dominer les autres. Tout ce que je peux faire, c'est tenter de ne pas laisser mes proches tombés sous le joug d'une domination trop forte, et c'est pour cela que je combats pour le village, non pas pour son entité, mais pour ce qu'il contient.

- Donc, tu crois que je devrais ignorer tout cela ?

- Non, je pense que tu devrais en faire une force. Tu as conscience des limites de certaines choses, alors surprend-les ! Développe tes propres techniques en accord avec ce que tu chéris dans ce clan. Regarde ce que tu aimes concrètement. Oubli l'honneur, la patrie et tous ces mots vides de sens. Les gens qui se battent pour un concept vague, qui ne sert qu'à servir un seul homme en général, sont ceux qui fuient les premiers le champ de bataille. Des parents qui défendent leurs enfants resteront même s'ils doivent faire face aux £egoks en personne. Ce n'est pas défier sa famille que de chercher un sens à ses actions et son existence, tu sais, c'est l'honorer.

- Tu es un drôle de bouseux Sanada, tu sais ça ? Dit Mahina en se levant.

Elle s'inclina avec un large sourire et dans un silence qui convenait aux deux parties, elle quitta le terrain d'entraînement et la vie quotidienne de Sanada.

L'examen était proche. Mais le genin prenait une matinée de repos.

Il se prélassait dans l'eau quand il sentit quelque chose lui frôler les pieds.
Il agita frénétiquement ses cuisses tout en composant les mudras de la marche sur l'eau. Enfin assis, il récupéra de sa frayeur et sonda le fond en collant son visage à la surface.

La murène était là, belle et majestueuse dans son royaume.

Sanada pensa à la murène de l'orage et son océan à elle, infini comme celui-ci. Il invoqua l'animal de nuages et de foudre et laissa les deux sœurs danser de concert.

Chacune dans leur élément.

Puis, l'animal marin attrapa doucement le pied du jeune homme pour le tirer vers les profondeurs. Le fils du ciel était invité par un être de la mer pour visiter ce monde.
En étranger pénétrant avec un guide dans une jungle exotique, Sanada suivit la murène au travers des couleurs vives qui composaient la ville sous-marine peuplée de centaines d'espèces différentes, peut-être eux aussi avaient des clans et une hiérarchie figée.

Tout en contemplant les merveilles des profondeurs, il se demanda si la guerre qui se profilait à la surface allait atteindre ce monde silencieux et paisible.

Pour que cela ne soit pas le cas, il se devait de devenir encore bien plus fort.