Temple Perdu [ft. Junko]

Les étendues mortifères du Désert du Vent avaient toujours eu quelque chose de familier pour Serika Shiran. Dès son jeune âge, le shinobi de Suna avait dû apprendre à se repérer au sein des dunes changeantes, au mépris des capricieuses volontés des sables instables et des vents arides. Même parmi ses compatriotes, il avait l'avantage de posséder l’art ancestral de sa famille - il était difficile d’être effrayé par le désert, pour quelqu’un capable d’utiliser le sable comme arme. C’était son territoire, son fief, sa citadelle dénuée de mur. Ce jour-là ne faisait pas exception - le soleil de plomb s’abattait impitoyablement sur les étendues sablonneuses, la sécheresse guettait toute créature assez faible pour lui succomber et, inlassablement, une silhouette vêtue d’une longue cape blanche se frayait un chemin parmi les dunes ondulées. Le jeune homme à la peau sombre marqua un arrêt une fois parvenu au sommet de l’une d’elles, profitant de la hauteur de son point d’observation pour dérouler la carte vieillie qui reposait au creux de son poing serré.

Il avait trouvé le parchemin bruni quelques jours plus tôt, lors d’une mission pour retrouver la cargaison volée d’une caravane de marchands. Son ordre n’était que de restituer les vivres des commerçants - d’autant qu’ils traversaient le désert pour faire des affaires avec Suna - après tout, il n’avait pas lieu de brider la curiosité qu’il avait ressentie en apercevant un rouleau scellé au milieu des tonneaux de victuailles. La carte était assurément vieille - plus ancienne que lui, sans doute plus que son père également - et il lui avait fallu passer quelques heures dans la bibliothèque de Suna pour en localiser la destination. Il s’était lui-même surpris à faire autant de zèle pour une carte trouvée au hasard, d’ailleurs - le village était tellement obnubilé par l’idée d’avoir des réponses idéologiques et absolues à toutes les questions qu’il avait oublié à quel point les mystères, énigmes et autres puzzles le galvanisaient. Son travail avait fini par payer ; s’il en croyait les plus vieux atlas du désert qu’il avait pu dégoter, la carte était un plan d’une section au nord-est du désert, à quelques lieues seulement de la frontière avec Nunakita. Il y a bien longtemps de cela, un temple se dressait là - un sanctuaire originellement affilié au gargantuesque temple du vent, qui avait fait sécession de l’ordre monastique principal suite à un conflit oublié, englouti par une tempête de sable particulièrement violente près d’une décennie plus tard. Le jeu d’enquête aurait pu s’arrêter là, mais quelque chose ne collait pas.

Après une soirée particulièrement frustrante entourée de vieux parchemins, de tablettes de pierres et de cartes obsolètes, Shiran avait émis un rugissement victorieux - qui lui attira l’ire de la bibliothécaire - quand il mit enfin le doigt sur ce qui le dérangeait. Certains points de repères indiqués sur la carte - un oasis habité et une crevasse née d’un glissement de terrains - étaient ultérieurs à la disparition du temple présent sur le vieil atlas. Pourquoi donc une carte indiquerait-elle la route vers un sanctuaire disparu ? “Pas disparu”, avait-il inscrit sur le dos du parchemin avec beaucoup de triomphe et un peu d’encre, “caché”.
Aussi, quelques jours plus tard, il mit à profit une période de repos entre deux missions pour satisfaire sa curiosité et partir à l’exploration du désert, ses pas le guidant au sommet d’une dune plus élevée que les autres. Après avoir confirmé sa position sur le plan, il reprit son chemin, s’avançant dans le creux entre deux de ces hauteurs sablonneuses.

« Et maintenant, si j’ai mené mes recherches convenablement… » Son cœur battait à tout rompre, emporté par l’excitation de la découverte. Il se tenait face à une dune particulièrement escarpée, au point que la surface de sable qui lui faisait face était presque verticale - un spectacle rare, mais pas suffisamment pour attirer la suspicion d’un voyageur en temps normal. Il avança sa main droite, plaçant sa paume contre le sable, puis ferma les yeux, visualisant intérieurement la circulation du chakra dans son corps pour mieux se concentrer sur la tâche qui l’attendait. Lorsqu’il rouvrit les paupières, ses iris dorés étaient empreints de détermination. « Révèle-toi. »

C’était avec douceur que son pouvoir s’étendit à la dune, écartant le sable qui lui faisait face comme deux rideaux s’effritant un peu plus à chaque seconde. Ses efforts ne tardèrent pas à payer ; cachée au milieu de nulle part, dissimulée de tous, une modeste arche de pierre lui faisait face, abritant dans les ténèbres un temple oublié. Qu’est-ce que les moines avaient-il bien pu y étudier, y vénérer, pour que cela mérite un tel ensevelissement loin des yeux du monde ? Shiran était certain d’une chose - il lui tardait de le découvrir.

Hanté par cet enthousiasme qui lui était si inhabituel, il s’avança à travers le couloir de pierre sans même penser à surveiller ses arrières.