Je n’en pouvais plus. Sortir, m’évader, respirer. Les murs de ma maison suintaient le souvenir, les gazouillements et balbutiements de Seishiro étaient la pire des tortures et je ne pouvais y échapper. Tous les jours, toutes les nuits, seule, accompagnée … J’étais déconnectée, plongée dans cet univers qui était mien, loin de la réalité. Dès que j’ouvrais les yeux, je me noyais, mais le temps de la douce apathie était passée. Ao me l’avait bel et bien fait comprendre. Je ne pouvais me permettre de couler ne serait-ce même qu’un peu plus.
Devant l’escalade rapide des choses, mon partenaire, intendant et ami avait fait certain de ne me laisser que peu de temps pour m’apitoyer davantage. J’étais une machine qui ne fonctionnait que si elle s’étouffait. Peu importe ce que je pouvais ressentir : l’écraser, le broyer, voilà comment je survivais. Rien n’importait plus que la mission. Je vivais en dissociation totale avec moi-même.
Et j’enchaînais les missions, comme avant lui. Comme avant d’être humaine à nouveau.
C’était un rythme de vie peu adaptée à une mère, mais de poser les yeux sur Seishiro me rappelait toujours ce qui m’avait été arraché, bien malgré moi. Mieux valait mettre de la distance entre nous, du moins, pour l’instant. C’était trop frais, encore béant et rien ne semblait m’apaiser plus que de centrer mon énergie à détruire quelqu’un d’autre. Ça changeait le mal de place, comme on disait si souvent.
Alors, je m’embourbais encore plus profondément dans la mer de sang que je laissais derrière moi. Mes mains teintées de cramoisie n’osaient même plus toucher mon enfant de peur de le salir dès son jeune âge, de le teindre des mêmes tons que moi, que ma mère et probablement la sienne avant elle.
Ao le savait. Il savait tout. Il m’offrait donc la possibilité de ne jamais rester bien longtemps, d’avoir de bonnes excuses pour mon absence, pour mon détachement de plus en plus apparent.
Et cette fois-ci, ce n’était pas différent. Une rencontre qui aurait normalement dû être sienne, de la politique indirecte, certes, il avait choisi de m’envoyer. Je devais rencontre une émissaire d’Uzushiogakure, assurer nos intentions et garder la neutralité entre nos deux factions. Simple visite de courtoisie, rien d’extravagant, je ne devais pas chercher une alliance non plus, ce n’était que pour réaffirmer le statut quo entre nous. Après tout, il était facile de se sentir acculer par notre soudaine montée en renommée et en puissance. Il était apparent à tout le Sekaï que nous étions en train, petit à petit, de prendre contrôle de la Côte Verdoyante des Sources Chaudes. Il fallait s’assurer qu’on n’allait pas s’attirer les foudres de nos voisins.
La rencontre avait été prévue dans un lieu public : un restaurant élégant – nous étions Yamanaka, pas de sauvages – et donc, j’avais revêtu mes plus beaux atours, en signe de respect, mais également du prestige de mon clan. J’étais arrivée avec une bonne avance sur l’heure planifiée, sans escorte. J’attendais donc l’Uzujin, calmement, pratiquement immobile, mais aussitôt qu’elle arriva, je me levai et m’inclinai poliment en sa direction.
«Je me nomme Yamanaka Sayuri, enchantée de vous rencontrer. »
Enfin quelque chose pour occuper mes pensées, l’éloigner lui et ses cheveux neige, lui et mon humanité.
@Myoshin Junko @Yamanaka Sayuri ne jamais s'arrêter
Promenant son regard sur les houppiers des arbres, au travers desquels filtrait une chaude lumière, la dame se ne put s’empêcher de repenser aux événements qui s’étaient déroulés dans cette même région, quelques mois auparavant. Tout semblait si paisible ici, sur la Côte Verdoyante des Sources Chaudes, alors que quelques kilomètres plus loin à l’Ouest, après le pays du Feu, une partie de la forêt avait été ravagée. Elle eut un regard vers l’arrière, comme si elle visualisait encore la scène. Ce Dieu déchaînait-il toujours sa colère dans la forêt ancestrale d’Inari ?
La caresse du vent la fit frissonner et, décrochant son regard de cette illusion terrifiante, elle se remit en mouvement. Elle atteindrait bientôt le point de rendez-vous, et elle se savait attendue. Elle pressa alors le pas.
L’examen jûnin s’achevait à peine lorsqu’elle avait reçu un nouvel ordre du Senkage. Avant de revenir au pays des Tourbillons, il lui faudrait se rendre sur la Côte, où elle représenterait Uzushio auprès du clan Yamanaka. Ce n’était qu’un petit détour, et l’entretien une formalité, avait-il dit. Mais il ne pouvait pas s’y rendre lui-même, et la nouvelle Perle d’Uzushio avait fort à faire. La dame avait accepté, sans avoir véritablement le choix, ni véritablement l’envie. Tout ceci ne lui correspondait pas ; elle ne s’était jamais mêlée de politique, et elle n’était de toute évidence pas réputée pour sa diplomatie. Peut-être avait-elle aspiré à ces responsabilités, par le passé, mais tout avait changé à présent. L’ombre d’elle-même, disait-on. Pourtant, elle avait fait tout ce qui était en sa mesure, au cours de l’examen, puis lors de son entretien avec la Nidaime Hokage, pour garder la face…
Tout ceci était certainement un stratagème du Kage, croyait-elle. Une façon de la tenir occupée, loin d’Uzushio, loin de ses souvenirs déplaisants, mais également une tentative de raviver la flamme. Alors, elle faisait comme si de rien n’était, acceptant les ordres sans rechigner, bien que sceptique quant à l’efficience de cette méthode.
Une fois arrivée sur le lieu de la rencontre – un restaurant que Junko n’eut aucun mal à trouver –, elle fut rapidement rejointe par une jeune femme sublimement vêtue, que l’on avait certainement prévenue de son arrivée. L’Uzujin n’était guère en avance, mais elle avait pour elle l’excuse du voyage depuis Konoha. En revanche, elle se sentit tout de suite déplacée, dans cet environnement luxueux qu’elle n’avait pas l’habitude de côtoyer. N’ayant d’autres habits que son kurotomesode usuel – qui, bien que n’étant plus dans sa prime jeunesse, avait tout de même l’avantage d’être un habit formel –, elle eut l’impression de détonner à côté de la belle Yamanaka. « Une simple formalité. » lui avait-on dit, mais peut-être n’avaient-ils pas la même définition de ce qu’était une formalité…
Ainsi, s’inclinant à son tour, elle ne put s’empêcher de songer que cette entrevue allait être une véritable épreuve, en réalité. Si elle pouvait jouer de son esprit pour mener à bien la rencontre, elle ne doutait pas de se faire démasquer sur certaines choses, comme l’étiquette. Adressant alors un sourire convenu à la jeune femme, elle se présenta également : « Je suis Myoshin Junko. Merci pour votre accueil. » Puis, tirant de l’intérieur de son habit une lettre cachetée, sur laquelle on pouvait aisément reconnaître le symbole d’Uzushio, elle joignit les mains et la lui tendit. « Le Senkage, ainsi que la Perle d’Uzushio, m’ont chargée de vous présenter leurs excuses. Ils sont retenus ailleurs et ne peuvent se joindre à nous aujourd’hui. » Elle se demanda vaguement ce que pouvait bien renfermer cette lettre, qu’elle n’avait pas eu la curiosité d’ouvrir lorsqu’elle en avait l’occasion. C’était certainement une façon pour lui d’excuser son absence, mais également de confirmer que Junko le représentait – et, avec lui, tout Uzushio.
Ceci fait, et n’ayant aucunement l’intention de commettre un faux pas – si ça n’était pas déjà le cas –, elle laissa la jeune femme prendre les rênes de leur entrevue.
Yamanaka Sayuri
Indépendant
Messages : 745
Date d'inscription : 21/08/2018
Fiche du Ninja Grade & Rang: Rang A Ryos: 104 Expérience: (2076/2000)
Jamais je n’aurais imaginé que le dirigeant du village des tourbillons ou la perle elle-même ne se présentent pour une rencontre si peu digne de leur intérêt. Comme Ao et Kirei, ils devaient tous les deux être bien plus occupés que d’accompagner un ninja sans poids politique tel que moi pour une rencontre qui se voulait principalement de courtoisie. Alors lorsque mon interlocutrice énonça que ses supérieurs n’avaient pu faire le déplacement, je me contentais de lui offrir un sourire détaché.
«Je rapporterai la lettre à mes supérieurs. »
Une affirmation inutile, puisque c’était de toute façon ce qui était attendu d’une kunoichi de mon calibre. Enfin, après avoir vérifié que ce n’était pas un piège … Mais Ao pouvait faire cela lui-même, il n’avait pas besoin que j’ouvre ses lettres pour lui.
Dans l’air, il y avait cette étrange sensation. J’avais l’impression qu’elle et détonnions et pourtant, il y avait ce quelque chose qui restait indéniablement similaire entre elle et moi. Peut-être était-ce nos tons formels, la façon dont nous approchions toutes les deux la situation avec des pincettes ? Ou peut-être était-ce ce froid qui flottait au fond de nos propos, de nos voix ? Je n’en avais aucune idée. Si j’avais été dans mon état habituel … enfin celui d’avant, peut-être aurais-je voulu comprendre, mais en cette soirée-là, je n’étais absolument pas disposée à tenter de trouver ce que c’était.
Je laissai donc immédiatement mon ressenti de côté pour me concentrer sur elle, sur ce que je devais dire, ce que je devais faire. L’absence d’ouverture à la suite de la remise de la lettre indiquait qu’elle s’attendait à ce que je guide la discussion, du moins, pour l’instant. Je ne m’y en étais pas préparée. Je m’attendais à ce qu’en réalité elle présente le point de son village plutôt que de me laisser carte blanche … Tant pis, il me faudrait faire ainsi.
«Nous savons toutes les deux que cette soirée n’est que formalité, mais cela ne nous empêche pas d’en profiter un peu, qu’en pensez-vous Myoshin-dono ? »
Sur ces paroles, je fis signe à une serveuse de venir nous voir et lui commanda mon saké favori. Il était amer, à boire chaud.
«Avez-vous une préférence sur la boisson ? »
Je ne voulais pas commencer directement avec le vif du sujet, après tout nous avions toute la soirée pour en discuter. J’essayais tant bien que mal de créer une atmosphère propice à une discussion ouverte et si possible honnête – honnête, moi … à quel point avais-je couler pour en être rendue là ?
Lorsque la serveuse demanda ce que je désirais manger, je lui demandais que quelques petites pâtisseries. C’était sensé être un repas, mais je n’avais pas d’appétit. Je n’en avais plus depuis cette journée-là. Lorsque la serveuse me lança un regard qui demandait silencieusement ce que je prendrais d’autre, je détournais immédiatement la question vers mon interlocutrice de la soirée.
«Y a-t-il quelque chose qui vous intéresse ? »
@Myoshin Junko @Yamanaka Sayuri ne jamais s'arrêter
En profiter ? Pour toute réponse, Junko adressa un sourire convenu à son interlocutrice. Elle préférait prévenir toute tentative de réponse maladroite. Cela dit, la belle Yamanaka confirmait les propos du Senkage. Pour elle, pour eux aussi, cet entretien ne devait être qu’une formalité. Par ailleurs, elle devinait aisément que la jeune femme n’était qu’une émissaire, à son instar. Peut-être se faisait-elle du souci inutilement. Et pourtant, il lui semblait que le message qu’elle devait faire passer n’avait rien de plaisant. Ah, la diplomatie… C’était l’intitulé d’une épreuve qu’elle avait encadré, à l’examen. Ils avaient fait passer ça pour un simple marchandage, mais la réalité était bien différente. Heureusement, la plupart des jûnin pouvaient s’en tenir éloignés durant toute leur carrière – elle n’avait visiblement pas cette chance.
Tâchant de se détendre sur son siège, elle réfléchit à une façon d’amorcer la conversation, tandis que ladite Sayuri faisait signe à une serveuse. « Juste du thé, merci. » Ce n’était pas seulement le fait d’être en mission, Junko ne buvait tout simplement pas. Quant à la nourriture, elle avait espéré suivre le mouvement impulsé par son interlocutrice, ne connaissant guère l’endroit, ni les spécialités locales, mais celle-ci se contenta de quelques mignardises. Elle ne pouvait résolument pas faire la même chose, ni commander un repas complet que la Yamanaka la regarderait manger.
Tranchant finalement, elle commanda quelques raviolis et autres bouchées, frites ou à la vapeur. Au moins, elles pourraient partager, s’il prenait l’envie à Sayuri de manger davantage. « Je dois admettre que le voyage depuis Konoha m’a creusé l’appétit. » ajouta-t-elle, comme pour s’excuser, en dépit d’un geste qui se voulait attentionné. Puis, continuant sur le ton de la conversation : « J’étais à l’examen Jûnin commun entre Uzushio et Konoha. Il vient tout juste de se terminer, la cérémonie de clôture était hier. » Nul doute que la jeune femme savait de quoi elle parlait. Les examens Chûnin et Jûnin entre Konoha et Uzushio marquaient un tournant sur la scène politique mondiale. C’étaient les premiers témoignages d’une amitié qui se voulait immuable. Et les Yamanaka étaient aux premières loges, leur territoire jouxtant celui des pays du Feu et des Tourbillons.
« Ces examens étaient une belle initiative, vous ne trouvez pas ? Un grand pas vers une paix durable. » Elle ne pensait pas un traitre mot de ce qu’elle venait dire, voyant tout un tas de contraintes et de dangers à accepter ainsi l’étranger au sein de son territoire, lui permettre de voir et de tester limites de ses forces. Elle avait été honnête avec la Nidaime Hokage à ce sujet, d’ailleurs. Elle en voyait les avantages, mais surtout les inconvénients. Mais ce qui l’intéressait, en posant cette question à la Yamanaka, c’était la vision de quelqu’un d’externe – et pourtant si proche des forces en présence. Junko tendait une perche à Sayuri. Elle et son clan, qu’en pensaient-ils finalement ?
Les boissons ne tardèrent pas à arriver, ainsi que les petits plats salés et sucrés qu’elles avaient commandés. Levant légèrement son verre de thé, la dame d’Uzushio offrit un nouveau sourire à sa comparse. « Je ne peux trinquer, mais le cœur y est. A votre santé. »
HRP:
J'ai vu que tu étais passée sur le forum récemment. Si le cœur t'en dit, voilà une petite réponse pour te remettre au RP ! En espérant que ça te plaise, bien sûr
Accueil 
