Ogawa VS Kirai (Tournoi de Suna)

Dans l'air, une musique se fait entendre. L'oreille attentive du Tailleur en reconnaît la mélodie. Doucement, il s'imprègne de chaque note, suivant le fil d'Arianne qui le mène à la contemplation d'une horrible splendeur. Théâtre de la mort et de la souffrance, la cri de ses pairs résonnent déjà dans ses oreilles alors qu'un léger sourire s'affiche sur son visage. Emmitouflé sous une longue cap lui recouvrant également le visage, l'Epouvantail se cache de l'astre diurne une fois de plus. Pour autant, la chaleur dont il se plaint souvent ne le dérange pas aujourd'hui. Face à l'énormité en construction, il réfléchis, pense et sous-pèse. Tant de choses ont changé depuis la dernière fois qu'il a vu autant de bois et de terre s'élever dans les airs par la volonté de l'homme. La promesse de nouvelles souffrances et d'une ôde à la brutalité... Un spectacle qui sera des plus merveilleux à contempler, de loin.

Et alors que sa curiosité est des plus rassasiés, Kirai tombe alors nez-à-nez avec un pauvre morceau de papier chiffonné dont l'en-tête est percé d'un trou. Délicatement, il se baisse pour le ramasser et en fait la lecture. Son sourire s'affiche à nouveau, tandis qu'une décision est, étonnement, prise sur le coup. S'annonçant dans les différentes ruelles menant au lieu des inscriptions, les doigts délicats du Tailleur s'extirpe de l'épais tissus pour se saisir d'une plume. Quelques gouttes d'encre suffiront à marquer son nom dans la liste des participants au tournoi. De quoi étonner la plèbe et les quelques hautes Instances, lui qui n'avait fait de vague depuis sa retraite après la disparition de sa défunte famille.

Les jours se succèdent tandis que dans l'atelier de l'Epouvantail, les bruits étranges se font entendre jours et nuits. Personne n'ose venir se plaindre, mais tous se demandent ce qu'il peut bien se passer dans ce si petit endroit. Une curiosité qui, pendant le temps les séparant du début du tournoi, pousse les enfants du coin à venir faire quelques enquêtes, tandis qu'une rumeur circule sur le fait que le Tailleur de Suna aurait fait un pacte avec le diable lui-même. Et des on-dit naît la crainte, mais aussi le besoin de savoir. Les parvenus se tassent tentant d'être discret, alors qu'à la veille du début des combats, le silence reprend ses droits dans la petite maison de terre. Et alors que l'aube commence à peine à pointer le bout de son nez, une ombre s'extirpe de l'atelier du Tailleur. Certains disent avoir aperçu un démon. D'autres, un monstre à l'allure inhumaine. La seule certitude étant qu'il ne va rien laisser au hasard.

Les premiers combats s'enchaînent, laissant Kirai dans la plus simple des contemplations. Recouvert de la tête au pied d'une cap opaque, il a même fait en sorte de fermer l'ouverture de sa capuche par un tissus aussi sombre que la nuit. Et bien que la chaleur sous ces apparats soit des plus étouffantes, rien ni personne ne semble pour autant vouloir s'approcher de lui. Les rumeurs sont allés bon train et c'est avec une certaine délectation qu'il reste figé dans les ombres, regardant les potentiels futurs adversaires se battre. Mais alors que son premier combat commence, le Tailleur se retrouve seul au milieu de l'arène. À la surprise général, son opposant refuse de rentrer dans l'arène. Sous l'indignation générale, l'Epouvantail passe le premier tour par un simple abandon, se retirant sans une parole, toujours enfoui sous son vêtement trop large, retournant dans les limbes, augmentant la rumeur qu'il a bel et bien un lien avec les démons.

Au second tour, son adversaire se présente cependant à lui. Un Serika dont la popularité n'est plus à refaire, se dandine dans tous les sens, montant la furie de la foule en délire. Un showman qui laisse l'ombre stoïque tandis que les deux combattants s'avancent l'un vers l'autre pour se saluer. Mais alors que son opposant se trouve à quelque pas, il s'arrête net. Figé sur place, la peur se lit sur son regard alors qu'il cherche à se protéger le visage comme si un monstre venait d'apparaître. Membre du Clan du Kazekage, cela ne l'empêche de choir sur le sol et de partir en courant hors de l'arène. Une nouvelle victoire étrange par forfait, qui cette fois-ci, ne provoque pas d'esclandre, mais une stupeur générale, tandis que les murmures s'étendent dans l'arène et chez les combattants. Kirai n'est plus un homme, c'est devenu un monstre, un Yokai !

Le tournoi continu ainsi, la foule attendant toujours avec une certaine crainte les combats du Tailleur, se demandant si quelqu'un va avoir le courage de se battre contre lui. Pour autant, c'est une indigestion de son adversaire qui l'empêchera de combattre. Puis, la mise à mort étrange de deux combattants durant un combat, le gagnant devant se retrouver contre Kirai. Une succession d'événements étranges qui le poussent à atteindre les demi-finales.

Son regard se pose sur le tableau des participants, tandis que derrière le voile sombre qui le cache, son visage fait la moue. Vraisemblablement, le combat a venir est des plus complexe pour l'Epouvantail qui commence à se demander si le jeu en vaut la chandelle. Akayuki Ogawa, le manchot. Une personne qu'il a déjà vu par le passé lors d'une mission avec les frères Nozomos. Mais surtout, un combattant reconnu pour être puissant et expéditif. Après tout, l'on ne devient pas Triumvir par hasard. Cependant, cette nouvelle remet en question les plans du Dakuwanda, qui tente de se rappeler les combats qu'il a vu avec le guerrier. Toute la nuit, il va analyser, prendre en considération toutes les variables, pour finir par mettre en place un plan d'attaque qui, avec beaucoup de chance, peut passer. Tout se joue sur le fil d'une aiguille...

Le jour se lève sur une myriade de promesses, tandis que dans les ombres, la masse informe qu'est devenu Kirai s'avance vers le lieu du tournoi. Le sourire au lèvre, il se dirige vers les grandes portes d'entrée de l'arène et laisse l'Hérault chauffer les foules. Pourtant, l'Epouvantail peut sentir déjà que quelque chose semble peser sur les gens en présences. Une question restant en suspens : Y aura t-il combat aujourd'hui ? Le Tailleur possède déjà la réponse alors que son nom est hurlé dans l'arène et que les portes s'entre-ouvrent. Doucement, il s'avance, avec dans sa main une faux gigantesque dont le départ de la lame est sertie d'un crâne humain d'où s'échappe un long foulard aussi noir que la nuit. Son entrée ne provoque aucun bruit dans la foule. Le silence comme seul témoin de la curiosité et de la peur des Sunajins face à cette singularité.

Il est temps pour son opposant de faire face.

Le temps semble s'arrêter un instant tandis que l'arrivée de son adversaire provoque une cohue générale. Légèrement amusé, le Tailleur reste de marbre, laissant son jeu se mettre en place doucement. La peur est une arme cruelle qui pousse à bien des erreurs. Mais est-il seulement possible de penser qu'un tel combattant puisse être berné de la sorte ? Il ne s'agit pas l'un d'un vulgaire combattant sortie de l'académie. Akayuki Ogawa est célèbre pour ses hauts faits et si cela ne suffit pas, la simple mention qu'il est un des trois Triumvir est des plus suffisants pour témoigner de sa puissance. L'un des plus grands guerriers parmi un clan de combattant. De quoi faire triturer les méninges du pauvre Kirai qui ne sait pas trop comment son opposant va vouloir réagir. Il a pensé à toutes les éventualités, se posant simplement sur les ouï-dires le concernant, mais même là, il sait que la variable impossible peut tout faire basculer.

Le poing du shinobi se lève dans les airs, offrant une phrase des plus solennels qui pourtant, laisse l'Epouvantail stoïque. Son attention se pose sur lui, prêt à répondre au moindre de ses mouvements. Va-t-il attaquer par du ninjutsu élémentaire ? Tenter le corps à corps directement ? Il faut bien avouer que de ses deux options, le tailleur n'en apprécie aucune, mais possède le nécessaire pour s'en protéger. Malheureusement, ou heureusement pour lui peut-être ? Le rouquin se décide à lancer un shuriken. Une attaque aussi simple pour un début de combat ? Non. Car très vite, ses doigts bougent, annonçant une attaque de plus grande envergure.

« Encaisse... » murmure l'Epouvantail dont la faible voix se trouve recouverte par le bruit métallique des armes de jets qui commencent à apparaître en légion, menaçant déjà une fin de match. Le Triumvir n'a pas de temps à perdre et il vaut toujours mieux dans ce genre de cas ne pas faire tarder les choses. Une stratégie payante, que l'homme encapuchonnée subit. D'un mouvement simple, il recule son pied droit, faisant basculer la faux derrière lui tandis qu'il brandit son bras face à son visage. La foule commence à être en délire alors que les projectiles menacent le fameux démon d'une fin certaine. L'étau se resserre, mais celui qui a pactisé avec le diable ne bouge pas, subissant chaque arme qui vient se loger dans le tissus puis dans sa peau. Sans broncher, il encaisse la douleur, ne sortant ni hurlement, ni plainte d'aucune sorte. Cependant, la puissance de l'attaque ne tarde pas à le faire reculer légèrement tandis que les derniers projectiles se figent dans sa carcasse, le faisant claudiquer légèrement.

Va-t-il tomber à la première attaque ? La foule en délire commence à se poser la question tandis que l'ombre encapuchonné se redresse, faisant difficilement face à cet opposant dont la première attaque fut un grand succès. Pour autant, le match n'est pas fini.

« Lance la faux et cache lui la vue... » murmure le Tailleur à voix très basse, comme s'il cherche à se donner lui-même du courage. Et dans un mouvement circulaire, il envoie valser sa faux dans les airs tandis que bientôt elle disparaît dans le contre-jour du soleil. Mais son action ne s'arrête pas là, car aussitôt l'arme projeté, le démon réalise une série de mudra et un épais nuage opaque commence à sortir de sa bouche et à se répandre dans l'arène alors que l'arme redescend dans une rotation à grande vitesse vers son opposant...

Faut-il être étonné de voir le Triumvir se défaire d'une aussi banale attaque ? Pas vraiment. Malgré tout, la foule ne cesse d'acclamer son héro tandis que l'assaut calculé de Kirai se solde par un misérable échec. Le nuage de poison se voit disperser par une explosion contrôlé qui ne tarde pas à créer une ovation par les Sunajin. Les fourberies du démon ne peuvent décidément pas atteindre un guerrier d'une telle envergure. Mais dans le chaos, peu se rendent compte que leur grand champion ne se donne pas à fond. Pourquoi ? La raison est simple et se lit dans chacun de ses gestes : La peur. Cette émotion cruelle qui guide les âmes au travers de la vie n'a de cesse de rendre prévisible ce qui, d'aventure, ne peut l'être. Et par quel médium passe-t-elle ? L'ouï, bien évidemment, mais surtout la vue.

Combien de ses adversaires sont tombés sans comprendre ce qu'ils leur arrivent ? Moult à n'en pas douter, mais là où la célébrité met en avant les dons des plus grands, les autres eux, se terrent dans l'ombre ou dans des ruses, tellement simple, qu'elles marchent quasiment à chaque fois. La lame se plante dans le sol, provoquant un bruit métallique reconnaissable. Désarmé, loin de son adversaire, l'ombre encapuchonné ne bouge plus, les pans de son vêtement couvrant encore le démon qui s'y terre. Quant à la faux ? Voilà un curieux artefact, peu enclin à la discrétion mais qui pourtant, attire l'oeil de son opposant. Kirai s'amuse a voir la crainte dans le regard d'Ogawa qui contemple l'objet avec une once de questionnement. Et tandis que la foule continue a hurler le nom du Triumvir, une erreur est faite. Car si l'Akayuki note la manufacture quelque peu extravagante de l'arme, son regard se pose sur le foulard d'où se dessine soudainement deux yeux. Un échange de regard qui ne tarde pas à faire apparaître un large sourire sur le morceau de tissus qui doucement se meut. Petit à petit, l'objet prend une nouvelle forme, plus humaine, plus reconnaissable tandis que le rire de l'Epouvantail éclate, faisant taire les spectateurs.

« Ahahahahah ! Bravo ! Bravo ! »

Le Tailleur apparaît non loin de son opposant, l'applaudissant avec une ferveur étrange.

« Toutes mes excuses pour tout ceci, vous comprendrez bien mon cher Ogawa qu'il m'était compliqué de vous affronter de face. Mais je dois l'avouer, votre réputation ne fait guère honneur à la réalité de votre condition. » continue-t-il en retirant la faux de son fourreau de terre. « Permettez-moi de me présenter, Dakuwanda Kirai, enchanté ! » dit-il en se penchant cérémonieusement avant de se relever époussetant le sable sur sa tenue aussi sombre que la nuit qui pourtant, le moule étrangement, alors qu'un manteau ouvert le recouvre. « Hm. Hikari, mon chapeau ! » cri-t-il à l'ombre encapuchonné qui dévoile le couvre-chef et le lance jusqu'à son maître qui le pose sur sa tête. « Mes excuses, je me sens un peu nu sans ce dernier, mais je pense, que vous pouvez comprendre ceci. » dit-il dans un large sourire en pointant le couvre-chef du Triumvir. « Par contre, si vous voulez bien, je ne suis guère friand de la poussière, et si nous changions de terrain de jeu ? » Sa main se lève et ses doigts claquent. Le bruit résonne dans toute l'arène alors que le sol se transforme en plateau de jeu et que des fils invisibles de chakra s'étendent jusqu'à une marionnette. « Oh, et si j'étais vous, je ferais attention derrière vous ! »

Si d'aventure, le guerrier se laisse aller à la curiosité de regarder dans son dos, il pourrait voir une marionnette sanguinaire volante se diriger droit sur lui. La partie peut maintenant commencer, alors que dans la foule, quelques enfants commencent à tousser et que le Tailleur recule d'un bond en arrière.

Amusé, le Tailleur s'échappe d'une possible prise de bec dans un combat qui n'est plus le sien. Tout semble parfaitement se dérouler selon le plan. Son sourire s'étend alors que son attention se pose sur le guerrier face à lui qui soudainement, disparaît avant de frapper dans le vide avec une vélocité et une puissance qui étonne Kirai. Si jamais il vient à le frapper ainsi, il n'est pas sûr de pouvoir encaisser une force pareille. Faisant un pas en arrière, il se défait de sa faux qui peut le ralentir si jamais une attaque se fait sentir. La crainte commence à se lire dans son regard alors qu'il voit son opposant tituber un moment avant de reprendre ses esprits.

« Hm... Il n'y a pas de quoi... » répond t-il alors que son regard ne quitte par le Triumvir un seul instant. Et alors qu'il le voit commencer à se saisir de sa sacoche, la voix de Kirai se fait entendre, appelant Hikari qui, se délestant de sa cap, ne tarde pas à le rejoindre tandis qu'il perçoit dans le regard d'Ogawa une certaine... colère ? Et si en temps normal, l'agacement de ce dernier aurait pu le faire sourire, la promiscuité entre eux le met pour le moins, très mal à l'aise. Il n'y a qu'à voir la manière dont il s'est défait de l'illusion. Ce simple fait suffit au Tailleur pour commencer à... légèrement trembler, mais surtout à briser sa connexion avec sa marionnette.

« Cependant, je dois avouer que vous me décevez Maître Akayuki... » dit-il alors qu'Hikari se saisit de senbons dans ses mains. « Voyez-vous, je sais pas si vous avez fait attention mais j'entends des enfants tousser depuis que mon nuage de poison a été dispersé par votre explosion... J'espère que cela n'a pas un rapport... Ce serait fort fâcheux que cette simple action cause le décès de quelques braves futures recrues. Ne pensez-vous pas ? » Dans un écho les quintes de toux se font de plus en plus grandes. « Arf... Voilà qui est si triste... Vous imaginez ce que peuvent ressentir leurs parents à cet instant ?... Mieux vaut les piquer dès maintenant, qu'en pensez-vous ? Vu que c'est un peu de votre faute s'ils sont en passe de mourir, je vous laisse choisir leurs destins... Hikari, donne lui les senbons !» D'un geste le bras articulé de la marionnette jette en cloche quelques projectiles sur le Triumvir, non pour lui faire du mal, mais simplement pour les lui donner et le narguer un peu plus en jouant avec ses nerfs...

Que va donc faire le grand guerrier Ogawa face à cette situation qui va bien au-delà d'un simple combat ?

La réponse est malheureusement, prévisible. Car dans le flot de parole du Tailleur, une vérité latente subsiste, celle que ses mots atteignent l'Akayuki dont la fureur est à la grandeur de sa puissance. Kirai se voit-il vraiment surpris par une telle vélocité ? Bien sûr, qu'il s'attend à subir l'entièreté des conséquences de ses multiples manigances, mais pour autant, rien ne le prépare à ce qui va suivre. Aurait-il pu demander à sa marionnette de faire front pour le protéger ? Sans doute oui. Avait-il dans le fond de son chapeau quelques tours de passe-passe bien tordu qu'il aurait pu mettre en action ? Assurément. Mais il faut se rendre à une évidence qui le frappe soudainement de plein fouet. Bien qu'étant un puissant shinobi, il n'est pas grand chose en terme de combat par rapport à son adversaire. Bien plus rapide, bien plus fort que lui et peu prompt à le laisser finir ses paroles venimeuses, Ogawa disparaît, animé par la puissance de la colère pour réapparaître subitement dans le dos du Tailleur, le coupant dans sa logorrhée.

Doucement, Kirai ressent la puissance du guerrier l'enveloppé, comme si peu à peu, les crocs acérées d'une bête énorme s'apprête à l'engloutir. Il ressent le râle de la défaite jusqu'à la moelle de ses os. Il s'y est préparé et pourtant, la peur le glace sur place tandis qu'il sent cinq doigts se poser dans son dos. Le coup est rapide et les effets se font immédiatement ressentir tandis qu'il se cambre sur place, les yeux presque révulsés face à ce qu'il ressent. Son corps ne veut plus bouger, ou du moins, difficilement. Lui qui a pour habitude de jouer de son énergie spirituel se sent entravé jusqu'au plus profond de son être. La sentence est violente, mais n'est pas physique non, ou du moins, pas visible pour le commun des mortels.

Ce n'est qu'après l'impacte qu'il commence à chanceler en avant, courbant le dos comme un pantin à qui on extirpe peu à peu la vie. Et s'il sait qu'il n'a aucune chance de gagner ce combat, l'attaque de son adversaire lui prouve l'écart qui le sépare encore de ce genre de guerrier. Et ce n'est qu'au bout de quelques pas, où on peut croire qu'il va tomber, que l'Epouvantail s'arrête. Son torse se lève et s'affaisse dans une frénésie de plus en plus vivace, alors que soudainement, son rire se fait entendre.

« C'est dur n'est-ce pas ?... » Doucement, il se tourne, le visage plus livide que d’accoutumé. « Se rendre compte que malgré sa force et sa rapidité, on est pas capable de sauver qui que ce soit ? » À sa parole se joint l'écho des quintes de toux et des râles de suffocations. « Tellement obnubilé par l'appât du gain... Prêt à tout pour obtenir ce qu'il désire... Un Akayuki aussi égoïste et vénale qu'on peut si attendre... » Les râles se transforment en pleures alors que le Tailleur claudique et profite de son mouvement pour envoyer un épais nuage de poison dans la direction d'Ogawa.

Le combat n'est pas encore fini.

La douce ode à la violence qui s'est éprise de l'arène touche à sa fin, Kirai peut en saisir les dernières notes. Une dernière phrase, vindicative et puissante sort de la bouche de son opposant et résonne dans l'air comme une vérité éternelle. Non, l'Epouvantail n'est pas un guerrier et n'a jamais cherché à l'être. Il n'est pas de ceux qui se battent pour l'honneur, ni même pour un quelconque principe. Il est de ceux qui atteignent leur objectif, qu'importe le prix à payer pour cela. Et en ce sens, aussi simple et limpide que l'issue de ce combat, le Marionnettiste ne peut pas gagner. Mais est-ce vraiment important pour lui ?

L'épais nuage enveloppe son adversaire, le plongeant dans un déluge de poison. A-t-il la moindre chance ? Bien sûr que non. Ceci ne change rien à l’inéluctabilité de cet affrontement. Pour autant, le Tailleur s'amuse à entendre la foule hurler le prénom de leur champion. De tout le combat le Triumvir a suscité l'adoration de ses confrères. Une popularité qui n'est guère du goût du Démon qui perçoit l'arrivée de son adversaire. Tout aussi rapide qu'à son habitude, ce dernier lui fait cette fois-ci face, permettant au Dakuwanda de hûmer avec plus d'intensité la puissante aura du guerrier qui lui fait face. Une dernière parole et le voilà dans les airs, tenu par la gorge l'empêchant de parler. Doucement, le pauvre Epouvantail tente de se débattre mais sans succès. La puissance de l'Akayuki est sans pareille et de toute manière, les jeux sont déjà faits. De toute sa force, il l'écrase contre le sol et l'y maintiens un moment. Un simple instant, où leurs regards se croisent tandis que la douleur s'empare du corps de Kirai, le poussant à un hurlement étouffé par la poussière qu'a soulevé l'impacte. La souffrance est grande, mais dérisoire alors que sa main vient retrouver un instant celle de son adversaire. Et malgré tous les nerfs de son corps qui hurle, Ogawa peut étonnement voir, qu'au dernier moment, juste avant l'ultime impact, un léger rictus s'étend sur le visage du Tailleur. Inéluctablement, il finit par subir le coup de poing du Triumvir en pleine cage thoracique, le faisant plier sous le choc alors qu'un cratère se forme sous l'Epouvantail après l'impact, soulevant plusieurs morceaux de roches dans les airs.

La douleur est lancinante alors que le temps semble se figer l'espace d'un instant, laissant au roux la possibilité de voir une dernière fois le rictus du dément qui finit par s'étaler sur le sol, presque inconscient. La poussière doucement se pose sur la scène, alors que l'Akayuki gît au-dessus de son adversaire. Peut-il être fier de son combat ? A-t-il prit du plaisir ? Tant de questions inutiles pour le Tailleur qui commence à convulser, alors que ses spasmes se transforment en un rire qui brise le silence dans lequel la foule s'est plongé au moment de l'impacte.

« Bravo Ogawa-san... » arrive-t-il à sortir dans une quinte de toux réveillant la douleur de ses côtes brisées. « Je suis vaincu... » dit-il en levant la main vers le ciel, son satanée sourire figé sur son visage. « Hikari... Vient... » Ainsi s’exécute la marionnette en marchant tranquillement vers son maître, l'aidant à se relever, ne manquant pas de le plonger dans des tourments pires que la mort. Et alors qu'il se retrouve plus ou moins debout grâce à l'aide de son pantin, le Tailleur plonge son regard dans celui de l'Akayuki, son satané sourire toujours figé sur son visage. « Vous savez... » Une autre quinte de toux vient interrompre son discours. « Je vous aime bien... Peut-être qu'avec vous, Suna aura plus d'avenir qu'avec tous les bouseux que j'ai dû affronter... » finit-il par souffler tout en commençant à marcher vers la sortie de l'arène.

Il n'y a pas de doute sur le fait que les deux hommes se soient compris dans cette ultime phrase. Kirai vient-il de se faire un ennemi de plus ? Sans doute, mais qu'importe en réalité. Le vrai but de tout ceci, est pour lui ailleurs. Son regard se porte vers l'homme à la longue chevelure, assit dans un beau fauteuil, croisant le regard du Tailleur qui ne manque pas de lui sourire tout en le saluant tout en baissant son chapeau.

Prouver qu'il est le meilleur guerrier ? Pourquoi faire ?

« Je crois, ma chérie... Que notre ami Hayato a bien aimé le spectacle que nous lui avons offert !... »