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Le dernier voyage des dragons | ft. Kenzo

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Le dernier voyage des dragons



La maladie l’avait emporté… Souffrant d’un mal foudroyant, Chiyo s’était brusquement éteinte. Cette disparition soudaine avait laissé derrière elle un petit-fils : Natsuki, d’autant plus esseulé qu’il ne l’était à l’origine. Chiyo représentait pour lui la tendresse maternelle, sa seule véritable attache, sa dernière famille. Ainsi, le gamin demeurait abattu, las de la vie qui l’avait déjà tant éprouvé. Abandonné par sa mère et d’un père qu’il ne connaissait pas, il ne lui restait désormais que son aïeul : la vieille branche Osamu. Malheureusement, celui-ci ne l’avait jamais guère considéré davantage que comme un moyen de racheter l’honneur de sa famille entachée d’ignominie. Alors, Natsuki lui en voulait. Il lui en voulait d’être la dernière personne présente à ses côtés. De ne jamais l’avoir compris comme pouvait le faire feue Chiyo de son vivant. De ne pas l’autoriser à pleurer, car cet état demeurait indigne de ses fonctions de shinobi. En y repensant, il aurait même préféré que les rôles soient inversés. Qu’Osamu y soit passé et que Chiyo demeure, mais plus que tout, il s’en voulait terriblement de penser à de telles atrocités.

Le cœur lourd, le gamin s’était enfui dans la forêt de Konoha : son seul refuge. Là où il venait entraîner son ouïe sur les bons conseils de sa défunte grand-mère. Ici la nature demeurait son sanctuaire. Ni la faune ni la flore ne pouvait juger ses origines douteuses. Il s’y sentait à l’abri. En ce lieu, il avait pris l’habitude de jouer de la musique lorsque ça n’allait pas. Cela lui permettait d’extérioriser toutes les peines qu’il n’arrivait pas à exprimer lorsque les mots restaient coincés au travers de sa trachée. Malheureusement aujourd’hui, cet exercice lui était difficile presque impossible. Après tout, c’était sa grand-mère qui lui avait appris à jouer… Ses leçons lui manquaient, sa voix tout autant. Comment sonnait-elle déjà ? Il avait l’impression de trahir sa mémoire en oubliant si vite des détails de son existence passée. Recroquevillé sur ses genoux, il serrait fort contre sa poitrine la flûte que lui avait offerte son aïeule. Les yeux noyés de larmes, il avait l’impression que sa maîtrise de la musique, cet art qu’elle lui avait légué, demeurait son dernier lien avec elle. Qu’en jouant du yokobue il honorait sa mémoire, ses enseignements, sa personne. Il voulait jouer mais avait aussi peur de se tromper. Une mauvaise note jouée en cet instant aurait représenté à ses yeux une insulte à toutes les leçons qu’elle avait pu lui donner. Il souhaitait que cette représentation, avec pour seul public le vent, soit la meilleure qu’il ne lui ait jamais été donnée de jouer

Lorsqu’il parvint enfin à calmer ses sanglots et fut enfin prêt. Natsuki positionna le ryūteki tout près de ses lèvres et commença à jouer. Selon grand-mère Chiyo, le son que produisait cet instrument était censé représenter les dragons qui montaient entre les lumières des cieux et les gens de la terre. Il espérait ainsi pouvoir honorer une dernière fois son aïeule et accompagner son dernier voyage avec les dragons.

Tandis que sa musique se mêlait au chant des oiseaux depuis plusieurs minutes maintenant, les puissantes oreilles de Natsuki furent subitement interpellées par la présence d’un individu tout prêt. Il interrompit alors son jeu et, tandis qu’il essuyait les perles salées de ses joues d’un revers de la main, il éleva la voix pour la première fois depuis des heures, les cordes vocales encore nouées par l'émotion…

— Qui… Qui va là ?
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ft. Hyûga Kenzo
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Le Dernier voyage des dragons! ft. SENJU Natsuki


La vie était dure et amère, c’était une idée que j’avais en tête depuis bien longtemps. J’avais été si bousculé par celle-ci que désormais, j’en avais la certitude, la vie c’était douloureux, vivre faisait mal. Mais, cela faisait partie de l’existence même, vivre c’était souffrir, car sans souffrance, on ne pouvait pas apprécier la joie.

Certains objecteraient que le but de la vie, de l’existence, c’était être libre : je n’étais pas d’accord, la finalité de la vie, c’était d’être heureux à mes yeux, de s’épanouir. Vu les sentiments que j’avais à l’égard de ma fille, je ne pouvais pas croire que la joie, le bonheur n’était pas la finalité de l’existence. Je me battais moi-même pour faire de ce monde, un lieu où Ringo pourrait s’épanouir.

Je pouvais être assez désagréable envers certaines personnes, souvent des non-Hyuga. On pouvait aisément prendre cela pour de la haine, de la colère, mais c’était autre chose, de plus profond. Je n’étais pas stupide, j’en étais même assez loin. Je savais bien que tout le monde ne pouvait pas avoir le glorieux et génialissime sang de notre clan. Plutôt, je considérais qu’il fallait de tout pour faire un monde, même des gens qui ne pouvaient qu’être inférieur. Je voyais les gens en dehors de mon clan, comme un homme verrait un animal : il lui trouverait des qualités certaines, même de l’affection, mais ne pourrais pas le considérer comme son égal. J’avais plus où moins la même philosophie.

Je n’étais pas naïf, autant qu’un homme savait bien qu’un cheval était plus fort, un chien meilleur chasseur et un poisson meilleur nageur, que lui, je savais que Dame Yuriko l’Hokage était une meilleure guerrière, Kokei un meilleur Hyuga et Uchiha Masaru un meilleur enquêteur. Je leur reconnaissais tous des qualités indéniables et ils m’étaient tous supérieurs sur de nombreux point. Cependant je n’arrivais pas à les considérer, pour ceux qui n’étaient pas Hyuga, comme mes égaux, car ils ne possédaient pas le glorieux Byakugan.

Je savais aussi très bien qu’à certains instants de ma vie, des personnes extérieures au clan m’avaient aidé, que ce soit cette prostituée qui m’avait aidé à soulager le chagrin de la perte de mes parents et de ma sœur, ou même de Ha, cette jolie fille qui m’avait fait connaître les joies de l’amour pour la première fois. Ainsi donc, derrière ce que certains pouvaient croire, je n’étais pas dépourvu de cœur et je savais ressentir de l’empathie pour des non Hyuga, encore plus quand ce n’était que des enfants.

J’en arrivais au cœur même de mon histoire, car j’étais sorti assez tôt de chez moi, une fois de plus. J’avais dormi assez peu, j’étais rentré de mission hier-soir. En tant qu’Anbu, il n’était pas rare que je sois obligé d’œuvrer la nuit. Et puis, quand généralement je rentrais, j’avais besoin de temps pour réfléchir. J’étais un peu introvertie, où du moins un introverti qui s’obligeait à se conduire comme un extraverti. Je devais alors prendre mon temps pour me retrouver avec moi-même. Par la suite, l’après-midi était le temps que je donnais à ma fille, jusqu’au soir et que le cycle pouvait recommencer.

Je m’étais ainsi évadé de chez-moi, partant vers la forêt et ses bruits de nature réconfortant. Peut-être cela m’inspirerait un haïku ou deux. Et parce que j’avais horreur d’être dérangé, j’avais camouflé mon chakra grâce à mes dons de furtivité.  Je sautais de branche en branche silencieusement, je n’avais guère passé de temps seul que j’avais été intrigué par le son d’une flûte. Je m’étais approché de la source du bruit, toujours caché dans l’ombre du feuillage des arbres et accroupis-en dessous d’une branche, tenant en équilibre grâce au chakra malaxé sous mes pieds.

C’était un jeune garçon qui jouait, les larmes aux yeux, une mélodie triste et mélancolique. Je me laissais aller l’écouter incognito. J’étais à la fois si proche de lui, toutefois tant caché. Je n’avais jamais vu ce jeune homme, je ne savais pas qui il était, la seule chose que je n’ignorais pas, c’est qu’il n’était pas un Hyuga, il n’en avait pas l’apparence. Il me faisait pitié à pleurer comme cela, caché. Mais, je le comprenais, la vie c’était désagréable et douloureux, j’avais pleuré et je continuais de pleurer pour extérioriser ma douleur. Peut-être avait-il de bonne raison de pleurer. Mais, voir un jeune garçon pleurer m’émouvait un peu, je n’étais pas père pour rien. Je restais ici plusieurs heures à l’écouter, songeant aux moments de joies que j’avais passé avec ma femme, des moments heureux avant que la vie ne me la fauche.

Je me déconcentrais alors, pris dans le flot mélodieux de sa musique. Ce fut à ce moment-ci que je fis craquer la branche et qu’alors, l’autre cessa sa musique, essuya les larmes qui coulaient sur ses joues. Et regarda de droite à gauche et demanda d’une voix enrouée qui était là.

Je restais immobile et silencieux quelques secondes, réfléchissant au fait que je pourrai partir sans un mot et le laisser à ses malheurs. Mais, je pouvais aussi m’annoncer et voir de quoi il en retournait. De toute évidence, voir l’origine du chagrin du bonhomme pouvait être un bon entraînement pour moi pour plus tard. Je me retrouverai un jour dans une situation de ce genre et je ferai mieux de savoir comment m’y prendre.

J’évacuai tout l’air de mes poumons, me préparant pour une interaction sociale avec quelqu’un d’extérieur au clan. Je me raclai alors la gorge et abandonnais toute furtivité. J’annonçais alors et ma présence et ma position. Je restais debout sur la branche à l’envers, à quelques mètres du garçon :

« Eh bah mon garçon, c’est un sacré chagrin que voilà ! »

Je descendais alors complètement de l’arbre à pas lent et tranquille avant de me placer devant lui, je le dominais alors de toute ma taille et mes yeux cernés ne cessaient de faire des aller-retours sur le jeune homme. Il ne devait pas avoir plus de quatorze ans et était jeune, bien que certains genin étaient plus jeunes. Une fois mon manège visuel termine, je repris alors avec neutralité :

« Je ne voulais te déranger. J’ai été plutôt étonné d’entendre quelqu’un jouer de la musique en pleine forêt ! »

Je croisais alors les bras et plissait les yeux avant de murmurer avec douceur en m’accroupissant pour paraître moins imposant et plus amicale. Mon apparence lugubre n’était pas pour mettre en confiance, je devais donc me montrer moins flippant que je l’étais. J’esquissai un demi-sourire et posais ma tête entre mes mains avant de murmurer avec une douceur paternelle :

« Hyuga Kenzo, enchanté de te rencontrer ? À qui ai-je l’honneur mon garçon ? »

Je lisais dans ses yeux une grande détresse. Je ne pouvais pas nier que je voulais l’aider, ce n’était qu’un enfant, un enfant ne devrait pas souffrir… Bien que j’eusse été formé par les tristesses et la souffrance, mon parcours n’avait rien d’enviable et si je pouvais atténuer un peu la douleur qu’il ressentait, alors ce serait un bon pas pour lui comme pour moi. J'avais pour volonté de pouvoir aider et guider les miens aussi. J’avais beau mépriser bien beaucoup de gens qui n’était pas de la même espèce que moi, devant un enfant en souffrance, je ne pouvais pas. Dans ma poitrine, mon cœur battait toujours, Kenzo était capable de ressentir de l’empathie. En mission, mon comportement eut-été probablement différent, mais je n’étais pas en mission, ce n’était donc pas Enma qui allait parler, mais bien moi-même : Kenzo.

Mon garçon parle-moi et je verrai si je peux t’être utile !

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Le dernier voyage des dragons


Ses sens en alerte, Natsuki fut subitement interpellé par la voix d’un homme à proximité. Proche oui, beaucoup trop proche même… Bien plus qu’il ne l’avait initialement imaginé. Visiblement l’ouïe surdéveloppée du genin était encore à parfaire. Quant à l’inconnu, il s’agissait d’un adulte, probablement la trentaine, qui demeurait suspendu à une branche à quelques mètres de là. La prestation du garçon semblait l’avoir interpellé, au même titre que son humeur morose d’ailleurs. Descendant de son perchoir, le shinobi était venu dominer le petit Senju de son imposante stature. Une fois nez-à-nez avec “le bâtard”, les yeux laiteux de l’étranger ne cessèrent de le toiser. Ses prunelles grises, presque blanches, demeuraient intimidantes, quasi dérangeantes. Ainsi, le demi-Sarutobi était incapable de soutenir son regard… Sans aucun doute, il s’agissait d’un Hyûga. Seuls les célèbres détenteurs du byakugan étaient capables d’autant perturber Natsuki d’un simple coup d'œil. Il connaissait leur réputation noble, mais surtout qu’ils n’étaient pas à contrarier. Pour autant, cet homme semblait différent de ses compères, moins hautain peut-être ? Si Natsuki imaginait être jugé par n’importe quel membre de ce clan pour l’état dans lequel il se trouvait, cet étranger semblait plus empathique qu’il ne l’avait espéré. Pour autant, quelque chose clochait… Il fallait dire que son aspect lugubre n’aidait pas à mettre en confiance l’adolescent. Sûrement conscient du malaise ressenti par le jeunot, le Hyûga s'accroupit à sa hauteur dans une drôle de position... Désormais, Natsuki en était formel, cet homme était un excentrique. Il préférait néanmoins en cet instant faire face à un original plutôt qu’à un autre Hyûga prétentieux et sans cœur. Ainsi, il fut d’autant plus rassuré lorsque l’inconnu prit la peine de se présenter. Malheureusement, l’adolescent n’était guère à l’aise à l’idée de partager son identité. Il avait pris l’habitude, et ce depuis toujours, d’être méprisé pour ses origines douteuses par le reste de son clan… Il espérait en cet instant que la réputation de sa mère n’ait pas réussi à quitter le domaine de sa famille. Après une seconde d’hésitation, il finit par révéler son nom.

— Je… Je me prénomme Natsuki… Natsuki Senju.

La goutte au nez, sa voix était encore tremblante d’émotion. Définitivement, le genin aurait préféré la solitude à cette étrange compagnie. S’il était de nature assez facile à vivre et sociable, il ne demeurait pas réellement d’humeur à échanger aujourd’hui. Ce qu’il souhaitait, c’était ‘être minuscule, invisible, disparaître. Ses yeux encore noyés de larmes, son état était déplorable… Il désirait ne pas être vu… Il voulait pour une fois dans sa vie la paix. Qu’on cesse de le juger, de le mépriser pour qui il était et pour ce qu’il ressentait.

Ayant pris l’habitude des jugements sévères de son grand-père, Natsuki était encore médusé par l'apparente bienveillance de son interlocuteur. Il espérait l’homme sincère.

— Je suis désolé si ma musique vous a importuné monsieur… J’ai pris l’habitude de jouer ici lorsque ça ne va pas…

Pourquoi demandait-il pardon ? Au fond, lui-même l’ignorait. Il avait pris l’habitude depuis sa plus tendre enfance de s’excuser auprès des autres, s’excuser de vivre. Il ignorait tout autant la raison pour laquelle il avait commencé à importuner l’homme en lui racontant ses habitudes. En y repensant, Natsuki se demanda depuis combien de temps le dénommé Kenzo l’avait écouté. Jusqu’alors, le Hyûga ne l’avait en réalité pas vraiment blâmé… Peut-être même que celui-ci avait apprécié la mélodie ? Si tel était le cas, le Senju en était honoré. Il avait certes initialement joué en l’hommage de sa grand-mère, pensant être seul… Néanmoins, d’apprendre que la maîtrise qu’elle lui avait légué pouvait toucher un public même insoupçonné le réconfortait. Elle était donc là l’ultime révérence de Chiyo Senju, vivre au travers de l’art de son petit-fils…

— Êtes… êtes-vous là depuis longtemps ? Je pensais être seul dans ces bois… Je voulais honorer une dernière fois la mémoire de mon aïeule. C’est elle qui m’a appris à jouer de la flûte…

Sa voix avait déraillé sous l’émotion au moment d’énoncer le nom de sa grand-mère. Si la présence de cet inconnu l’avait déconcentré un instant de sa peine, la douleur demeurait toujours bel et bien présente dans sa poitrine… Il ne savait pas encore exactement ce que Kenzo avait en tête, peut-être comptait-il le laisser à sa mélancolie maintenant qu’il avait été débusqué ? En tous cas, Natsuki n’y voyait aucun inconvénient…
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ft. Hyûga Kenzo
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Le Dernier voyage des dragons! ft. SENJU Natsuki


Il était clair que mon apparence ne le mettait pas en confiance, mes yeux laiteux aux poches noires me donnait des airs de panda et pour cause, j’avais le sommeil très agité. De plus, comment lui en vouloir ? On avait peur des Hyuga au sein même du clan, alors en dehors du clan, ce n’était que guère étonnant. Peut-être cela prouvait-il qui étaient les véritables chefs de ce village. Cela étant, je ne voulais pas tant lui faire peur et l’effrayer. Voir un jeune homme de cet âge-là en pleur, me rappelait mes propres peines, j’avais eu mon lot de chagrin au sein de ma vie et ma jeunesse en était parsemé. Je pouvais comprendre les larmes d’un garçon, j’avais été à cette place-ci et même si cela m’avait modelé, changé profondément à tout jamais, si j’avais le choix, alors je crois que je préférais ne pas souffrir un seul instant dans mon existence. Alors, Pépé, Chisa, Papa, Maman et bien évidemment Michiru seraient en vie. Peut-être même que l’amour de ma vie ne m’aurait pas connu, mais imaginer un monde à posteriori où je ne l’ai pas rencontré et qu’elle n’était jamais morte des suites de sa couche serait le paradis pour moi. Après tout, si je pouvais sacrifier ma vie pour la faire revenir à ma place je le ferais. Ce n’était pas sérieux, c’était même fou selon certains, mais je n’y pouvais rien, j’étais malade, malade de la maladie d’amour…

Je papillonnai pour sortir de ces doux songes de mondes merveilleux et oniriques qui sautait m’arracher à la fois, la voix, des larmes et un râle de souffrance. M’enfermer dans de telles utopies étaient contre-productifs malgré le côté délicieux que cela prenait à mes yeux, je me plaisais dans ces espaces imaginaires, autant que je souffrais de les revoir, car la réalité était tellement douloureuse et morne à côté. Je choisissais alors de laisser cela de côté pour l’instant pour me concentrer sur cet être devant moi.

Il pouvait avoir besoin de moi. Mon instinct paternel était fort et je savais très bien que j’aurais pus avoir un fils de son âge, tant à l’époque de mes quatorze, j’étais déjà devenu un homme, qui bien que n’ayant pas son lot de conquête, avait assez d’argent pour aller s’amuser avec les geishas les plus belles et les plus attirantes. Cabarets et maisons close m’avaient vu grandir, mais aussi avaient vu mon cœur se durcir et se noircir… jusqu’à Michiru qui avait régénéré mon être complètement. Je lui devais ma vie et je dédiais ma vie entière à sa mémoire.

Le jeune garçon tremblait et n’était ainsi encore qu’un enfant. Il vibrait d’émotion et cela me faisait mal au cœur de voir un enfant comme cela. Sa musique m’avait ému et je me sentais tout bizarre, encore plus mélancolique et nostalgique qu’à mon habitude… J’avais de ce fait, beaucoup d’affection paternelle à revendre. Mon cœur m’hurlait de faire quelque chose et pour le satisfaire, j’allais le faire. J’hochai alors la tête avec lenteur et laissait apparaître un demi-sourire sur mon visage et murmurai alors avec chaleur, comme un père le ferait avec son fils :

« Enchanté de te rencontrer, jeune Natsuki ! »

Je décidais pour l’instant de répondre tranquillement et posément aux questions du jeune garçon, pour ne pas l’effrayer. Je devais le laisser instaurer son rythme et le laisser s’habituer à ma présence. Un enfant, c’était comme un petit animal, il devait s’habituer à toi pour t’accepter. C’était donc quelque chose que j’allais faire, lui laisser le temps de s’habituer à ma présence.

Lorsqu’il demanda si sa musique m’avait embêté, j’haussai un sourcil et murmurai avec douceur et gentillesse :

« Bien au contraire, tu m’as illuminé ma matinée, Natuski. Ne sois donc pas désolé, c’est plutôt moi qui devrais m’excuser d’avoir écouté et de t’avoir dérangé. Mais, comprends-moi, ta musique était si belle et touchante, je n’ai pas pu m’empêcher de l’écouter. »

Il me demanda ensuite si j’étais resté là à écouter depuis longtemps, il semblait avoir pensé qu’il était seul. J’étais alors désolé de lui apprendre que grâce à mes talents de furtivité, j’étais resté beaucoup plus longtemps qu’il ne le pensait. Je me décidais néanmoins à lui répondre avec franchise. A entendre cela, je détournais le regard et bégayais alors, amusé :

« Il se peut que j’écoute depuis plus d’une heure… »

Puis, il déclara ensuite qu’il jouait de la flûte en mémoire de sa grand-mère, il n’était pas dur de deviner qu’il avait dû la perdre il n’y a pas longtemps. Sa voix se brisa dans un sanglot. Je restais là, quelques secondes sans rien dire. Je fermais les yeux et pris une grande inspiration. Je pourrais le laisser là, mais cela me fendra le cœur, je devais faire quelque chose pour lui, l’abandonner serait la plus cruelle des choses.

Je me relevais alors, puis le pris dans mes bras avec douceur, non sans une certaine pudeur, trop s’étendre en sentiment était effrayant, mais commençais à passer ma main lentement sur son dos pour le calmer. On se sentait toujours mieux après une étreinte, en tout cas, moi, quand je me sentais à plat et fatigué, il me suffisait d’avoir un câlin de Ringo pour me sentir de nouveau sur pied. Puis, après quelques instants sans rien dire, je soufflai alors :

« Je suis désolé pour ta grand-mère mon garçon. Mes condoléances. Je connais ce que c’est de perdre un être cher et de ne plus savoir quoi faire. Quand j’avais ton âge, j’ai perdu mes deux parents. C’est dur, mais tu dois continuer à vivre, elle aimerait que tu continues de vivre ! Il faut être fort, c’est aussi ça, être un adulte ! »

Je me séparais alors du jeune garçon et reculait de trois pas pour lui laisser de l’espace pour respirer et faire le point. Je m’étais laissé aller à une démonstration d’affection paternel envers un parfait inconnu qui n’était même pas du clan, je n’étais définitivement pas aussi féroce que je le croyais. J’étais un être bien doux, où plutôt, assez fragile quant aux enfants, surtout quand ils pleuraient. Un chagrin d’enfant savait toujours me faire mal.

Je ne pouvais pas aider mieux le jeune garçon que cela, je ne pouvais pas le sauver de son deuil, il ne pouvait que se sauver lui-même. Je ne saurais même pas dire comment surmonter son deuil car j’étais toujours coincé à la dépression avec mon deuil et j’alternais parfois avec le marchandage. Il était clair que j’allais mon lot de cicatrices affectives que j’exhibais assez facilement… En dehors de cela, j’étais un être impitoyable et légèrement suprémaciste. J’étais pétri de contradiction et j’étais un être bien singulier. Mon dieu, quelle image je devais donner des Hyuga… Enfin, ce n’était pas plus mal, j’assumais mes émotions et mes sentiments moi, je ne me terrais pas dans un mutisme absurde. Il fallait assumer pour avancer.





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