Misfits trying to fit [PV Uchiha Akira]

Plus d’une dizaine de têtes à la chevelure d’ébène et aux tenues identiques arborant le symbole de l’éventail s’étiraient sur une longue ligne au rang serré. La posture droite, le torse bombé et le regard fixé sur le triumvirat d’hommes dans la force de l’âge les jaugeant d’un regard hagard de leurs pupilles vermeilles, analysant les forces et les faiblesses de chacun de leurs disciples. À l’aube, les membres du Clan Uchiha qui n’avaient pas encore atteint le rang de Jonin se rencontraient pour un entraînement visant à leur inculquer la discipline qui, de l’avis du clan Uchiha, manquait cruellement à l’éducation des Konoha-Jin. Reliques d’un passé si proche mais déjà oublié, les plus anciens se rappelaient l’importance de la chaîne de commandement qui avait contribué à hisser leur nom au sommet du monde Shinobi. Une place qu’ils refusaient de laisser derrière eux.

Au centre de ce rang, une tête de plus que la majorité de ses cousins plus débutants, Nikkou trônait au centre du peloton. Chûnin accompli aux faits martiaux déjà reconnu, sa présence était pourtant justifiée à plusieurs égards. Paria du clan Uchiha des années durant, ayant refusé de suivre la doctrine clanique au profit de ses propres idéaux, le ténébreux ninja avait dû se rendre à l’évidence que les enseignements de son clan étaient peut-être le seul salut possible pour lui et les siens. À un âge plus avancé que la moyenne, le Shinobi avait donc rejoint les rangs Uchiha avec une ferveur renouvelée pour l’art de ses ancêtres, à la plus grande satisfaction du Conseil du Clan. La supériorité de leurs préceptes avait été non seulement reconnue par l’un des disciples qui leur avait glissé entre les doigts, mais avait-il en plus su percer les terrifiantes arcanes du Clan qui étaient demeurées inaccessible aux éléments les plus prometteurs du Clan. Il demeurait pourtant que la loyauté aveugle inculquée aux plus jeunes dès leurs premiers pas était certainement plus difficilement assimilée par un Chûnin dans la force l’âge...

« Nikkou-kun. Restez quelques minutes, nous avons à vous parler. » ordonna Uchiha Ishida avant de disperser les troupes à leurs activités régulières d’un geste négligeant, pratiquement irrité. Chacun retournerait à leur équipe respective, qui, de l’avis de Ishida-san, représentait plus une simple distraction à la véritable voie Shinobi qu’une véritable opportunité de progression. La véritable voie shinobi résidait dans les enseignements du clan et il en allait donc de soi que l’allégeance de ceux en bénéficiant devait tout d’abord être réservée au Clan Uchiha, et seulement après au village de Konoha.   « Nous sommes satisfaits de votre progression, mais nous n’oublions pas l’épisode de Baransu…la Lance de Tiamat aurait pu servir les intérêts du Clan, ce que vous avez négligez. N’oubliez pas qu’en raison de votre retard dans notre éducation, vous devez servir d’exemple pour les plus jeunes. Agissez en conséquence. » prononça l’Ancien avant de se retourner sans attendre de réponse. Les paroles d’un senior du clan faisaient loi et aucune réponse n'était à propos.

Inclinant la tête en signe de respect, le Chûnin attendit que l’Ancien soit sorti du terrain d’entraînement pour quitter à son tour, les poings serrés de mécontentement. L’attitude d’Ishida-sama était typique de l’une des raisons pour lesquelles il avait fuit dès sa plus tendre enfance le domaine de son Clan. Une arrogance sans intérêt pour l’individualité de ses membres. Sur le chemin du retour, le ténébreux Uchiha laissa son regard parcourir les quartiers du domaine clanique qu’il avait évité toute jeunesse pour leur homogénéité immuable, fruit d’un traditionalisme exacerbé. Un bref instant, le Maître des vents se remémora la surprise fantasque des quartiers populaires lorsqu’il y avait déménagé après ses débuts comme Genin, empreint d’une architecture désorganisée aux formes disparates. Le plus marquant avait cependant été les couleurs bigarrées des quartiers non claniques, une bizarrerie pour toute personne originaire des quartiers Uchiha où même les gens arboraient une chevelure de jais agencée à des apparats au sigle de l’éventail.

De retour dans ses quartiers d’origine, Nikkou était de nouveau confronté à cette perte d’identité entourée de tous ces cousins ténébreux à l’allure d’éphèbe, lui rappelant sans cesse les origines de son propre pouvoir. Il n'était qu'un parmi tant d’autres, sans que personne ne soucie vraiment de celui qui arborait ce pouvoir. Et alors qu’il s’attardait un moment sur cette fatalité, il remarqua sur son chemin l’antithèse d’un Uchiha. Les cheveux argentés d’une figure lunaire qui se frayait un chemin avec une aise familière dans le domaine Uchiha démontrait qu’il s’agissait sans équivoque d’un membre du clan. Et, au vu de la dextérité avec laquelle il se déplaçait, il était probablement versé dans les arts shinobi. Ce qui éveilla d’autant plus la curiosité du ténébreux Uchiha.

 « Excuse-moi…mais je ne me souviens pas t’avoir déjà vu aux entraînements du Conseil. » l’interpela Nikkou dans la rue, à l’écart des passants, curieux de la raison pour laquelle ce jeune shinobi était lui exempté des enseignements du Conseil. Après tout, seul les Jonins reconnus formellement par le Village et par le Clan en étaient exemptés. Intrigué, il savait pertinemment que son devoir premier envers le Clan lui demandait d’investiguer et de rapporter toute désobéissance. Mais il devait avouer qu’il n’était pas sans intérêt pour toute opportunité de reclâmer sa liberté…ou pour rencontrer un marginal au sein de cet océan d'uniformité.  « Je suis Uchiha Nikkou, Chûnin. Ton identité? » demanda le shinobi en guise de formalité, sachant pertinemment que son titre lui donnait l'autorité nécessaire pour s'enquérir de telles informations.

Le malaise de l’Uchiha aux cheveux argentés était palpable, visiblement incommodé par l’imposition impromptue de son senpaï. Un comportement étrange, voire même curieux, dans ce domaine rempli d’égos démesurés et le plus souvent déplacés. Depuis son introduction aux différentes sphères du Clan, Nikkou avait dû se faire à l’idée qu’il n’y avait pas de place à l’amabilité. Les rapports au sein du clan étaient ainsi définis en raison de l’orgueil clanique des Dragons Uchiha et la moindre once de respect devait être gagnée.

La voix cassante du jeune Genin semblait pourtant laisser croire qu’il n’avait pas encore su déployer les mécanismes mentaux susceptibles de préserver son estime de soi dans ce clan psycho-rigide. L'image timide de son interlocuteur lui renvoyant le reflet de sa propre jeunesse où sa sensibilité et son affabilité l’avaient écarté de la moindre considération de la part des autres membres du clan. Loin d'être créduble, Nikkou avait compris que seul le développement de Sharingan lui avaient permis d'obtenir la moindre place au sein du clan.

 « Ravi de te rencontrer Akira-kun. » salua le Chûnin en hochant brièvement la tête avec un bref sourire, image terne de la personne qu’il avait été quelques années plus tôt. Aujourd’hui, drapé des robes noires de son deuil qu’il avait toujours refusé de retirer, Nikkou avait laissé mourir ce passé attendrissant pour se forger à l’image la plus proche du pouvoir qu’il connaissait. Uchiha jusqu’au bout des ongles, dans sa démarche crispée rappelant son éducation militaire jusqu’à ses gestes secs, plus appropriés pour combattre que pour la vie de tous les jours. Pourtant, l’image de ce cousin dépourvu de l’aura ténébreuse des leurs le ramenait à son passé, assouplissant sa posture et calmant la tension létale qui accompagnait chacun de ses gestes. Comme s’il avait enfin le luxe de se décontracté en présence d’un membre de son clan atypique. À la mention du père d’Akira, le coeur du Chûnin se serra.

 « Et comment espère-t-il que tu sois prêt à poursuivre plus loin ton entraînement s’il baisse les bras? » s’indigna alors le Uchiha à la mention de son entraînement avorté. Au moins ses propres parents, tous deux genins sans exploit ou ambition, lui avaient donner toute la liberté nécessaire pour apprendre à voler de ses propres ailes. À l’époque, il s’était considéré chanceux d’être ainsi épargné de l’attention du Conseil et ce n’était que plus tard qu’il avait pu faire le choix conscient de sacrifier une part de lui au profit de la doctrine Uchiha.

 « Le jugement de ce Clan est toujours aussi difficile envers les plus jeunes…je n’ai rejoint les entraînements du Conseil que récemment, et je suis certainement l’un de leurs plus vieux disciples. Plus jeune, on me trouvait indigne des enseignements du Clan et subitement, ils m’ont trouvé un intérêt » partagea le senior, espérant qu’une bride de son passé suffirait à donner quelques espoirs à son cadet. Le ténébreux shinobi ne pouvait certainement pas comprendre entièrement les sentiments qui habitaient Akira. Quand on lui avait refuser tout intérêt, Nikkou s’en était félicité, faisant sa vie à l’extérieur du domaine Uchiha et jouissant de la liberté qu’il avait toujours tant souhaitée. Il n’avait jamais cru bon de regarder à l’arrière. La décision du Conseil d’ignorer jusqu’à son existence n’avait jamais été source de regret ou d’envie, mais au contraire un cadeau que Nikkou avait chérit.

 « Très bien Akira-kun, je te retiendrai pas plus longtemps. » salua-t-il en hochant la tête de contentement. Le code du parfait Uchiha mettait en priorité l'entraînement et il aurait été impoli de ne pas reconnaître les efforts louables de l'un de ses cousins. Ils étaient, après tout, toujours en territoire militaire.  « Cependant, j’allais m’arrêter manger un morceau chez Hirako Ramen. Tu es le bienvenu si jamais tu penses qu’un bol de ramen te donneras des force pour ton entraînement et m’excusera pour le retard que je t’ai causé dans celui-ci. » surenchéri-t-il d’un ton aimable, une rareté dans ces quartiers ou la force et l’arrogance régnaient en maîtres. Il savait mieux que quiconque que les rencontres fortuites étaient l'occasion de redéfinir son destin. Après tout, était-il devenu shinobi et avait dédié ses efforts à forger son style de combat après avoir rencontré ses coéquipières à la sortie de l’Académie. Où serait-il sans elle aujourd'hui? Même lui n'osait l'imaginer.

Le Chûnin esquissa un sourire presque imperceptible lorsqu’Akira manifesta son allégeance première pour Konoha. Dans cette enceinte peintes du symbole de l’éventail, de telles paroles étaient synonymes de parjure. Depuis leur plus jeune âge, les Uchiha apprenaient qu’il était avant tout et contre tout Uchiha, fiers d’un nom qui transcendait leur simple ascendance pour entrer dans la légende. Endoctrinés de la sorte, il était sans appel que leur loyauté revenait au Clan de facto et par extension seulement au Village.

Cependant, pour Nikkou qui avait grandi à l’extérieur du joug du Conseil, refusant la voie tracée pour ses cousins et devenu Shinobi seulement par amitié envers d’autres Konoha-Jin, l’expression de son cadet lui apparaissait comme un souffle d’air frais. Après tout, n’avait-il pas rejoint les rangs Uchiha pour dompter le pouvoir de protéger Konoha? Entretemps, peut-être cependant s’était-il perdu dans l’obédience Uchihesque…

En ces jours plus sombres, le petit rictus affable, étranger à l’image froide du ténébreux, apparaissait comme une lueur d’espoir, petite victoire sur ses démons qui couvraient toujours d’engloutir sa personne. Le jeune homme s’arrêta cependant à ce sourire presque indistict. De par sa nouvelle appartenance au clan et son statut encore précaire, il aurait été présomptueux de croire qu’il pourrait se permettre d’ajouter mot sur sa position à ce propos, mais au moins avait-il eu la chance de voir qu’il n’était pas le seul à faire preuve d’un peu de critique.

L’invitation lancée, il anticipait de voir le Genin retourner à ses occupations, simplement perturbé par l’intérêt qu’un sempaï inconnu puisse lui porter. Pourtant, visiblement, Nikkou n’était pas le seul à trouver quelqu’intérêt dans les propos de son interlocuteur. Les deux Uchiha à la même croisée des chemins, s’orientant pourtant dans des routes opposées, laissant à l’autre sa place sur le chemin désormais abandonné de leur passé.

 « Pourquoi? Parce que j’ai dû me rendre à l’évidence visiblement…j’ai choisi de suivre mon propre chemin, envers et contre tout. Et le résultat? Ça ne m’a laissé voir que mon ignorance et ma faiblesse. » répondit-il d’une voix éteinte à la colère enflammée de son cadet, un trémolo mélancolique dans la voix. Le visage de ses coéquipières lui revenait sans cesse à la mémoire, source de motivation et de désespoir, qui justifiait cependant tous les sacrifices qu’il avait fait jusqu’à présent.  « Rien n'est jamais vraiment oublié. Je demeure sûrement à leurs yeux indigne de leur précieux Kekkei Genkai. Et de mon côté, je ne serai jamais l’un de leurs fidèle soldat. Mais il faut parfois savoir mettre de côté son orgueil. » Étranges paroles de la part d’un Uchiha, créatures d’égo et d’orgueil porteuses d’un narcissisme multigénérationnel, prêtes à se laisser périr plutôt que d’avouer leurs tords. Mais s’il y avait bien une tare dont le shinobi n’avait pas héritée de sa famille dégénérée, c’était celle de cet orgueil. Une vie forgée d’erreurs et de déceptions avait le bienfait de vous rendre modeste…

Un bref instant, Nikkou reconnu sa verve de jeunesse, défendant mordicus les idéaux sur lesquels avaient reposé toute sa conception de la vie, jusqu'à ce qu'il réalise l'inévitable.  « Parce que la cruauté de ce monde a tôt fait de nous rattraper…et crois-moi, la voie shinobi est bien plus impitoyable que ce que laisse entrevoir les murailles de Konoha. Au final, on peut dire ce qu’on veut sur notre Clan, mais au moins a-t-il toujours été honnête. Il fallait simplement l’écouter. » laissa-t-il plané comme une fatalité, maudissant d'avoir été trop borné pour l'écouter. Et si dès son plus jeune âge il avait accepté les enseignements de son clan? Si dès à son entrée à l’Acaédmie il s’était versé corps et âme dans son entraînement? S’il avait acceptait plus tôt la cruauté du monde et avait laissé le pouvoir du Sharingan le consumé plus tôt? Mais avec des si, on ne refaisait pas un monde.

 « Je n’étais sûrement pas si différent de toi il y a quelques années. J’étais sûrement bien plus naïf que toi en fait. Je vivais de préceptes et de bons sentiments, mais ça m’a coûté cher...beaucoup trop cher…» La voix du shinobi se brisa un instant, étouffée par la peine et la douleur de l’échec qui l’envahissaient. Lui qui avait rêvé un instant changer le monde shinobi, accompagné des seules personnes ayant véritablement comptées dans sa vie. Il était désormais seul sur une pile de corps dont il avait perdu le compte, mais dont les premières portaient le visage de celles qu’il n’oublierait jamais… « Et finalement tout ça pourquoi? Parce que je voulais me sentir accompli et épanoui? Le respect et l’altruisme…tout ça ne vaut plus rien quand des vies sont en jeu. Peut-être pour d'autres personnes, mais pas pour les Ninjas. Il n’y a que la vie et la mort pour nous. » répondit-il en sautant sur l’occasion pour laisser paraître une once de cette véhémence qui lui avait coûté une partie de sa santé mentale au profit d'un pouvoir maudit, finalement emporté à son tour par la conversation. Les poings serrés sous le coup de l’émotion, il se maudissait d’avoir fait le choix évident à l’époque sans en connaître les modalités et conséquences. Il avait choisi la vie, sans savoir que la frontière avec la mort était si mince. Et que cette frontière portait le doux nom de Pouvoir.

Le Chûnin reconnu rapidement l’héritage du clan Uchiha chez Akira. Une colère tempêtueuse, grondant sous le couvert d’un contrôle qui menaçait de craquer. La source du pouvoir de ce Clan maudit. Peu importait la raison ou la justification. La colère les habitait tous, guidant chaque membre du clan dans la conquête de leurs seuls objectifs. Uchiha Madara avait préféré se laisser consumer par sa colère plutôt que de se soumettre à la dominance d’autrui. Nikkou avait quant à lui accepté de sacrifier sa vie pour obtenir la force nécessaire de venger la mort de ses pairs. Et maintenant ce jeune Genin, empourpré dans sa colère envers le Clan qui l’avait privé de l'innocence de sa jeunesse.

 « Je suis désolé pour ton père et ce qu’il t’a fait subir. » prononça le ténébreux Uchiha en hochant de la tête en signe de sympathie, essayant d’apaiser la colère qui transparaissait du comportement d’Akira. L’histoire du Genin avait des allures de tragédie et il pouvait comprendre sa réaction en opposition. Mais la véritable erreur aurait été de laisser le reste de sa vie guidée par cet événement. Comme lui-même avait fait pendant si longtemps…  « Mais on a tous nos malheurs, alors ne prétend pas être ne mesure de juger la voie empruntée par autrui. Une vie difficile. Un mort. Dix morts…ça ne te donne pas et ne te donnera jamais pas le droit de juger la voie empruntée par autrui. Tu ne sais pas ce qu’il y a dehors ou ce qui t’attend. Personne ne le sait. Ce monde a le don de faire preuve d’une cruauté que nul ne peut anticiper. » Le ton plus dur, Nikkou opposait à la colère hardante de son interlocuteur un calme froid et sec, coupant de son tranchant effilé les effluves émotives de la conversation. Nikkou ne prétendait pas à la sagesse , mais au moins avait-il l'humilité suffisante pour savoir qu’il ne savait rien. Il n’y avait rien de plus dangereux qu’une personne persuadée par sa seule vérité.

 « Nous portons tous un fardeau. Contrairement à toi, j’ai choisi de vivre ma vie comme je l'entendais, loin du militarisme des Uchiha. J’ai choisi d’habiter à l’extérieur de ce domaine pour vivre ma vie comme je l’entendais, en refusant de me plier aux désirs et attentes du Clan. J’étais un bon ninja, sans autre prétention. J’avais des amis. Une copine. Ma propre vie…le résultat? Ils sont tous morts dans une mission. Un véritable carnage. Tout ce que j’avais bâti envolé en quelques secondes… » avoua-t-il la voix tremblante de retenue en réponse à l’histoire du jeune Akira, peinant à contrôler le flux des émotions qui l’assaillaient. Deux histoires diamétralement opposées, mais dont il subsistait le même résultat. Deux jeunes Shinobi à l’âme écorchée et à la vie à jamais calomniée. Il n’y avait aucun point de retour pour l’un comme pour l’autre. Les blessures de leur passé encore à vif, leur rappelant sans cesse contre quoi ils devaient continuer de se battre.  « Évite cependant de me sermonner. Tu n’as certainement aucun droit de me juger et encore moins la faculté de le faire. Il n’y a rien de facile à se sacrifier pour se donner le moyen de ses ambitions. J’ai vu et reconnu les faiblesses de la voie que j’avais empruntée et j’ai préféré me donner les moyens d’y pallier plutôt que de m’en contenter, même si ça m’a coûté cher. Crois-moi il faut bien plus de courage que tu ne le crois pour revenir en arrière. » Les mots du Chûnin claquèrent avec une nouvelle force, sans autre compassion pour son interlocuteur un peu trop prompt au jugement pour lui. Le regard acéré du ténébreux Uchiha se planta avec une nouvelle sévérité dans celui du Genin, visiblement désenchanté par la condescendance avec laquelle Akira se permettait de le réprimander.

 « Descend de tes grands chevaux et ait un peu plus d’humilité avant de juger un Clan entier. Tu n’es pas en position de faire la morale à un Clan qui a réussi à survivre dans l’ancien monde. » le confronta-t-il d’une voix sèche. Il fallait le remettre à sa place. Lui faire prendre conscience des prétentions disproportionnées de ses paroles et de son entêtement néfaste non seulement pour lui-même, mais pour les autres.  « Tu le dis toi-même, tu as connu la sécurité de ces murs. Mais avant leur création, les Uchiha ont dû faire front et assurer la survie de ses membres. Pour survivre, ils ont jugé que la puissance et la discipline étaient nécessaires pour défendre l’intérêt du plus grand nombre de membres du Clan. Leur mode de vie s’est basé sur ces préceptes et peut-être qu’ils ont pris des proportions militaires à revoir, mais c’est grâce à eux que le Clan a survécu et le moins que tu puisses faire c’est de les respecter. C’est grâce à ces doctrines que tu bénéficies des opportunités que tu as aujourd’hui. » le sermonna-t-il, confrontant l’absolutisme tranché du discours d’Akira avec une pointe de pédagogie. Certes, le discours d’Akira était louable, mais encore fallait-il qu’il reconnaisse qu’il demeurait, du moins à ce stade, encore au stade de la bonne volonté et non de l’accomplissement. Cracher sur les autres doctrines ne l’amèneraient à rien, si ce n’était à se retrouver devant une opposition qu’il ne pourrait pas surmonter. Pire encore, il risquait de passer outre le bénéfice des leçons à tirer de l’histoire.

 « Mais peut-être bien que ces doctrines ne sont plus d'actualité, et peut-être même as-tu un début de réponse, mais tu n’es certainement pas la vérité incarnée. Au lieu de cracher sur les enseignements qui te sont offerts, ouvres-toi et apprends. Tu te prives de leçons importantes en préférant dénigrer le travail des autres pour donner une valeur seulement à tes propres croyances. Prends ce que tu penses être utile et laisse de côté ce que tu crois être inutile, mais offres-toi la chance de progresser. Au lieu de rejeter vertement ces doctrines, essaie plutôt de tendre vers notre évolution. » Après tout, c'était sur la base des sacrifices du passé et des leçons qu’on en avait tirées que le Village de Konoha avait pu être fondé. Un lieu où on avait mis à profit tant la puissance des Uchiha que la sagesse des Senju, mais également la noblesse caractéristique des Hyûga et le sérieux méthodique des Aburame ou encore la bonhommie du Clan Akimichi. Si l’incorporation des clans demeuraient encore à désirer, elle avait été faite de manière étanche, laissant les enseignements des uns se transmettre aux autres pour donner naissance à une nouvelle doctrine. La Volonté du Feu.

Le regard hagard, plein d’une haine qu’il connaissait trop bien, était plus difficile à supporter pour Nikkou que la verbe crachée à son visage. Le discours d’Akira résonnait en écho avec un hymne bien trop connu à l’intérieur de ces murs. Les notes d’une colère millénaire vibrant au rythme des battements de coeur de tout Uchiha. La mélodie maudite du Clan à l’éventail. Et cette colère de transpiré de tous les pores de son cadet, le corps tendu dansant au rythme de cette berceuse qu’on imposait dès le plus jeune âge aux membres du clan au regard écarlate.

« Écoute-toi, à brandir à tout vent tes valeurs et tes idéaux et à juger sans autre considération la voie choisie par d'autres. L’autoristarisme et l’égocentrisme de ce clan que tu répugnes, viennent de personne comme toi, toujours certains d’avoir la vérité absolue et refusant de comprendre les choix difficiles imposés par la vie. » prononça le Chunin d’un ton désabusé, répugné de voir que déjà à cet âge le Genin aux cheveux d’argent pouvait prétendre avoir saisi la vérité forgée par les histoires sanglantes du Sekai.

« Reviens sur terre, il n’existe pas de solution unique ou de bonne vision du monde. Nous sommes confronté à des choix difficiles, qui requièrent des décisions difficiles. Et brandir la bannière de tes idéaux à tout vent démontre une seule chose: ton incompréhension de la réalité humaine. » Les paroles de l’éphèbe étaient devenues plus acerbes, crachées au visage de son interlocuteur avec la force d’une gifle pour le réveiller de ce rêve éveillé qu’il entretenait. S’il y avait une chose que le Chunin ne supportait pas, c’était bien l’absolutisme proclamé par quelques moralisateurs emprunts de la soi-disante vérité absolue.

« Es-tu si niais que tu ignores la réalité du monde shinobi? Du haut de tes grands chevaux tu dénonces les assassins et les tueurs d’enfants…mais t’es tu récemment regardé dans le miroir? Tu es un Ninja. Un enfant entraîné dès son plus jeune âge pour devenir une machine à tuer. Et tes ennemis sur les champs de bataille seront d’autres Genins. D’autres enfants envoyés à la guerre. » La situation en aurait pratiquement été risible. Ce Genin, interdit même de mettre les pieds hors du village, qui proclamait l’abolition des temps anciens, sans comprendre qu’ils étaient toujours en guerre. « Tu parles avec tant de véhémence contre les temps « anciens », alors qu’ils sont encore présents. Comme si la puissance ne valait plus rien à notre époque et que nous vivions une période de paix. As-tu simplement conscience des guerres et conflits qui perdurent dans le Sekai? Je t’en pris, si tu es capable d’arrêter l’expansion des clans limitrophes qui menacent Konoha, interviens dès que possible. Peut-être es-tu plus apte à empêcher le prochain attentat d'un Konoha-Jin avare sur un jeune Uchiha pour vendre sur le marché noir notre Kekkei Genkai. Encore mieux, si tu crois être capable d’empêcher l’Empire de Tetsu de commettre un autre massacre comme Baransu sans effusion de sang, prend le poste d’Hokage. » Les propos du guerrier frôlaient l’insulte, diminuant sans vergogne les propos naïfs d’Akira pour lui rappeler la dure réalité à laquelle lui et ses frères d’arme étaient confrontés à l’extérieur des murs de Konoha derrière lesquels il avait le privilège d’habité. Il avait vu ls horreurs de la guerre, la terreur ds habitants de Baransu et il avait comprit rapidement qu'avec un pouvoir tel que les siens, une responsabilité aussi conséquente était imposée.

« Nos dons héréditaires et le savoir ancestral du clan ne sont pas nos seules armes, mais elles ne sont pas négligeables. Et j’ai choisi d’user de tous les avantages qui m’étaient offerts pour servir mes intérêts, sans préférence ou distinction. Je me suis donné les moyens de mes ambitions. Et ce n'est pas ton jugement gratuit qui ébranlera mes convictions. » Un demi-sourire aux lèvres, Nikkou secoua la tête de droite à gauche, découragé par la tournure de cette discussion et de la véhémence des propos de ce curieux Uchiha à l’allure lunaire. « Tu n’es pas mieux que ceux dans ma jeunesse qui m’ont critiqué pour avoir choisi une autre voie et m’ont traité de faible pour avoir tourné mon dos aux enseignements du clan. La seule différence, c’est que tu n’es pas la voix dominante. Mais à t’entendre…tu veux simplement imposer une nouvelle forme de jugement. » conclua le Champion du Peuple des Ours, découragé par la colère de ce jeune Uchiha qu’il aurait espéré être différent des autres membres du clan. Mais il était jeune, plein d’idéaux qui disparaissaient souvent avec l’âge et qui pourtant pouvaient agir comme catalyseur de changement pour ce monde endigué dans ces moeurs sanguinaires.

« Regarde-toi en ce moment. Plus Uchiha qu’Uchiha. Plein de colère et de hargne. À t’emporter et à serrer les poings parce que la vision d’autrui te déplait. À me traiter de faible et d’idiot parce que je ne correspond pas à tes idéaux. » déclara-t-il d’un calme olympien malgré les insultes lancées à son visage, préférant éviter la confrontation pour favoriser une discussion éclairée. Contrairement aux autres membres de son clan, Nikkou répugnait l’orgueil et préférait consacrer ses efforts des sentiments plus charitables.  « Peut-être n’est-il pas trop tard pour toi. Peut-être seras-tu capable de te départir de cette haine pour de meilleurs sentiments. Et peut-être seras-tu capable alors de véritablement apporter un changement positif dans le Clan. Mais pour l’instant, tu n’es pas mieux que ces tortionnaires qui m’ont ridiculisé dans ma jeunesse. » [/b][/color]soupira-t-il devant la malédiction qui incombait à tous les élus aux yeux de sang du Clan Uchiha. Lui-même entretenait une colère viscérale contre l’injustice de monde. Un appel à la haine qu’il arrivait difficilement à contrôler. Peut-être aurait-il été autrement s’il n’avait pas éveillé le pouvoir du Sharingan, mais il ne pouvait maintenant refuser le dernier cadeau offert par le sacrifice de ses alliées.

D’un simple soupir, le Maître des Ours laissa échapper la ferveur de sa verve acerbe, refusant d’alimenter les feux de la colère d’une arrogance qu’il aurait su mal avisée. Peu lui importait d’avoir la voix de la raison. Et encore moins de clamer victoire sur son plus jeune cousin. Il n’était pas assez Uchiha pour ça. De ses pupilles carmines, il appréciait les nuances de gris de ce monde en perdition qu’on tentait toujours de lui décrire de blanc immaculé et de noir abyssal.

La jeunesse avait-elle au moins cela de bon qu’elle ne pouvait qu’avancer par rapport à leurs prédécesseurs, les avancements de ces derniers rien d’autre que les assises de leur monde. Et voir la prise de réalisation du Genin éclairer sa vision du monde d’une nouvelle route jusqu’alors inconnue était une douce vue pour Nikkou. Peut-être que leur clan n’était pas voué à la perdition. Et si par quelques remontrances il avait su brouiller les repères manichéens d’Akira, il pouvait se compter chanceux. D’autres plus jeunes auraient refusé toute critique, se confortant dans leur opinion en réponse aux clashs des idées.  

« Akira-kun, ta voie ne disparaitra pas. Déjà, tes excuses et ta prise de conscince me laisse croire que tu sauras ta voie saura s’adapter et te permettre de franchir l’insurmontable. » encouragea-t-il d’une voix plus douce, comprenant que le jeune Uchiha avait besoin peut-être simplement d’un appui supplémentaire. Nikkou ne savait que trop bien la cruauté de ce clan et leur paradigme violent tentant d’écraser les voix plus faibles.

« Tu n’as ni droit d’exister ou de ne pas exister. Ce n’est pas un droit que l’on t’octroie ou un privilège que tu dois gagner. Tu existes et tu as ta place en ce monde, peu importe ce que les autres en pensent bien. Uchiha ou non. » en disant cela, le Chûnin fit preuve d’une humanité souvent oublié dans ce domaine forgé de tradition millénaire et décorum militaire, posant sa main droite sur l’épaule de son jeune cousin. La main rassurante était pleine d’une vigueur qui contrastait avec la langueur d’Akira dont les démons ressurgissaient alors que la passion de sa colère s’étiolait. Le geste somme toute anodin était un appui ferme pour le Uchiha aux cheveux d’argent. Un simple rappel que même un nouveau venu pouvait voir en lui une personne qui méritait d’être supporté.

« La première et unique personne dont tu dois obtenir le respect et l’acceptatio, c’est toi Akira. Laisse-les croire et se vanter de leurs fables des terribles Dragons Uchiha au souffle infernal et aux griffes acérés…un jour ils n’auront d’autres choix que de se détourner de leurs rêves éveillés et d’accepter la réalité. Et alors, il n'auront d'autre choix que de reconnaître leur valeur...et sûrement avec un petit pincement à leur orgueil surdimensionné. » Il ne savait que trop bien l’effet pervers de ce clan aux idéaux mégalomanes, où seule la puissance était digne d’être mentionnée. Il les avait vécu lui-même et en gardait pour preuve quelques brûlures sur ses avant-bras, souvenirs d’entretiens peu recommandés avec l’Ancien du Conseil connu comme le Dragon du Clan Uchiha. En contrepartie, celui-ci devait vivre avec une cicatrice nette et effilée sur le visage, marque irréfutable de la puissance du Fûton. Une injure qui avait pourtant su calmer ses ardeurs.

« Ce que je retiens de notre rencontre Akira-kun, ce n’est certainement pas une quelconque faiblesse. Je vois un jeune Genin qui avance à son rythme et qui forge sa propre voie, et crois-moi c’est tout sauf de la faiblesse. Les génies l’ont faciles, ils n’ont aucun crédit. Toi, tu as le potentiel de te démarquer par des actions et un cœur vaillant. Ne néglige pas cette opportunité » dit-il en secouant légèrement l’épaule qu’il tenait de sa main droite pour attirer l’attention d’Akira loin des doutes et des démons qui l’assaillaient pour lui offrir un sourire chaleureux. Même les Ninjas avaient besoin d’un peu de réconfort. « Et tu n’as pas à être désolé. Je retiendrai de cette rencontre un souvenir agréable. Enfin la chance de rencontrer un autre Uchiha qui sort un peu du modèle conventionnel. » Et l’occassion de se rappeler que lui-même n’était pas à l’image du guerrier modèle qu’il s’évertuait à atteindre. Qu’il ne l’avait jamais été et qu’il ne le serait jamais. Pour son plus grand salut.