Prison de lumière [entraînement] Le démesuré Kamiko naviguait entre les rayons de la bibliothèque de Konoha, un air contrit sur le visage, sans sourire, il cherchait, manifestement, un rouleau précis. De fait, le jeune bibliothécaire qui le suivait – réquisitionné par le jeune Fumetsu avec scandale, le tirant d’une conversation fort intéressante avec une femme dont les atours servaient davantage à la récolte d’informations qu’à son ego personnel -, paraissait tout autant affecté que le jônin. Visiblement, il manquait à l’appel alors qu’il était indiqué comme disponible sur les grands feuillets d’inventaire. Fort contrarié, le Kamiko continuait ses recherches comme il le devait, obsédé par cette technique dont il avait vu les prouesses lors d’un entrainement dont il avait été témoin par pur hasard. Il s’agissait d’une prison lumineuse, fixant l’ennemi au sol, dans trois cercles concentriques. Cette vision de rêve s’était aussitôt terminée avec la fin de la démonstration, et le maître envolé avant que Fumetsu puisse l’interpeller sur une telle pratique. Enchanté, alors, par sa découverte hasardeuse, il s’était dépêché de rejoindre la bibliothèque de l’Académie, espérant trouver son bonheur. Malheureusement, le voilà condamner à chercher, parmi les centaines de milliers de rouleaux, le fruit de sa nouvelle obsession.
Un grand cri de soulagement interrompit la lecture de quelques badauds et autres shinobis en quête de connaissance et de savoir : le parchemin en question avait été retrouvé par le pauvre bibliothécaire, qui, dans ce même cri, signifiait sa joie de ne pas avoir perdu un tel bien autant qu’il signifiait sa joie de ne plus être sous la coupe d’un tel tyran. Empressé de feuilleter le rouleau, le Kamiko arrachait des mains ce divin présent, remerciant à demi-mots l’homme, inscrivit son nom dans un long registre d’emprunteur et courait se réfugier, en liseré du village, dans son domaine favori : sa serre.
Ainsi, installé en-deçà d’une multitude de bougies, il lisait le parchemin de bout en bout, analysant les composants nécessaires à une telle technique ; un corps à corps obligatoire, un système de barrière matérialisée par trois cercles concentriques, une interdiction de s’en échapper (et lui, et son ennemi), aucune technique ne pouvait la traverser sauf quelques-unes permettant de rompre le sceau. Haussant un sourcil, il s’intéressa davantage à la manière de rompre l’enchantement : la puissance brute, la mort de son utilisateur (ou le rendre inconscient), une technique influant un chakra suffisamment violent pour perturber le sceau. Les bases même des effets, prérequis et autres aspects contraignants s’éclaircissaient, donc, au fur et à mesure de la lecture. Cependant, une large difficulté faisait son apparition : les sinogrammes du sceau restaient à être déchiffrés, domaine dans lequel le Kamiko était plus que médiocre. Rassemblant, alors, ses connaissances éparses (autant dans son esprit que matériellement, il s’était éclipsé un instant afin de retrouver ses quelques manuels de synographie et traitant des sceaux), il s’installait plus confortement sur un large établi, juxtaposant les dessins de la technique et l’alphabet – ainsi qu’une grande batterie de bouquins sur les significations mystiques de la graphie alambiquée.
Le soleil déjà couché depuis un long moment déjà, il ne relâchait pas son labeur, arrivant au terme du déchiffrage des sinogrammes. Les trois cercles révélaient, alors, leur signification intrinsèque : le premier, le plus éloigné, représentait l’âme spirituelle, attachée, ainsi, à la terre lors de la création du lien ; le second, au milieu, signifiait le corps, l’ancrant, de la même manière, dans ce plan d’existence ; le troisième, au centre, stipulait les liens, impénétrables, liant les deux individus entre eux, dans cette prison. Satisfait de cette première étape, Fumetsu s’endormait de fatigue, repoussant, ainsi, son apprentissage pratique – après la théorie emmagasinée – au lendemain.
Prison de lumière [entraînement] Se réveillant douloureusement, gêné par les rouleaux et autres livres étalés sur la table, il avait meurtri sa joue gauche ; de même que son dos, mal calé sur la chaise, lui rappelait qu’une bonne posture était primordial pour ne pas souffrir inutilement. Redressé, alors, son enthousiasme nullement entamé par le manque de sommeil et les légères meurtrissures que lui procura cet interlude nocturne, le jeune Kamiko s’étirait de tout son long, tel un souple félin. L’heure était à la pratique, l’heure était à la mise en œuvre de l’art des sceaux dans toute sa splendeur. Légèrement embêté, cependant, par le manque de main-d’œuvre à disposition, il allait devoir composer avec sa propre intelligence afin de savoir si, oui ou non, il avait réussi son coup.
La première étape de la mise en œuvre pratique de cette technique, Isshi Tôjin – il avait finalement appris le nom de celle-ci par hasard, déchiffrant les sinogrammes -, résultait d’une simple combinaison de mudras savamment combiné permettant une inflexion du chakra à travers son corps pour l’ancrer, profondément, dans son corps et dans les alentours, scellant l’endroit. Le vecteur principal n’était pas réellement ces mudras, ni même un coup de pied dramatique voire une phrase tonique et mirobolante, il s’agissait d’une simple présence. La seule présence de cette ancre, l’utilisateur, suffisait à emprisonner son adversaire dans une prison inextricable, ne pouvant en sortir hormis en y payant le prix effrayant. Quelque part, le Kamiko savait pertinemment qu’il serait malavisé d’user d’une telle technique face à un spécialiste du corps-à-corps… Soupirant – et après avoir dégagé un espace dédié à la pratique -, il se mit en position. Mudras, inspiration, libération. Ni marques, ni sinogrammes, ni cercles concentriques… Un échec. Il retentait, préparant davantage de chakra qu’il ne l’avait fait précédemment : un nouvel échec. Il changeait, cette fois-ci, le rythme de ses mouvements : un autre échec. Il ajoutait un coup de pied théâtral : néant. Un cri sauvage : rien.
Gâchant plusieurs heures dans un entraînement inutile, il comprit enfin, dans une grande exclamation trahissant sa surprise – et la rage de se considérer comme idiot, sur le coup : il lui fallait, évidemment, un ennemi à lier. Souriant, laissant échapper un rire presque dément, il partait en quête d’un cobaye. Après un petit moment passé hors de son antre, à marchander avec untel ou untel Kamiko, il avait fini par réussir à en amadouer un, usant de ses talents de persuasions les plus convaincants : l’argent. Après cette négociation fort bien menée, Fumetsu pu se concentrer, de nouveau, sur la bonne conduite des opérations : la réussite de sa prison de lumière. Le cobaye volontaire s’était placé, un air ennuyé (mais dont l’esprit tout entier était voué à la promesse pécuniaire), face à l’homme drapé dans son shihakusho blanc. Ce-dernier, souriant, pu, dans un souffle, véhiculer son chakra de manière plus efficace, établissant le lien nécessaire entre l’utilisateur et sa victime, relâchant la pression, contractant l’air autour d’eux : rien ne se passait. L’air stupide de sa main d’œuvre exaspérait profondément le médecin aux sombres secrets, si bien qu’il faillit le gifler. Recommençant, ne décortiquant plus les étapes, préférant s’intéresser au lien entre les trois cercles : l’âme, le corps et la prison. Chaque mudra correspondait à un cercle, ainsi se fit la réussite, réussissant à établir une connexion (aussi laborieuse fut elle) entre son cobaye et lui, il créa, ainsi, trois cercles à la signification évidente pour un érudit – ou un homme ayant passé une nuit entière à les traduire -, emprisonnant les deux hommes en leur centre. Jubilant, Fumetsu avait enfin compris les intrications, et subtilités, de cette technique.
« Maintenant on fait quoi ? »
Le tirant de ses joyeuses célébrations, cette phrase dénuée d’intelligence venait rappeler le Kamiko vêtu de blanc sur terre. D’un haussement d’épaule, il l’assommait, rompant le lien les unissant. Il n’aurait pas à le payer, somme toute…