Le calme de l’extrême ouest de la forêt du Hi no Kuni n’était dérangé que par le froissement des feuilles provoqué par le corps en mouvement du Shinobi. Uchiha Nikkou fusait à toute allure au travers des terres de sa contrée, pressé par le message laissé à son attention à la demeure Uchiha par son Senseï. Une simple note le convoquant à un entraînement spécial pour la journée avec le Moine Guerrier dans les recoins reculés des terres du pays du feu.
Nul autre besoin d’une quelconque explication, le Shinobi s’était empressé de s’élancer dans la direction indiquée, intrigué par cet entraînement requérant qu’il se déplace si loin des terrains d’entraînement usuels. Peut-être que l’entraînement à ce Ninjutsu requérait un large emplacement plus large que ce que Konoha Gakure avait offrir. Déjà, Nikkou s’imaginait les ravages causés par une tornade ou autre cataclysme orageux dont seul Sora-san avait le secret.
À pleine vitesse, le Ténébreux approchait à vive allure du lieu de rendez-vous, ne laissant qu’une trainée d’ombre éphémère à ses arrières. Sans avoir recours à ses facultés claniques, il pouvait déjà apercevoir les abords de la clairière indiquée par son Senseï dans sa note. D’un dernier bond, Nikkou s’élança alors en direction de l’endroit le plus clairsemé pour entrer dans la clairière…
« Ahhh » gémis-t-il de douleur alors que son corps fut arrêté dans son élan par un couperet effilé lui infligeant une sanglante coupure au niveau de l'abdomen. Reculé de quelques mètres, le Uchiha porta instinctivement sa main à son estomac, la tunique noir qu’il arborait à toute occasion poisseuse de sang.
En alerte, le Chûnin dirigea son regard vers l’entrée de la clairière afin de déceler l’origine de l’impact. Aucune trace d’ennemi ou d’un fil de fer posé en guise de piège. Il n’avait pas non plus entendu le moindre indice d’un jutsu lancé en sa direction. D’une impulsion de Chakra, il invoqua alors la puissance mystique de ses pupilles, révélant d’un clignement de paupières deux iris rouges dans lesquels berçaient trois virgules acérées.
À l’aide de sa vue magnifiée, Nikkou pouvait désormais apercevoir la lame qui l’avait assaillie. Une lame complètement invisible, forgée dans les airs mêmes. Intrigué par cette apparition, Nikkou se releva, toujours sur le qui-vive, pour observer la lame meurtrière. Posé pendant un instant, il s'adonna à son admiration. Un véritable chef d’oeuvre de l’art du vent. Si fine, qu'elle était invisible à l'oeil nu, mais sans pour autant lui enlever la moindre puissance, comme le révélait sa blessure.
« Intéressant. Le Sharingan permet donc de percevoir les Mukoukuji . Prends un moment pour l’observer et l’analyser à l’aide de ton Sharingan. Vois-tu leur minceur, elles sont imperceptibles à l’oeil nu, mais leur tranchant n’en est que d’autant plus effilé. Il s’agit d’une technique utile pour laisser un piège ou encore emprisonné un ennemi. Tu remarques cependant certainement une différence notoire avec les autres lames que tu as l’habitude de créer cependant, non? » expliqua le Moine Guerrier d’un ton neutre en sortant de la clairière pour venir rejoindre son disciple. Aucune excuse ou moindre considération pour la blessure de son élève.
« La lame de vent est statique…il n’y a aucun mouvement ou circulation de l'air. » souligna le jeune Uchiha, sans portée attention à la douleur, trop habitué aux entraînements tortueux de son maître. Moine et enseignant depuis des années, Sora avait dédié sa vie aux arts mystiques et aux concepts les plus complexes, sans s’attarder sur les sentiments de ses élèves ou quelconque forme de pédagogie. Ses élèves devaient apprendre comme il l’avait fait, à la dure, à force d’erreur et de blessures.
« Exactement. Il ne s’agit pas d’une lame de vent, mais bien d’une lame d’air. La maîtrise du Fûton repose habituellement sur la création d’un courant d’air que tu peux former et effilé à ta guise en fonction du mouvement. Le Mukoukuji requiert que tu sculptes l’air sans lui donner le moindre mouvement, sans donner naissance au moindre vent mais bien changeant la nature de l’air ambiant. » finit-il d’expliquer en produisant déjà les signes appropriés du jutsu pour terminer son incantation en pinçant les doigts dans l’air pour étirer une ligne invisible à auteur de son torse, laissant le Sharingan de son élève enregistrer les mouvements des différents signes et la manipulation appropriée du Chakra. Sans outre formalité, Sora-son se retira à quelles mètres pour s’asseoir dans l’herbe de la clairière clairsemée et ferma les yeux pour entamer sa méditation quotidienne.
Pour reprendre son calme et tenté d’oublier la douleur sayante de la coupure sur son abdomen, Nikkou prit une longue respiration avant de commencer la formation des mudras exécutés par son Senseï, mimant ce dernier avec une exactitude et une acuité seulement possible grâce au Dojutsu légendaire qu’il arborait. Dans un dernier mouvement, il pinça les airs en libérant son Chakra pour sculpté l’air en une fine ligne. Sans aucun résultat. En l’absence de vent, il n’arrivait pas à créer une lame tranchante comme à l’accoutumée. D’une impulsion de Chakra plus prononcée, le Chûnin invoqua alors un mouvement d’air pour créer une des lames létales dont il avait le secret.
« Non! Créer une lame de vent ne te servira à rien, le mouvement de l’air sera toujours perceptible par tes ennemis. Il s’agit d’une technique subtile qui requiert une maîtrise avancée du Fûton. Retourne à ton analyse. » protesta Sora en fixant son élève d’un regard désapprobateur et visiblement frustré d’avoir été ainsi dérangé dans méditation. En tant que son discipline, il aurait dû déjà comprendre le fonctionnement derrière la technique déployée devant ses yeux et dont il avait lui-même fait les frais.
Le jeune maître du vent s’approcha de la lame de vent, s’arrêtant à quelques centimètres de cette dernière pour éviter une nouvelle coupure. À l’aide des pupilles démoniaques, Nikkou pouvait non seulement voir la Lame de l’Au-Delà créée à son attention, mais également analyser sa composition. Le chakra Fûton tendu comme un fil au milieu du vide était effilé en une longue ligne rectiligne, coupée à même la trame atmosphérique, sans aucune circulation de l’air. Les yeux rouges s’écarquillèrent alors sous cette réalisation.
our une seconde fois, Nikkou ferma les yeux et pris une lente inspiration pour concentrer ses efforts et n visualiser les effets de la technique. Une fois prêt, ses doigts s’agitèrent dans un entrelacs de signes complexes pour finir dans un pincement de l’air qu’il fixait avec une intensité renouvelée. Plutôt que de forcer le mouvement de l’air avec son Chakra, le Maître du Vent étira la ligne en coupant autour l’air ambiant plutôt que de donner la moindre forme ou impulsion de chakra à ladite ligne. La ligne invisible s’étira alors dans le vide, statique, sans le moindre courant d’air, arrachant un petit sourire en coin au Chûnin fier d’avoir réussi une telle manipulation du Fûton
Un imperceptible rictus de fierté sur les lèvres, le Moine Guerrier se leva pour aller voir le résultat de son élève, qui affichait un sourire digne d’un conquérant ayant atteint les recoins les plus reculés du monde connu. Le Chûnin était certainement doué, suffisamment pour réaliser une manoeuvre élémentaire aussi complexe, de quoi rendre un maître fier. Encore fallait-il éviter de se reposer sur ses lauriers. D’un mouvement sec, Sora donna un coup du tranchant de la main sur la lame invisible qui se brisa instantanément au grand désarroi de Nikkou qui voyait ses efforts brisés en mille morceaux.
« Le principe est maîtrisé, mais l’exécution reste encore à être travaillée. La ligne d’air doit effilée à son paroxysme pour être d’une quelconque utilité. » expliqua le Maître des Vents Célestes d’une voix neutre, sans laisser transparaître la moindre émotion à l’égard de son élève qui se renfrogna légèrement face à ce manque de considération.
Arme de combat sculptée sous forme humaine, Nikkou mis de côté sa fierté blessée pour consacrer son attention sur les commentaires de son Senseï. Après tout, il n’était pas là pour obtenir quelques fleurs et louanges, mais bien pour obtenir une nouvelle arme à son arsenal. Pour la première étape, il s’était surtout concentré sur la création de la lame invisible, sans vraiment porter son attention à son utilité. Une simple barrière d’air de quelques millimètres n’avait certainement pas la moindre utilité.
Portant une main à la blessure encore fraîche à son abdomen, Nikkou ne pouvait que constater la distinction avec la main indemne de son Sensei qui avait détruit son Ninjutsu en ne rencontrant qu’une maigre résistance. Les lames de l’au-delà étaient minces, si minces qu’elles étaient complètement invisibles à l’oeil nu, mais en contrepartie les sculpter était encore plus compliqué compte tenu du manque de matériel sur lequel travaillé.
« Je comprend Senseî. Je n’échouerai pas. » déclara le shinobi d’un ton sévère, se reprochant cet échec discréditant les enseignements de son maître qui lui révélait ses plus secrètes techniques.
Aussitôt, Nikkou reproduisit les mêmes signes incantatoires et forma la ligne pincée de ses deux doigts à même le vide, essayant d’affuter la mince ligne de la même manière que les jutsu venteux dont il avait le secret. À de nombreuses reprises, il avait créé des lames de vent si tranchantes qu’elles suffisaient à couper la roche elle-même, mais l’absence de toute circulation d’air l’empêchait de créer les mouvements d'air susceptible d'affûter la lame. Cette nouvelle lame d’air était identique à la précédente, une simple barrière de vide dressée dans la trame atmosphérique.
Le Chûnin reporta donc son attention sur le jutsu de son senseï, toujours suspendu dans les airs, invisible à tous excepté ses pupilles démoniaques. Une observation superficielle ne permettait pas de déceler la moindre distinction entre les lames créées respectivement par les deux ninja. Deux lames sculptées à même le vide, si fines qu’elles étaient invisibles à l’oeil nu, mais au tranchant nettement différent. D’un grognement rageur, Nikkou donna une volée à cette lame sans tranchant, la cassant dans un bruit sec.
« N’oublie pas Nikkou, ce n’est pas une lame de vent que tu crées. ». Reclus dans son coin, assis en indien afin de s’adonner à sa méditation, Sora avait lâché cette simple bride de savoir, sans autre explication à son discipline. L’étincelle nécessaire pour que ce dernier puisse comprendre son erreur. Il tentait en vain d’affuter une lame inexistence, conçu de vide retiré de la trame atmosphérique. Il ne servait à rien d’affuter l’inexistant.
Reprenant une nouvelle fois les mudras imprimés désormais dans sa mémoire, Nikkou finit par pincer l’air à ses côtés pour couper une nouvelle fois une ligne droits à même l’air, mais cette fois-ci activant le Chakra Fûton créé non pas pour affuter la ligne, mais pour modifier la pression aux abords de la lame en biais, lui donnant un angle affûté qui saurait trancher le moindre corps s'y frottant.
Fier de sa réussite, le Shinobi se pressa d’appeler son Senseï pour lui montrer le fruit de son labeur. Invisible aux yeux du Moine Guerrier, Nikkou lui indiqua entre ses deux mains l’emplacement de la lame, sur laquelle le Moine Guerrier posa doigt pour glisser sur son tranchant, laissant perler dans le vide une ligne de sang écarlate.
« Tu maîtrises le concept du jutsu. Il demeure à t’apprendre sa pleine étendue. » déclara en guise de félicitations le Senseï avant d’exécuter une nouvelle fois les mudras du Ninjutsu. Invoquant le Chakra Fûton sous le regard attentif du Sharingan, Sora-san bondit dans les airs dans un mouvement souple emportant dans les airs les pans de sa tunique moniale pour atterrir d’un pas aussi léger qu’une plume à quelques mètres de destination. À peine le pied posé, d’une flexion imperceptible du genoux, il continua sa progression d’une roue aérienne l’amenant à plus d’un mètre de distance pour finir sa performance d’une roulade calculée, terminée d’un seul mouvement en se levant avec grâce pour fixer son disciple.
Une personne non-avisée n’aurait rien vu d’extraordinaire à la chorégraphie du Moine Guerrier. Quelques étirements effectués par un adepte des arts martiaux tout au plus. Mais l’acuité mystique du Sharingan permettait de voir les tracés laissés dans les airs. Trois fines lignes déchirant la trame atmosphérique.
« Le Mukoukuji est un jutsu subtile, mais une seule lame ne sert pas à grand chose compte tenu de sa nature statique. Tu dois créer plusieurs lames pour révéler toute l’utilité du Jutsu, ce qui te permettra de semer des pièges sur ton chemin ou encore à emprisonner un ennemi dans ton piège. » Le message était clair. La lame qu’il avait créée était certes une réussite, mais sans compagnon, elle n’avait aucun impact en combat. Les efforts prodigués jusqu’à présent n’était que les fondements de la structure du jutsu, mais Nikkou devait désormais l’érigé dans toute sa plénitude.
Sans autre mot, Nikkou opéra la même chorégraphie que son maître grâce à son Sharingan. D’une manière mécanique, pratiquement automatique, il forma les mudras nécessaires et s’élança d’un saut élégant en direction de la première lame laissée par son senseï. Pratiquant ses aptitudes acrobatiques, le Chûnin évita la première Lame pour former sa première lame avec succès. À l’atterrissage, Nikkou prépara déjà la prochaine lame, pinçant ses doigts dans le vide avant de se propulser d’une pirouette vers la gauche où il étira une seconde fois une ligne de Chakra Fûton…qui se brisa aussitôt. Maintenir la concentration nécessaire pour déchirer l’atmosphère en plein mouvement était certes un défi supplémentaire.
La mine renfrognée, le Shinobi reprit sa place initiale. Aussitôt, il entama la même séquence, effectuant avec une nouvelle aisance les signes incantatoires pour s’élancer et former la première lame de vide au milieu des airs. Conscient de sa dernière erreur, il assura de faire le vide dans son esprit avant de s’élancer sur le côté dans une pirouette calculée, créant la deuxième lame avec succès pour continuer sa course dans une roulade vers l’avant. Reprenant pied, Nikkou parvint à tracer la troisième lame dans le vide à quelques centimètres de celle laissée par son maître, et complétant la séquence entière enseignée par ce dernier.
« Les lames ne sont pas suffisamment affutées. » grogna le Uchiha en rompant d’un coup du tranchant de sa main la troisième lame créée qui ne lui opposa qu’une faible résistance Atteint dans sa fierté, il n’attendit pas même les commentaires de son Senseï avant de reprendre sa position initiale. La complexité des mouvements et la rapidité d’action ne devaient pas menacer la structure première du jutsu, sous peine de le rendre complètement inutile.
Fermant les yeux un instant pour remémorer ses premiers acquis, Nikkou vida son esprit et suivi le mouvement de son corps, comme s’il était en combat. Pour une énième fois, il forma les signes nécessaires avant de se projeter dans les airs pour créer la première Lame de l’Au-Delà, maintenant son contrôle sur le chakra Fûton pour assurer de couper en biais l’atmosphère afin de donner un tranchant à la lame. Un pas au sol et il s’élançait déjà dans une roue latérale, assurant un contrôle chirurgical sur son Chakra lorsqu’il trancha l’atmosphère une seconde. Et enfin, il se laissa aller au sol dans une roulade l’amenant à plus d’un mètre à l’avant, pour tracer enfin la dernière ligne de son jutsu, l’effort de contrôle pour affûter la lame devenu plus naturel, un réflexe que Nikkou suivait sans faute et enfin sans effort supplémentaire. Aucune nécessité de vérifier le tranchant de la lame. Il savait qu’il avait réussi.