Soucis de Saké [Mission rang C] ( Feat Kudo Tsume et Minato)

HRP:

- Prends encore ça ! Dit Kaede en tendant un bento enveloppé dans du tissu.

- Je ne vais pas traverser le Sekaï ! Le village est à une journée de navigation.

Sans attendre l'accord du genin, sa cuisinière préférée glissa le paquet dans sa besace, puis le poussa vers la sortie.

Sanada marchait tranquillement vers un des quais réservés à la force militaire du village. Des dizaines de bateau, de la petite barque au navire de guerre imposant stationnaient là, attendant une mission ou une équipe à transporter.

Le genin ne connaissait pas celui qui allait l'accompagner. Sa senseï l'avait informé du caractère quelque peu spécial de ce shinobi, mais elle avait aussi insisté sur ses compétences remarquables et la chance pour un genin comme lui d'acquérir de l'expérience auprès de très bons ninjas en pleine possession de leurs moyens.
Sa proximité avec le clan Omura avait aidé, et c'est Mifuyu qui avait proposé les services de ce chuunin pour accompagner Sanada en dehors du village. Il s'attendait donc naturellement à voir un shinobi vêtu d'un blanc immaculé l'attendre. Pourtant, lorsqu'il fit face à Tsume. Il n'eut pas une seconde d'hésitation quant à l'identité de son tuteur temporaire.

Les premières impressions du genin furent paradoxales. Le Kudo était un peu plus grand que lui, mais plus fin. Son kimono était de travers, révélant une partie de son buste qui semblait recouvert de tatouages d'une beauté envoûtante. La mine du shinobi n'avait rien du sérieux typique du clan médecin, au contraire, un sourire lumineux venait plisser une cicatrice qui traversait le nez de part en part, sous les yeux joyeux de l'éphèbe.
Une classe infinie émanait de l'attitude pourtant nonchalante de Tsume, une certaine aisance à la vie et à ses contraintes s'exprimaient simplement par sa posture dans l'œil du soldat des Cinq. Le tatoué était l'incarnation du mot “cool” pour le genin.
C'est ainsi que presque immédiatement, il ressentit une grande affection mêlée à une certaine envie de dégager un charisme semblable au chuunin.

S'inclinant avec entrain et un grand sourire, il tira une grande latte sur son calumet pour se détendre avant de prendre la parole, inondant par là même l'espace entre les deux jeunes hommes de fumée.

-Scusez pour ça. Dit-il en chassant de sa main les volutes blanches qui disparurent dans le vent marin. Je suis Masamune Sanada, genin de l'académie et élève de Mifuyu-sama. Je crois que vous la connaissez. Enfin bon, peu importe, je suis très heureux de vous accompagner dans cette mission. C'est une histoire de saké sacré il me semble. Je suis à vos ordres ! S'exclama-t-il en caricaturant la raideur caractéristique des gardes de la ville lorsqu'un officier passait près d'eux.
Je ne connais pas Kingyo, j'espère que ce sera un joli village ! À ces mots, il embarqua avec joie sur le petit bateau de transport.

Sanada était heureux et naïf. Il imaginait cette mission comme une formalité, accompagné de son tuteur aussi fort que responsable, il n'aurait rien à craindre.
C'était des ryos facilement gagnés.

Comme souvent, il se trompait lourdement.

-Je fais parti de l'équipe de l'intendante de Uzuchio, j’espère que cette mission se passera bien et sans effusion de sang. La priorité reste la récupération du Saké et de sa livraison au festival. Mais visiblement cette mission se passera sans aucun problème avec autant de ninjas prometteurs !

- Merci ! Je suis Sanada, membre de l'équipe Tsubaki et genin. Répondit-il avec un grand sourire.

Sanada, qui avait passablement été refroidi par les présentations avec Tsume fut rassuré de voir ce “Minato” embarquer sur le bateau.
D'une taille légèrement inférieure à la sienne, le shinobi se présenta comme membre de l'équipe d'Haruka, ce qui accentua la confiance du genin envers l'albinos. Sanada l'avait bien vu quelquefois à l'académie et au village. Sa peau si pâle qu'elle en était presque translucide et sa chevelure parfaitement blanche ne passaient pas inaperçues.
Son air enjoué et le sourire qu'il prodigua au genin scella les quelques craintes qu'il avait de quitter le village avec des inconnus.

Le bateau ne tarda pas à mettre les voiles, quittant le brouhaha incessant qui régnait dans le plus grand port de la région.

Sanada aimait la mer. Au milieu des vagues et des cieux, il se sentait à sa place. Il profita donc de la liberté qu'insufflait les espaces infinis du large, lui qui ne pouvait quitter le village en temps normal.

Il retourna vers l'arrière du bateau, la sensation grisante d'aventure estompé, il se sentait maintenant anxieux. Il avait peur de ne pas être à la hauteur, ignorant les prouesses dont étaient capables Tsume et Minato. Il craignait aussi ce qu'il allait découvrir une fois sur place. Il avait combattu quelquefois, certes, mais toujours sous le regard protecteur de Mifuyu, qui veillait. Au milieu de ces étrangers, il allait devoir se montrer digne de la responsabilité qu'on lui octroyait.

Le voyage passa bien trop vite pour le genin qui n'était pas du tout pressé de commencer. Après de si longs mois au sein du village, la vue d'une cité extérieure lui parut presque étrange. Comme s'il avait oublié que derrière les bâtisses rassurantes de l'académie où il apprenait l'art de la guerre, il y avait un monde à combattre.

L'embarcation fut amarrée à un petit ponton à peine visible dans la brume qui semblait régner sur la petite île. Ils furent accueillis par un religieux qui sembla touché par la grâce en les voyant arriver.
Avec une grandiloquence frôlant le ridicule, le prêtre se mit à genoux, remerciant les dieux de leur aide.

- On ne vous espérait plus ! Dit le religieux en attrapant chaleureusement la main des uzujins. Le festival est à la prochaine demi-lune, et si nous n'avons pas la boisson pour contenter les dieux, nous serons excommuniés et maudits à jamais ! Nous n'avons plus les barils, un groupe de mercenaire nous les a réquisitionnés, c'est pour leur propre temple, qu'ils ont dit. Un temple...Une secte oui ! Ces brigands vivent dans les montagnes brumeuses au-dessus du village. Venez, je vais vous montrer le chemin. Dit-il en conjurant les ninjas de le suivre.

Sanada sentait son coeur battre à toute allure, mais gardant la mine froide d'usage, il se contenta pourtant de suivre le tatoué et l'albinos.

Que diable allait-il faire dans cette galère ?

Sanada resta silencieux face aux instructions de Minato. La perspective d’un affrontement le paniquait au plus haut point. Il avait combattu des bêtes hybrides dans les laboratoires de Mifuyu, des entités gardiennes de temples centenaires, mais jamais il n’avait fait réellement face à un homme.

-On est pas la pour perpétrer un bain de sang mais sécuriser de la marchandise. Si on se retrouve obligé d'utiliser la force vous avez carte blanche pour nous couvrir Kudo-San mais c'est tout. Des questions ?

Le genin sourit et indiqua qu'il n'avait aucune question. Si le tatoué au style corrosif prenait la charge du sang, il voulait bien porter une douzaine de barils de saké dans chaque bras.

C'est donc avec une charge mentale en moins, en attendant le poids de l'alcool, qu'il poursuivit son chemin au travers du village. Entouré de son nuage fumée qui formait la deuxième barrière protectrice après le cocon de la capuche, il n'observa pas les alentours, préférant placer un voile blanc rassurant devant le regard prononcé des villageois qui les observaient passer.

Après ce qui lui parut une éternité, ils arrivèrent enfin sur un petit sentier très sinueux qui semblait grimper dans la montagne qui surplombait avec majestuosité le village. L'ascension fut assez simple le premier kilomètre. Après quelques minutes de marche cependant, le sentier se fit plus fin, la pente plus abrupte, les pierres, beaucoup moins stables, roulaient maintenant sous les appuis des uzujins. Avec quelques difficultés, le genin parvint à garder le rythme soutenu dicté par les deux chuunins.

Enfin, après un virage, ils aperçurent un grand bâtiment de bois au sommet de la montagne. La route semblait de plus en plus impraticable et Sanada en avait assez de crapahuter ainsi.
Son dégoût de l'effort frappa sa conscience et pour se motiver, il ralluma son calumet pour déguster quelques lattes apaisantes.

Soudain, il ressentit un étrange sentiment de mal-être, observant les alentours, il ne distingua rien d'autre que la pierre blanche qui couvrait les immenses sommets. Un sifflement vint pourtant briser le silence, dans un mouvement que lui-même ne pouvait expliquer, il sauta sur le côté. Il eut à peine le temps d'apercevoir une flèche qui se brisa contre la pierre à l'endroit même où il était un instant plus tôt que le sol s'affaissa sous le choc de son atterrissage, emportant de grosses roches dans le vide, sans oublier le genin.
Sanada se raccrocha tant bien que mal à une excroissance saillante dans le minérale. Seule une main avait réussi à attraper la roche salvatrice, mais la matière étant friable par nature, le cône semblait s'affaisser sous le poids du soldat des Cinq.

Sanada sentit ses doigts glisser. C'en était fini de son ascension vers les cieux pour rejoindre les Cinq, il allait tomber dans les abîmes du monde des mortels, avant même d'avoir accompli la mission divine pour laquelle il était né.

Alors qu'il allait reprendre le pas sur son fatalisme et tenter de se hisser sur le sentier, une pluie de flèches s'abattit sur les positions de ses alliés.
Il était bloqué, entre les stalagmites qui ornait le tapis du trou paraissant sans fin et les salves de lames décorées de plumes qui fendaient l'air dans un arc-en-ciel pigmenté.
Le genin observait la scène totalement impuissant, priant les dieux que ses partenaires de mission lui viennent en aide.

En attendant, il était totalement à la merci d'un bon viseur dans le camp adverse, une seule flèche suffisait pour ajouter à cette farandole de couleur le rouge carmin du sang.

Accroché tant bien que mal à une petite irrégularité de la montagne, Sanada sentait chacun de ses doigts glisser vers le précipice qui semblait l'attirer comme un aimant. Alors qu'il tentait une dernière tentative désespéré pour se raccrocher au minéral, il sentit quelque chose lui enserrer le poignet avec force. Un fouet venait de s'enrouler autour de son avant-bras, offrant un répit salvateur aux muscles ankylosés par l'effort continu.
Une seconde plus tard, le jeune genin vit le tatoué plongé vers lui. Dominant la gravité à l'aide d'une technique inconnue de Sanada, il parvint à l'attraper fermement avant de remonter avec une puissance telle que le soldat des Cinq fut littéralement projeté contre un arbre. Allongé face contre une terre plus compacte, il ne put être qu'un témoin passif de l'attaque de Tsume.

La queue qui lui avait permis de rattraper Sanada éjecta le shinobi aux mille dessins vers la pluie de flèches. La vision de cet homme en l'air, au milieu de dizaines de projectiles qui le frappaient sans que sa course ne change d'un iota avait quelque chose de divin. À la manière des héros mythologiques Osmiétistes, rien ne semblait pouvoir stopper l'assaut de l'uzujin, aussi imperméable à la douleur qu'à la peur. Tsume était un être créé pour le combat, une arme faite de chair, d'encre et de sang qui s'épanouissait sur le champ de bataille. Galvanisé par la vision du guerrier fonçant vers les assaillants au travers de la pluie de flèches, Sanada se releva pour esquiver la deuxième salve qui s'abattait maintenant sur sa position.

Les pointes qui brillaient au soleil s'approchaient dangereusement et Sanada avait beau cherché dans son répertoire une technique lui permettant d'échapper à autant de projectiles, il ne trouvait rien d'assez puissant. Par désespoir, il commença l'exécution du shunshin, priant intérieurement pour que sa course soit assez stable pour ne pas le faire chuter à nouveau dans le précipice. C'était sans compter sur le second protecteur de Sanada.
L'albinos sans hésiter une seconde se plaça devant le genin un fouet à la main, le regard plus déterminé que jamais.

Le ciel s'assombrissait au-dessus d'eux, les flèches amorçaient leurs descentes, couvrant un tel espace que toute échappatoire, semblait maintenant impossible.

- Kaifu !

Minato leva son fouet et se mit soudain à l'agiter autour de lui et du jeune fumeur. Sous l'impulsion de l'arme qui fendait l'air, des lames de vent semblèrent danser autour des uzujins, brisant toutes les lames qui avaient l'outrecuidance de vouloir pénétrer la protection lacérante. Toujours paralysé, Sanada ne pouvait s'empêcher d'admirer ceux qui combattaient devant lui. Malgré les entraînements incessants, il se rendait compte qu'un fossé aussi profond que le précipice devant lui séparait la maîtrise martiale de Tsume et Minato à la sienne.

Seul, il serait mort transpercé des mille lames, sans doute aurait-il été jeté dans le précipice par les assaillants, condamnant son âme à errer au fond des abîmes de la terre éternellement.

-Ça va ? Il faut pas rester là !

La phrase le sortit de sa torpeur. Se ressaisissant, il acquiesça d'un signe de tête avant de composer des mudras. Une seconde plus tard, un clone du soldat des cinq apparut à ses côtés.

- Profitons du nuage de poison de Tsume, je laisse mon clone ici pour qu'il serve de diversion.

À ces mots, Sanada rua vers l'étroit sentier qui montait. Alors que les flèches continuaient de pleuvoir sur son clone qui tentait tant bien que mal de les éviter, il continua son chemin le plus rapidement possible sans regarder en arrière.
Il n'avait pas à se soucier de Minato, le maillon faible, le boulet, c'était lui.

Au son des cris qui résonnaient de plus en plus fort, ils arrivèrent sur le plateau qui dominait le village en contrebas.

La confusion régnait. Pour la première fois, Sanada contemplait un échantillon de ce que pouvait être une bataille. Les bruits, les coups, les hommes, tout semblait flou et brouillon autour de lui, comme si la Nature se refusait à cet hymne à la destruction, jetant les protagonistes dans une nouvelle réalité aussi monstrueuse que leurs actes.

Dans le tumulte de violence et de sang, Sanada s'éloigna un peu, courant vers la grotte creusée dans la montagne. Devant l'entrée, deux bandits, l'épée brandit se jetèrent sur le jeune genin.
D'un saut, il évita les attaques avant de retomber derrière les sbires. Invoquant la foudre de signes incantatoires, il posa ses mains au sol, laissant jaillir une vague de foudre que se brisa sur le dos des malheureux.
L'électricité se glissa dans la chair des hommes qui s'effondrèrent instantanément sur le sol, pris de convulsions incontrôlables. Sans perdre une seconde, Sanada s'enfonça dans l'antre sombre, maintenant que le sang avait coulé, il n'était pas question d'échouer la mission.

Les dieux ne pardonnaient pas le sang versé sans raison sur la terre sculpté de leurs volontés.

Récapitulatif combat:

Apparemment, une grande quantité d'alcool de luxe ne valait pas une mort dans d'atroces souffrances. Le peu de bandits qui tentaient de résister à l'assaut des Uzujins s'enfuirent à toute allure, se poussant les uns les autres pour atteindre l'entrée de la grotte le premier.

Sanada s'essuya le sang qu'avait laissé le tatoué sur son menton en le regardant.
Cet homme faisait peur. Il avait l'habitude de la violence, certes, de la nécessité de celle-ci, il était élève de la Sorcière après tout. Mais jamais il n'avait vu telle expression d'extase au milieu d'un torrent de sang.
Tsume était un être forgé pour le combat, le corps puissant, l'esprit dénué de toute pitié ou empathie. Il avait littéralement détruit les hommes en face de lui, pas neutralisé, exterminé, littéralement.
Tous étaient méconnaissables, le ninja ne se contentait pas d'ôter la vie de ses victimes, il leur enlevait leur identité. D'être humains à tas de chair.

Le genin n'avait donc aucune confiance envers le jonin, il préférait de loin la compagnie de Minato, plus protecteur avec son aîné. Cependant, l'albinos n'avait pas non plus été tendre avec ses ennemis et sa maîtrise du fouet, arme exotique pour Sanada, était tout effrayante. Le claquement de l'arme sur la peau n'avait rien d'une mélodie apaisante. Être Shinobi, c'était avant tout être une arme mortelle, et plus que jamais, le genin en avait l'illustration.

Maintenant que l'endroit était vide, Sanada put vérifier l'authenticité de la marchandise et si tous les barils étaient ici.

À son grand soulagement, les bandits n'avaient pas touché l'alcool, bien trop conscient du prix qu'ils pouvaient en tirer à la vente. S'ils étaient alcooliques, ils n'étaient pas idiots et le prix d'un seul de ses barils suffisait à remplir la panse de toute la bande pendant des semaines. L'alcool apporté à ce festival religieux avait une réputation qui dépassait allégrement les frontières du pays du tourbillon.

- Tout est là ! Il ne faut plus perdre une seconde, je pense que si nous faisons rouler les barils et que nous trouvons un moyen de les garder intact en bas, avec une technique ou une astuce, que je n'ai pas encore, je dois avouer, nous pourrons les embarquer et revenir à temps pour le festival !
À ces mots, le genin retourna un baril avant de le faire rouler juste devant la descente avant de se jeter dessus à mesure qu'il amorçait le mouvement.

Il dévala la pente sur le baril à la manière des acrobates ambulants qu'il avait parfois vu étant petit. Arrivé en bas, il ne put finir sa course et atterrir dans l'eau, tout comme le tonneau.

Sanada le rattrapa rapidement avant de le ramener sur le rivage.

Remontant en courant, il s'adressa à ses deux partenaires.

-On peut tout balancer, ça risque rien ! Je vais rester en bas pour réceptionner les barils et après, on met les voiles !