"troubles" kameyo

Troubles

Je ne sais pas ce qui m’avait pris au juste ce matin là. J’avais eu besoin d’y retourner, juste de retrouver l’endroit où je les avais perdus. C’était sans doute la pire des idées, tout le monde me l’aurait déconseillé à raison, mais sur le moment, je n’y avais pas pensé. J’avais juste avancé, j’avais juste quitté le clan en laissant un mot sur la porte de Shika pour lui dire que je partais pour quelques jours, mais que je reviendrais. Je ne savais pas pourquoi je prenais cette peine, Shika parlait beaucoup trop, j’avais du mal à simulé la joie face à lui tant il m’épuisait, mais Shika avait été là, sans savoir réellement comment faire ou aider, il avait été là et c’était pour ça que je ne pouvais définitivement pas quitter le clan sans le prévenir lui. Quant à lui dire ou j’allais ? Je ne le savais pas moi-même, je n’avais que des maigres souvenirs qui ne pourraient peut-être pas être assez, mais c’était déjà ça. 


Peut-être que revoir m’aiderait à faire mon deuil dans le fond. Alors j’avais marché, sentant lentement l’angoisse me reprendre jusqu’à ce que je voir l’eau, que le souvenir de sa morsure glacé ne me prenne pour réveiller les souvenirs d’une fuite désespérée pour la vie. Ca ne m’aiderait pas, mais il était sans doute trop tard pour le réaliser. Alors prit de panique, je cherchais à rentrer au clan, mais plus j’avançais, plus je voyais trouble. J’étais incapable de rentrer, incapable de retrouver mon chemin. J’aurais dû m’arrêter, rationaliser, mais… Toutes les images se bousculaient dans ma tête au point de m’étouffer. Débouchant sur une petite clairière, je me tenais toujours le crâne, comme si le poids de mes sentiments commençait à peser trop lourd.

Sauf qu’à peine avais-je fait quelques pas, qu’un mouvement en fasse de moi attira mon attention. Une femme, une inconnue, non loin de là où les miens étaient morts. Ou mes frères m’avaient quittés. Relevant donc la tête, j’essayais de me reprendre même si la souffrance était encore visible sur mes traits. « Pardon, je n’avais pas remarqué qu’il y avait déjà quelqu’un ici. », je n’avais pas vraiment d’idée d’ou je me trouvais en réalité. J’étais là, peut-être à marcher sur les terres d’un clan sans y être autorisé. « Si jamais ces terres vous appartiennent rassurez-vous je vais partir. » ajoutais-je avec un sourire et une innocence feinte. Ma tête me brûlait, ces images n’arrêtaient pas de me torturer. J’avais besoin d’air.

ft. Kameyo

Troubles

Elle s’avança, attirant mon attention sur les griffes qui venait habiller son corps. J’avais dérangé la femme dans un rituel que je connaissais que trop bien et cela fut confirmer lorsqu’elle supposa que je venais troubler le repos des morts. Si seulement elle savait que je respectais davantage les morts que les vivants. Enfin du moins je passais plus de temps à penser à eux qu’à l’avenir. Pouvais-je alors reprocher à la femme sa réaction ? Je n’en étais pas sûr, elle avait été surprise, elle ne me connaissait pas, elle ne savait rien de mes ambitions et surtout… Je n’étais pas l’homme le plus rassurant physiquement. J’étais… Étranger, sur les ruines d’une civilisation visiblement arraché à son avenir par la mort. J’avais mis les pieds dans un cimetière qui n’avait guère plus d’intérêt qu’un devoir de mémoire qu’elle venait sans doute chercher. Baissant simplement la tête dans un premier temps, je m’assurais qu’elle comprenne que je n’étais pas un danger, quoi que c’était le cas dans un sens… Je ne lui ferais de toute évidence aucun mal et le fait que j’ai depuis longtemps cessé de m’entraîner ne serait qu’une punition supplémentaire en cas de combat. Quoi que me défendrais-je vraiment ? Je craignais la mort comme je craignais la vie. Je n’avais pas plus d’avenir depuis longtemps, mais devais-je être à ce point égoïste en me laissant faucher en connaissant la souffrance de ceux qui restaient ? Non.

Alors simplement, je relevais les yeux, lui assurant cette vérité qui m’avait guidé jusqu’ici, « Je suis partie de chez moi ce matin pour me rendre sur les terres où mes deux frères sont morts, mais je n’avais visiblement pas la force de revivre le massacre dont ils ont été victime et j’ai fui jusqu’à me perdre ici. », je ne parlais jamais de mes frères dans le clan, ici, c’était simplement pour ne pas mourir dans un sens, ou parce que revivre tous ça m’avait bien plus affaibli que je ne l’aurais voulu. « Je ne voulais pas troubler vos morts, j’ignorais même que j’étais en train de marcher sur vos terres pour être honnête. », j’étais perdu, tout simplement, j’étais paniqué, brisé et perdu.

Reculant donc d’un pas, je levais simplement les bras pour réussir à me protéger en cas d’attaque. Elle avait une bestialité évidente qui me faisait penser à des légendes. Et si elles s’avéraient vraies, je ne voulais sincèrement pas faire face à sa fureur. « Je vais partir et vous laisser honorer vos morts. », bien que la mort était ironique en nous arrachant ce que l’on aimait le plus, l’on passait de nombreuses années à s’y arrêter, à les prier. J’avais cette faiblesse, elle semblait en faire de même, alors je respecterais sa tranquillité. Si je n’avais pas perdu mes frères, je n’aurais pas pu comprendre, mais cela ne m’aurait pas empêcher de respecter son deuil.

ft. Kameyo

Troubles

Elle était réellement flippante à cet instant, elle avançait toujours, un regard carnassier sur le visage, sa langue passant sur ses lèvres comme l’on aurait pu le faire face à un repas appétissant. Elle me demanda donc qui j’étais et une petite voix me disait que mentir à cet instant ne serait guère une bonne idée. Autant faire preuve de franchise face à la folie, c’était encore la meilleure chose à faire. Et puis il y avait tout de même le risque qu’en voulant paraître plus inoffensif, je me révèle être plus dangereux à ses yeux. J’espérais donc à cet instant que la réputation de mon clan suffise à m’épargner son évidente envie de sang. « Je m’appelle Nara Yutsuki, je viens des Forêts ancestral d’Inari. », déclarais-je donc simplement. Mon clan était connu pour son intelligence, pour sa stratégie, mais aucun massacre ne venait assombrir notre passé. Du moins aucun que je ne connaisse. Je n’avais pas la connaissance sur tous après tout, mais j’en avais suffisamment lu sur le monde pour savoir à peu près de quoi mon clan était capable au final, et la violence n’en faisait pas partie.

« Et vous êtes ? » demandais-je respectueusement. Ce n’était pas anodin après tout. Savoir qui elle était m’aiderait sans nul doute à me faire une réelle idée de ce que j’avais en face de moi et par extension du danger qu’elle pourrait représenter pour moi si jamais elle venait à péter un plomb, car c’était cette partie-là qui me semblait la plus probable. 



Je reculais donc d’un second pas pour m’assurer une réelle bonne distance de sécurité. Ça n’éviterait clairement pas qu’elle puisse m’attaquer, car elle si sa vitesse suivait son attitude, alors elle devait-être assez bestiale pour me sauter dessus et me faire ne serait-ce que mon existence d’un coup de griffe. C’était ni ce que je voulais, ni ce qui serait le plus agréable à vivre, alors je devais rester sur mes gardes. Que je le veuille ou non, j’allais devoir peut-être faire usage de mon héritage génétique.

ft. Kameyo

Troubles

La présentation qui fut faite me permit de répondre à une de mes interrogations, à savoir qu’il s’agissait un membre du clan Akuma, celui que j’avais cru deviner sans pour autant y croire. Je n’avais fait que lire des choses à leurs sujets, des choses pas toujours très honorable, surtout sur leurs fins. Je comprenais à présent mieux le comportement de la créature en face de moi, même si dans le fond j’ignorais encore un grand nombre de choses au sujet de son sang. Hochant donc la tête, je l’inclinais un instant pour appuyer le fait que j’étais toujours inoffensif jusqu’à ce qu’elle revienne à elle, ce qui sembla finir par arriver. La voix était moins douloureuse, elle était plus calme, enfin moins prédatrice sans doute. Elle s’excusa donc pour cet autre prisme de sa personnalité avant d’affirmer que pour elle, j’étais d’un clan ami. « J’avoue que je préfère ça. » avouais-je avec un visage neutre alors que j’essayais de me détendre un peu face à cette nouveauté, face à elle. « Je ne connais votre clan que par des récits, si j’ai fait quelque chose de déplacé, je m’en excuse. » lui affirmais-je à nouveau avant de me redresser un peu plus.

J’avais besoin de me détendre, très sérieusement, la journée était déjà suffisamment éprouvante comme ça. Je n’avais pas besoin d’un conflit supplémentaire. « Je ne veux pas abuser de vous, mais sauriez-vous dans quelle direction se trouve le clan Nara ? Je ne sors guère et je sens déjà que l’on va me faire passer l’envie de ressortir à nouveau si je mets plus d’une journée à revenir. », quoi qu’en soit, le monde suffisait à me faire regretter chaque sortie. Je n’étais pas fait pour ce monde, je n’étais même pas vraiment désireux de l’être. J’en avais vu beaucoup trop à un âge où mon innocence aurait du être préservé.

Quoi qu’il en soit, je devais profiter de cette Kameyo Akuma tant qu’elle était encore là, car cette Kokkai me semblait bien moins agréable. Alors peut-être que je faisais face à une forme avancé de schizophrénie, mais si c’était le cas… Quoi que je fasse, rien ne pourrais y changer.

ft. Kameyo

Troubles

Je n’avais pour l’heure rien fait de mal, mais elle avait tenu à dire que les rumeurs étaient souvent exagérés ou fausse. Chose qui n'était pas impossible, il y avait des légendes sur le clan Nara qui était aussi anormal, mais comme pour tout, il fallait faire le tri, « Je crains qu’aucun clan ne soit épargné. » soufflais-je donc pour abonder dans son sens avant de lui demander quel chemin je devais prendre pour rentrer chez moi. J’avais un sens de l’orientation exécrable et c’était pire quand, comme aujourd’hui, j’étais blessé par le passé. Elle désigna donc une direction, sans pour autant savoir combien de temps je mettrais pour rentrer. Et puis elle eut une question sur la visite de ses enfants. Elle semblait jeune pour avoir des enfants assez grands pour se promener seul, mais peut-être que son clan avait une jeunesse allongée, enfin je n’en savais rien, pas plus que je savais ce qu’il en était de Shika. Posant donc mes mains sur mes hanches, je répondais avec franchise, mais sans pour autant être très passionné par mes mots, « Il parle toujours autant, donc je suppose que oui. », mon stress, ou du moins la peur de peut-être mourir ici était en train de disparaître ce qui était quand même plus agréable.

Regardant donc dans la direction indiquait, j’allais prendre congé lorsqu’elle me demanda si je voulais qu’elle me ramène jusqu’à chez moi. La regardant un instant, je devais avouer que je n’avais que très peu envie de voir Kokkai revenir, mais elle semblait gérer et j’étais capable de me perdre à nouveau, « Ça m'emmerdait de me reperdre en vrai. » déclarais-je avant de hausser les épaules comme pour signifier que je m’en fichais un peu, ce qui était faux, mais passons. Je voulais me défaire de cette angoisse, je voulais retrouver mes murs de sécurité. Je voulais m’étouffer. Enfin du moins mes sentiments.

« Du coup oui, et vous pourrez voir Shika si jamais vous doutez de son état. » ajoutais-je plus par courtoisie que par réalité. Je doutais qu’on me reproche d’avoir ramené quelqu’un dans le fond, et puis même si on me le reprochait, ça n’aurait pas grande importance pour moi, simplement, si elle avait voulu voir le chef du clan, elle serait venu toute seule, alors bon, on prendrait ça pour une manoeuvre diplomatique et dans le pire des cas, on me taperait sur les doigts.

ft. Kameyo