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Voyage de retour [Nara Shika]

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Bien qu'un simple prélude d'une guerre à venir, le siège de Baransu fut titanesque. Malgré sa constitution hors norme, le Gardien avait bien failli y rester, quelques semaines ayant tout de même été nécessaires pour le remettre sur pieds. Au moins eut-il la chance de survivre. Bien-sûr, Baransu ne refusa point l'hospitalité à ceux ayant offert chair et sang pour la protéger, mais un Onryou ne saurait rester trop longtemps loin de sa forêt.
Il avait récupéré l'essentiel de ses capacités, mais cette inactivité forcée avait prélevé son due sur ses muscles. L'Irou avait certes permis de soigner ses blessures, mais faire en quelques jours ce qui aurait du prendre des années mit une énorme pression sur son corps, le rendant pour l'instant incapable d'invoquer sa force d'antan. La magie avait parlé, il fallait désormais laisser à la nature le temps d'agir.

Pourtant, tandis qu'il se promenait dans les rues de la cité, Maho ne pouvait tout simplement pas se plaindre de son sort. Certes ils avaient repoussé l'empire, mais en dehors de la citadelle, le paysage revêtait des tons d'apocalypse. Les rues étaient encore jonchées de débris, tentes et habitations de fortunes laissant place à ce qui était autrefois une ville resplendissante. La bataille avait également marqué les habitants, éclopés et blessés de guerre étant devenus choses communes. Comme d'habitude, les plus touchés par les combats restaient ceux incapables de prendre les armes.
Cependant l'Onryou n'avait aucune place dans son cœur pour de la pitié. On pouvait le considérer comme un héros, mais ce ne fut pas l'empathie qui le fit risquer sa vie pour cette foutue porte. La haine envers l'Empire, voici ce qui l'avait motivé. Maintenant que l'ennemi était parti, il ne voulait plus rien avoir à faire avec ici. Certes il n'emportait pas avec lui que des mauvais souvenirs, la chevelure ténébreuse de l'ange lui ayant sauvé la vie continuerait de bercer ses rêves.

Il arrivait enfin en vue des portes, un baluchon copieusement chargé traînant sur son dos, une bourse de ryos à sa ceinture. Il était enfin prêt à partir, et alors qu'il fit son premier pas vers l'extérieur, il ne put s'empêcher de se retourner. Il lui semblait avoir entendu une voix, et voila que des bruits de pas se rapprochaient à toute allure.
Une silhouette se dessina au loin, la forme d'un compagnon d'aventure, un camarade de meurtres et de beuveries, un autre résident d'Inari. Que diable faisait-il ici?
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Tu ouvris les yeux sur un plafond orné d'armoiries Churitsu. Constatant l'état de tes blessures, tu pus affirmer que la guérison était suffisante pour que tu t'en retournes chez les tiens, sans pour autant négliger de bien faire attention à ne pas les rouvrir. Ça faisait combien de temps que tu étais ici? Deux semaines? Trois peut-être? Au moins une pour retrouver un état suffisamment conscient pour communiquer correctement avec autrui, puis une autre le temps que tes blessures ne te fassent plus souffrir, et sûrement pas loin d'une supplémentaire pour qu'elles cicatrisent correctement. Pas que tu n'appréciais pas l'hospitalité du seigneur des lieux après que tu ais contribué à lui sauver la peau, mais retrouver Inari et les tiens te tardait, bien qu'en songeant à la pile de paperasse qui devait attendre sagement sur ton bureau, l'envie de rechuter te titilla. Mais bon, après tout, ça faisait parti de ces responsabilités que tu avais accepté de prendre en devenant le chef de ton clan, et une absence aussi longue ne pouvait que résonner comme un frein aux ambitions avouées que tu avais pour les Nara. Réajustant tes vêtements, tu sortis de la chambre que l'on t'avait octroyé et déambulas dans les couloirs de la citadelle, jusqu'à ce que tu aies fait le tour de toutes les personnes auxquelles tu souhaitais dire au revoir avant de prendre le chemin du retour. Salutations qui te prirent pas moins d'une heure.

Enfin. Après un temps d'enfermement bien trop long à ton goût, tu reprenais le chemin de la liberté, laissant une brise légère s'inviter parmi les quelques mèches de cheveux rebelles qui ne se firent pas prier pour profiter du moment en se laissant ainsi porter par le vent. Tu inspiras à pleins poumons de cet air qui t'avait tant manqué, ton regard s'arrêtant sur chaque paroi abîmée par le conflit, sur chaque personne atteinte, de près ou de loin, par les combats qui avait eu lieu ici. Triste ironie, c'est encore une fois ceux qui se désintéressaient de la guerre qui avaient été les plus marqués dans leurs chairs et dans leurs têtes. Pourquoi devait-il toujours en être ainsi? Le combat démontrait une fois de plus aux plus faibles qu'il fallait être plus fort et se battre pour échapper à ce qu'ils désapprouvaient le plus. Il y avait assurément quelque chose d'illogique là-dedans.

Rejoignant d'un pas décidé l'axe principal de la cité, tu fis quelques haltes ici et là, tantôt pour aider un vieillard estropié à se tenir debout, tantôt pour consoler moralement une fillette pas plus vieille que ton petit frère et qui avait perdu sa mère dans la bataille, ou encore pour distribuer quelques vivres à des blessés étendus sur des brancards et incapables de s'alimenter par eux mêmes. Rien de tout cela n'aurait du être permis. De la pitié? Non, surtout pas. Mais de la compassion, et de la rage, celle de ne pas foutre un peu la paix à ceux qui ne demandent rien. Si ton appartenance à un clan reconnu pour sa maîtrise du chakra t'apportait de la puissance, tu devais faire tout ton possible pour mettre celle-ci au service de ceux qui en avaient réellement besoin.

Après une demi heure de discussion avec une dizaine d'enfants traumatisés par ce qu'ils venaient de vivre, tu salua chaleureusement le petit groupe avant de prendre congé, direction les portes. Sac sur le dos, emmitouflé dans des bandages plus épais les uns que les autres, tu progressas en pensant aux membres de ton clan, et essayant d'imaginer quel serait leur accueil. Curieusement, aucun de tes scénarios ne permettait un final en apothéose pour ta pomme.

Un sourire de plus en plus large accroché au visage au fur et à mesure que tu te rapprochais de la sortie, ton regard tomba sur la forme massive d'un dos qui te disait quelque chose. Le grand singe. Maho. Pas de doute, c'était lui, là, à une cinquantaine de mètres devant toi. Que pouvait-il bien faire ici, aussi loin des terres dont il était l'un des gardiens.

-Hey hoy...Mahoooo-saaaaann...derrière-toi...non pas à droite, derrière j'ai dit...

La première fois, tu l'avais rencontré par hasard, au cours de ton périple de huit années. La rencontre fut d'ailleurs des plus dynamiques, l'aisance avec laquelle il brisait des cous t'ayant fait forte impression. Mais rapidement vous aviez sympathisé. Simplement. Autour d'un feu, de quelques verres et de pensées propres à refaire le monde. Un lien s'était noué, dans ton esprit du moins. Ce genre de lien qui unit deux personnes qui n'ont pas besoin de se croiser pour savoir qu'elles passeront ensemble des moment agréable le jour où cela arrivera. Puis tu l'avais revu au cours du concile. Son arrivée fracassante t'avait bien fait marrer. C'était il n'y a pas si longtemps, et cette fois-là, votre statut à tous les deux avait bien changé. Tu étais devenu chef et lui intendant de vos clans respectifs. Vos chimères philosophiques d'antan pouvaient désormais avoir un avenir si vous vous en donniez les moyens.

Tu hâtas le pas pour aller au plus vite à sa rencontre, quand enfin tu le rejoignis, essoufflé.

-Han han han...pfiouuu, on dirait que ces quelques semaines d'inactivité m'ont un peu rouillé...qu'est ce que tu fais par ici Maho-san? Il est plutôt rare de voir un Onryou aussi loin des forêts ancestrales...me dis pas que toi aussi tu as combattu ici?

Attendant sa réponse tout en continuant d'avancer, vous finîtes par passer les portes, votre horizon n'étant plus parsemé que de vastes espaces naturels qui sentaient bons la maison. Afin d'imprégner l'instant d'une solennité toute personnel, tu roulas d'une main une cigarette de salvia divinorum que tu portas à tes lèvres avant de l'allumer et d'en inspirer longuement plusieurs bouffées.

-Si toi aussi tu t'es retrouvé mêlé à tout se merdier, tu comprendras sans doute mieux les raisons pour lesquelles j'ai voulu organiser le concile...je ne sais pas dans quel mesure cette réunion que nous avons mené fera avancer notre futur, mais ce dont je suis sûr, c'est que nos clans, en tant qu'entités indépendantes, sont plus menacés que jamais...
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