[Training] Danse des pantins [PV Shirogane Ningyo]

J'étais dans la petite cour arrière de mon atelier ce jour-là, un bel après-midi tranquille où je souhaitais bosser sur les arts de marionnettistes. C'était pas souvent ces derniers temps mais puisque j'avais trouvé un compagnon de jeu dans la personne de Ningyo, cela m'avait redonné un gain d'intérêt et surtout, ça me changeait de mon vieux. N'allez pas croire que j'avais abandonné, je passais juste plus mon temps dans le rafistolage que l'apprentissage de technique. J'adorais avoir les mains dans le cambouis, donner vie à ses poupées et bosser sur de nouveaux mécanismes. D'ailleurs, j'avais sorti plusieurs modèles à tester. Esthétiquement parlant, elle était assez banale, je ne les avais pas le moins du monde personnalisé. Elles étaient en test et je n’allais pas m'emmerder à faire quelque chose de physiquement sophistiquée si c'était foireux.

Bref. J'avais aussi fait parvenir une note à Ningyo, l'invitant à me retrouver sur mon lieu de travail. On s'était dit qu'on le ferait, j'avais pris les devants. D'ailleurs, j'avais laissé la porte de la bâtisse ouverte pour qu'il comprît qu'il était libre de rentrer et même coller une feuille où j'avais noté "je suis dans la cour", juste au cas où. Pendant ce temps-là, je m'échauffais un peu et surtout je continuais à arranger mes marionnettes.

Itori était posée sur un banc, regardant ses "petites copines" avec ses yeux inertes pendant que maman cherchait à les améliorer. Une fois que j'avais fini de faire mes bricoles, je créais naturellement mes fils de chakra pour les manipuler et les tester. L'une d'entre elles était pourvu d'un sarcophage, elle était plus massive que Itori et plus lourde. Je cherchais à améliorer la maniabilité de l'engin et l'alléger. C'était pas encore gagné. Sur une autre, je lui avais collé un système de scie rotative pour gagner de la puissance brute en manière de dégât. Si j'arrivais à en gérer le mécanisme, ça serait pas jojo sur le terrain de combat mais bon... au moins, ça serait efficace. On n’était pas des enfants de chœur. Je ne l'étais pas en tout cas. La troisième, j'avais essayé de lui donner une apparence plus humaine que toutes les autres, un truc assez mimétique pour chercher à mieux tromper l'adversaire. Cela me faisait penser qu'il me fallait améliorer ma manière de procéder pour leur donner un visage plus humain, un maquillage bien pensé. Ce serait pas pour aujourd'hui.

Mais plus je regardais cette poupée en particulier qui, soit dit en passant, ne ressemblait qu'à une forme humaine en bois, je me rendais compte que je n'avais jamais essayé de manipuler un humain.  Mort ou vivant d'ailleurs. C'était possible ? Oui. Mon père me l'avait rapporté. Il savait le faire, mais cela lui posait souvent des problèmes de conscience d'utiliser des cadavres en combat. Il ne le faisait que lorsqu'il était totalement désespéré. Bizarrement, moi cela ne me faisait pas grand-chose. La fin justifiait les moyens et si on avait pas le choix, pourquoi avoir des scrupules. Tuer ou être tué. Un autre crédo shinobi ça.

Alors que mes pensées m'abandonnèrent quelques instants, je sortis instinctivement une cigarette de ma poche et me l'alluma avec ma nonchalance habituelle. Ningyo n'était pas encore arrivé mais je savais qu'il ne tarderait pas. Je lui avais donné un créneau horaire, pas une heure précise non plus puisque je ne comptais pas bouger de l'atelier de la journée. J'espérais qu'il pût m'enseigner justement la manipulation des fils sur des corps, j'étais quasi certaine qu'il devait savoir le faire. On verrait bien si j'avais eu du pif.

Technique à apprendre:

Technique à enseigner:

Vous le croiriez sans doute pas, mais j'avais même pas entendu Ningyo arriver derrière moi. J'étais tellement dans mes pensées à farfouiller mon pantin que j'eus un petit sursaut quand je vis les bras du géant me passer par-dessus les épaules. Là, il me pointa du doigt des mécanismes qui faisaient la gueule, un truc mal emboité. Je levais quelques secondes la tête, il avait la sienne au-dessus de moi. Il était vraiment... très grand. Mais aussitôt j'écoutais ses conseils pour réajuster mon pantin afin que cela ne me lâcha pas en pleine utilisation.

" Merci du conseil, Ningyo. "

J'agitais mes mains pour lui montrer ma gratitude afin de me défaire de me retourner pour lui signer quelques paroles.

" J'espère que tu as trouvé facilement ? Comme tu vois, c'est pas très grand mais ça me suffit amplement pour mes affaires. "

Un atelier modeste pour une modeste marionnettiste. Peut-être qu'un jour j'aurais les moyens de faire en sorte que cet endroit eut plus de gueule. En attendant, on faisait avec et cela me convenait très bien. Sans perdre de temps - et surtout pour ne pas faire perdre celui de mon camarade - je lui expliquais les raisons de sa venue et l'objectif qui était le mien.

" J'ai demandé à ce que tu viennes à la fois pour respecter ma promesse de te montrer l'atelier, mais aussi parce que j'ai besoin de tes compétences. "

Mon regard se tourna vers la poupée qui avait une allure humaine, avant de m'en retourner vers Ningyo.

" J'aimerais mieux utiliser mes fils de chakra, j'aimerais les renforcer. Je sais qu'il est possible de les rendre assez solide pour manipuler un corps humain mais je n'en ai pas la maîtrise. Tu saurais faire ? "

Posant mes yeux améthystes sur la silhouette de géant, je l'interrogeais ainsi du regard. Je n'étais pas certaine qu'il gérait l'affaire, j'en avais juste le pressentiment. Le bougre avait peut-être une personnalité un peu à part, il n'en demeurait pas moins un shinobi redoutable.. et surtout un Shirogane avant tout.

Technique à apprendre:

Technique à enseigner:

Ningyo le philosophe. Voilà qui m'arracha un sourire lorsqu'il aborda le sujet de nos ateliers. Si j'avais pas les idées tordues, j'aurais pu m'essayer à lancer une boutade sur le sujet des tailles, mais mon camarade avait un esprit si innocent qu'il était évident que cela tomberait à l'eau. Cela aurait pu faire marrer les frères Nozomo par contre, peut-être même qu'ils auraient fait la blague en premier.

' T'as sans doute raison. "

Est-ce que mon atelier me correspondait ? Je saurais pas trop le dire. Pour moi, il me semblait terriblement banal, un atelier de Shirogane avec son bordel, des caisses pleines de pièces diverses, des plans épinglés sur les murs, des outils à peu près rangés, un établi... rien de bien palpitant et que des choses assez sommaires en réalité. Y avait peut-être un lit de camp dans un coin, il m'était déjà arrivée de rester toute une nuit à bosser.

Quoiqu'il en fut, je demandais à mon jeune camarade s'il maîtrisait les fils pour en manipuler des humains, et plutôt que bavasser, il semblait plutôt prompt à me faire une démonstration directement. Je le vis créer quelques fils de chakra avant de les sentir se connecter à mes bras et jambes, comme si j'étais moi-même un pantin. C'était vraiment une sensation curieuse, j'avais pourtant déjà connu ça avant, je l'avais presque oublié... mais passons.

Comme j'étais bien évidemment consentante, je laissais mon géant ami me "manipuler". Ses doigts s'agitant dans l'air me poussèrent à danser... oui, oui, danser... Je pensais pas que Ningyo aimait ça. En tout cas, il semblait s'amuser jusqu'à me tirer vers lui et devenir véritablement mon cavalier. J'avais droit à la totale. La courbette et la valse. C'était étrange d'être invité par un géant, on se sentait... toute petite.

Outre la découverte des talents de danseur du marionnettiste, j'en appris involontairement sur la frangine de ce dernier. J'avouais que je n'avais posé aucune question à ce sujet. La famille tout ça, je me doutais qu'il dût bien en avoir une mais j'avais le respect de l'intimité... enfin généralement.

" Je vois... Désolée pour ta sœur. "

C'était assez sincère, bien que je ne la connaissais pas. Je supputais simplement que cela devait pas être évident. Bon après, c'était pas rare qu'un Shirogane utilisait sa science pour aider un autre Shirogane, notamment en cas de problème d'absence de membre. Il y avait toujours des exceptions, il suffisait de penser à la fliquette de Suna, Denya. Mais il me semblait me rappeler que son frère faisait partie de la maison.

" Est-ce que tu m'autorises à essayer de le faire sur toi ? Je veux dire, de te manipuler avec les fils ? "

Le temps d'avoir son approbation, je malaxais déjà mon chakra pour les créer, mais je ne savais pas trop comment les connecter à Ningyo. Techniquement, ça devait être comme une marionnette, mais notons que nous n'étions pas faits de la même matière, c'était pas la même accroche et ça demandait évidemment un peu plus de puissance. D ce que je savais, s'il se laissait faire, je pouvais améliorer sa capacité d'esquive.... encore fallait-il que je puisse l'aider dans ses mouvements.

Naturellement, je tentais une connexion avec mon camarade. Dix doigts, dix fils. Mais en réalité, je me contentais d'essayer de simplement manipuler ses mains. Le corps entier, je verrais après. Ma première tentative fut pas énorme. J'avais un fil sur deux qui tenait. Je râlais dans ma barbe comme on disait - je pouvais pas parler, ni utiliser mes mains puisque j'étais un peu prise. Puis quand je foirasse mon deuxième essai, je soupirais longuement avant de temporairement laisser tomber.

" Désolée. Laisse-moi le temps d'appréhender. "

Je finis par m'approcher de mon camarade et inspecter ses mains, non pas parce que j'étais une fétichiste mais parce que je voulais tenter de me connecter de mains à mains. Je plaçais donc la paume contre la sienne, avant de me mettre à malaxer mon chakra. Lorsque je reculais ma délicate menotte de sa grande paluche, des fils de chakra apparurent et je commençais à agiter mes doigts. Quand je baissais mon index, le sien en faisait de même. Pareil pour le pouce. Bizarre, mais drôle.

De ma main libre, je tentais de lui signer quelques mots pour savoir si mon approche était bonne ou pas.

" Alors ? C'est bien comme ça au moins ? "

On allait pas se mentir, je faisais un peu les choses au pif.

Technique à apprendre:

Technique à enseigner:

Ningyo était un drôle de bonhomme, surtout à la manière dont il causait. Je ne saurais dire ce qui clochait chez lui - si on pouvait dire les chose de cette façon - mais c'était un type singulier. Pas en mal, entendons-nous bien. Peu ordinaire serait sans doute le terme le plus approprié. Par contre, le fait qu'il parlait des problèmes de sa sœur comme si elle était une machine, ça, c'était un peu particulier. "Réparée". Je ne pus m'empêcher de hausser un sourcil lorsque j'entendis le terme avant de considérer que ce n'était qu'un trait de langage. À trop avoir les mains dans le corps des marionnettes, on finissait par avoir moins de considération pour le genre humain. Un mal Shirogane ?

Laissant tomber toutes ces choses pour uniquement me concentrer sur mon apprentissage, je tentais de me connecter à mon grand ami. Mais manipuler un homme vivant - ou qui l'avait été - c'était pas aussi simple que les apparences le laissaient croire. Avec une marionnette, on pouvait défier les lois du mouvement, avec un corps humain, on était contraint par des articulations qui faisaient pas des tours à trois-cent-soixante degrés. Même si j'en étais pas là, il me fallait garder ça à l'esprit.

Me voyant dans la mouise, le grand gaillard Shirogane m'expliqua que je devais prendre les choses de manière plus posée. Fallait pas que je me montasse le bourrichon de trop. Il me fallait commencer plus simplement en essayant de me connecter à lui de manière à l'accompagner et non le manipuler véritablement.

" Je pense que je saisis le concept dans les grandes lignes. "

Je fis une petite moue, montrant que je réfléchissais encore à comment apprivoiser la bête, avant de l'entendre me faire la comparaison avec une marionnette autonome. A ces mots je secouais la tête négativement.

" Mon pantin n'est pas aussi sophistiqué. "

Pour le moment, mes capacités d'ingénieries ne volaient pas très haut et sans doute trop proche de mon faible portefeuille. J'avais pas les moyens d'améliorer Itori à un haut niveau d'autonomie, bien que jadis, elle eut cette fonction... enfin l'une de ses versions du passé. Même si je ne me souvenais pas, j'avais sans doute dû créer de nombreux prototypes. Le plus abouti était celui qui avait volé en éclat en même temps que mes souvenirs. À mon retour, mon père avait réussi à me refabriquer quelque chose qui devait ressembler à l'original, mais dans une version simplifiée qui se basait sur des plans que j'avais dus laisser traîner.

Ningyo m'autorisa ainsi à m'exercer sur lui, il n'était visiblement pas inquiet. Moi non plus en fait. Il pouvait me broyer n'importe comment le grand dadet. Me concentrant à nouveau sur ma manière de malaxer mes fils de chakra, je décidais d'en créer des plus épais. À la vue des dimensions de mon camarade, cela me semblait plus adéquat. Cependant, plutôt que me lier à ces mains, je tentais de planter mes fixations sur ses jambes pour le faire avancer ou plutôt danser. Puisque je devais apprendre à suivre ses mouvements, l'exercice me paraissait plus judicieux de cette façon.

Mes fils s'encrèrent alors dans ses genoux, cuisses et chevilles.... et cela semblait tenir. Je me reculais pour tenter de le manipuler à distance et essaya dans un premier temps de le faire simplement avancer. Ce fut un peu... maladroit. Maladroit de ma part parce que je n'avais pas l'impression d'avoir spécialement un rôle. Il marchait. Point. Je supposais que je pouvais avoir mon influence si je lui faisais esquiver quelque chose ou bien si je forçais sur mes fils pour dévier sa trajectoire. C'était bêtement ce que je tentais de faire. Il voulait aller à droite, je forçais un peu pour lui faire comprendre d'éviter cette direction en espérant qu'il ne fit pas trop de résistance. Si tel était le cas, le fil allait forcément se casser. Sur le même principe, je voulais qu'il fît quelques pas de "danse" ou plutôt quelque chose qui y ressemblait pour essayer de rendre ses mouvements plus fluides. Mais honnêtement, pour pouvoir autant se laisser aller avec quelqu'un, il fallait que la confiance soit grande.

Technique à apprendre:

Technique à enseigner:

Focaliser sur ma tâche, mes yeux ne quittaient pas Ningyo. Je vérifiais que mes attaches étaient toujours bien ancrés sur ses membres, que mes fils n'allaient pas lâcher ou casser.Je tâchais de laisser mes doigts danser du mieux qu'il pouvait pour le pousser à bouger comme je le voulais. Mais autant avec une marionnette qu'on avait fabriqué, c'était relativement aisé parce que je connaissais chaque rouage, autant sur le corps d'un homme, aussi grand que Ningyo qui plus est, c'était vraiment un tout autre délire.

Mes débuts étaient clairement pathétiques. Mon camarade bougeait de façon totalement... robotique. Comment pourrais-je le faire combattre de cette façon ? Cela manquait de fluidité, une évidence qui me fit afficher une moue d'agacement. Cela commençait à me gonfler. Pourtant, le géant Shirogane m'encourageait, il se laissait faire, jouant le jeu. Il s'en voulait même de pas être le partenaire idéal, ce à quoi, j'agitais négativement la tête. Non. C'était clairement pas sa faute. C'était à moi d'être plus douée que ça.

" T'inquiète pas. C'est pas toi le problème. "

Je fis quelques signes brefs, alors que je n'avais pas coupé le contact avec mon jeune camarade. Il ne me fallait pas abandonner.

" Je sais que c'est un peu bizarre à te demander, mais relâche-toi totalement. Fais-moi confiance pour cette fois. Je te ferais rien faire de mal. "

Peut-être lui demandais-je beaucoup. Se libérer totalement, se lâcher, c'était pas le plus facile à faire. Lui demander de me faire confiance, c'était peut-être le pire. Fallait pas se voiler la face, techniquement, moi et Ningyo, on se connaissait pas des masses. On ne s'était jamais fréquenté jusque-là et on était pas de la même génération de shinobi. On était même jamais sorti boire un coup et honnêtement, il avait pas la tête à être de ce genre-là.

Quoiqu'il en fut, après lui avoir demandé de se détendre, je me lançais à nouveau dans cette quête de juste milieu. Il me fallait "l'obliger" à suivre mes indications, à s'abandonner afin que je décidasse pour lui de la direction à prendre. Ainsi, je me mis à le faire bouger à droite, à gauche. J'avais tenté de le faire soulever une caisse tout près de là et la déplacer. Des choses assez basiques pour mieux me faire à l'idée de la manipulation d'un corps humain. Plus je m'y persistais, plus je m'améliorais. J'avais moins d'appréhension au fur et à mesure des minutes.

" Je vais peut-être abuser, mais je voudrais essayer quelque chose si tu veux bien. Je sais que tu te bats pas avec une épée, mais moi si. Tu vas devenir mes bras. "

L'idée était de voir si je parvenais à parfaitement faire de lui une extension de moi-même. Puisqu'il ne maîtrisait pas le kenjutsu, je pourrais mieux analyser les blocages et les moments où je n'avais pas la main sur ses gestes. Ainsi, j'amenais mon grand ami dans ma direction, toujours sous le joug de mes fils et lui fit sortir ma lame de son fourreau, pendant à ma ceinture. Je le manipulais toujours pour l'écarter de moi et le placer devant un mannequin d'entraînement. Je me disais que de cette façon, il serait peut-être moins inquiet.

Ce fut ainsi que je commençais mon ballet d'épéiste. Je le fis "jouer" avec mon katana comme si lui-même était un sabreur. Il pouvait ainsi découvrir des postures et des gestes de manipulateur d'épée, certain fonctionnement d'estocades et d'évitements. Bref, Ningyo devenait un escrimeur d'un jour.... et moi une meilleure utilisatrice des fils Shirogane ? Je l'espérais à vrai dire et même s'il me parut difficile de me juger moi-même, je constatais que mon aisance s'améliorait. Étais-ce mon idée d'utiliser le kenjutsu à travers le jeune géant ou bien lui qui me faisait plus confiance ? Difficile à dire. En tout cas, au bout d'un long moment d'exercices, je finis par abandonner ma connexion.

" Je sais que ce n'est pas parfait, mais je commence à mieux saisir le truc. "

Nonchalamment je m'avançais vers lui afin de récupérer ma lame.

" Merci Ningyo. De m'aider. Je t'en dois une. "

Et j'étais le genre de femme à payer ses dettes... du moins, j'essayais.

Technique à apprendre:

Technique à enseigner:

J'étais pas peu fière de moi, même si bien évidemment, il y aurait plusieurs petits détails à peaufiner. Le plus gros de l'entrainement était fait et au pire des cas, je pouvais demander à mon vieux de me resservir de cobaye pour améliorer mon jeu... voire peut-être à Yukio, mais j'étais pas certaine qu'il apprécierait d'être manipulé... quoique, il pouvait se révéler curieux de l'expérience. Enfin bref, je me sentais capable de manipuler un type quoi, je voyais maintenant où cela pêchait et la différence avec un corps de bois.

Mais le plus drôle ? Les félicitations de Ningyo. Les intentions de ce garçon partaient toujours d'un bon sentiment, mais ça me faisait drôle qu'un adolescent géant me complimenta comme une élève. Jouant le jeu néanmoins, je tapais dans sa main en gage de ma réussite et lui adressa un pouce de la victoire. Sur cet entre-fait, je me mis à farfouiller dans mes poches pour récupérer mes clopes. Je méritais bien de m'en griller une, non ? Sans tarder, c'était ce que je fis avant de me donner la peine de répondre à mon jeune ami.

" Un peu que je passerais mater ton atelier. S'il est à ta taille, ça doit bien valoir le coup d'œil. "

Un atelier de géant, ça devait grouiller de merveilles. Peut-être même que ça me donnerait des idées pour la création de prochaine marionnette. Je n’avais jamais craché sur l'idée de trouver mon inspiration ailleurs. D'ailleurs, mes multiples visites chez les Nozomo m'avaient donné quelques illuminations, j'avais fait quelques croquis par-ci par-là, mais bon. Rien de concluant.

" Si en plus, tu peux me donner quelques conseils, je prends."

Je finis mes signes, puis pris une grande bouffée de ma cigarette que je coinçais à nouveau entre mes lèvres. J'avais pas oublié que je lui en devais une, mais je comptais pas ma future visite comme tel. C'était que du bonus.

" Maintenant que tu m'as aidé, c'est à mon tour. Ce serait plus simple que je te présente la chose ici, plutôt que chez toi. Si y a de la casse ici, ça sera pas bien grave. "

Sur ces mots, je me réappropriais ma marionnette. Si jusque-là, elle ne m'avait pas servi outre-mesure, j'en avais besoin pour mes explications futures.

" Tu vas voir, ça peut paraître un peu con au début, sauf que si tu veux faire chier ton adversaire et l'empêcher de voir ce que tu fais... c'est pas mal. "

Je me connectais immédiatement à ma poupée, mais je me permis de donner une courte explication supplémentaire.

" Le principe, c'est d'utiliser ta marionnette pour perturber le champ de vision de ton adversaire. Le but est de le harceler en faisait tourner cette dernière à grande vitesse autour de lui. Du coup, bouge pas, je vais te montrer. "

Sur ces paroles, je commençais à animer Itori, et la gamine de bois se mit à courir en cercle autour de Ningyo. Là, grâce à ma connexion avec elle, je lui fis rapidement prendre de la vitesse au point qu'elle décolla littéralement du sol. Elle se mit à tournoyer si vite qu'elle créa une sorte de voile circulaire autour du géant pour me rendre à peine distinguable. Au bout de quelques minutes, je finis cependant par lâcher l'affaire et ma marionnette revint vers moi.

" C'est une technique à but plutôt défensif. Si tu as en plus la possibilité d'optimiser tes liens avec ta marionnette, tu pourrais même en utiliser deux. "

J'étais pas certaine que la chose le séduisit. Le type était une défense à lui tout seul, vu comment il était gaulé.

Technique à enseigner:

C'était étrange de le voir rire aussi simplement. Si Ningyo avait une attitude un peu étrange, l'entendre se laisser de cette façon le rendait bien plus sympathique... ou plus normal ? Bien que techniquement, il l'était. Juste un peu particulier. Et comme s'il avait décidé de montrer un nouveau visage en ce jour, voilà qu'il se mettait à rougir à la simple idée que je lui demandasse des conseils. Ma clope en bouche, j'eus un petit sourire en coin.

" Te fous pas la pression. Si je comprends pas, je te le dirais. Et si je capte toujours rien, ça sera pas grave. À moi d'avoir des méninges plus réactives. "

Un fait. Je supposais qu'il était trop facile de dire que si on comprenait rien, c'était la faute de l'enseignant. Personnellement, j'étais pas un génie et je savais pertinemment que j'étais pas une maniaque des bouquins ou de la lecture de parchemin. Le truc, c'était simplement trouver la méthode pour faire passer l'information. Si ça passait pas... bah peut-être qu'on était pas fait pour ça et qu'on avait pas les neurones bien alignés.

Laissant rapidement cette conversation de côté, je m'attelais à lui montrer comment fonctionner la technique dit "illusion du vent blanc". Le temps de faire joujou avec Itori, que je laissais déjà la place à notre grand dadet de Shirogane. Sa cible fut ma propre poupée. J'avais rien contre personnellement, et je la laissais trôner en plein milieu de la cour pour que Mereus s'adonnât à lui tourner autour. En soit, c'était assez drôle. C'était comme si une marionnette faisait une parade devant une autre.

Comme un bon professeur, je pris un peu de recul de façon à avoir une meilleure vue d'ensemble sur ce que faisait mon camarade. Toujours ma cigarette en main, crachant des ronds de fumée, mes cheveux commencèrent à voltiger sous le vent créer par le tournoiement de Mereus. Ningyo parvenait avec une surprenante facilité à engager son patin dans la course folle autour d'Itori, au point que je commençais à difficilement la percevoir. Est-ce qu'on pouvait parler de petit génie dans son cas ? Pas loin. Il captait plus vite que la normale en tout cas. Du bol pour moi, parce que ça m'éviterait de trouver cinquante manières d'expliquer les choses. Sauf que mon espoir s'envola comme la cendre de ma clope.

Sur plusieurs tentatives, si tout se passait bien au début, à partir d'un certain pic, tout capotait et je vis très rapidement la frustration dans le regard de Ningyo. Pour le rassurer, j'eus un petit sourire en coin. Il y avait rien de grave, c'était juste que les fils s'emmêlaient et finissaient par céder sous la pression. Quand on se trouvait au-dessus de notre adversaire, le problème se posait pas. Quand on lui faisait front, c'était un autre délire.

" T'as déjà fait de la corde à sauter ? Ou vu des gamins en faire ? "

Je vins me poster à côté de lui, regardant ma marionnette toujours immobile.

" Le problème, c'est pas ta rapidité et c'est pas vraiment tes fils. C'est juste qu'avec ta position actuelle, tu les croises et ça craque. Faut que tu voies cela comme un jeu de corde à sauter pour faire tourner Mereus autour de ta cible. Il te faut trouver le bon timing."

J'étais pas certaine d'avoir été aussi claire que je le voulais.

" Essaie à nouveau. Ça devrait aller mieux. "

De simples signes, une petite tape amicale sur l'épaule, et je reculais à nouveau pour prendre ma place de spectatrice. C'était à lui de jouer.

Technique à enseigner:

Mauvais choix d'exemple. J'aurais pu sans doute le deviner à sa dégaine, mais j'imaginais qu'avant de devenir un géant, il devait être un gosse tout à fait banal, non ? Peut-être pas. Du coup, je me retrouvais avec le problème sur les bras et de trouver une bonne façon de lui faire comprendre le processus. L'image d'un jeu d'enfant m'avait semblé opportun, mais si ce n'était pas la came de Ningyo, je devrais me creuser le cerveau pour autre chose. M'enfin, j'étais techniquement mal placée aussi, j'avais jamais joué à ce genre de jeu, mais j'avais déjà observé des marmots s'occuper de cette façon.

Cependant, au moment où je me grattais la tête pour essayer de cogiter à une autre métaphore, le géant Shirogane eut une illumination. Parfait. Crachant la fumée de ma clope sur le côté, je levais mon pouce pour lui signifier que c'était top et dans ce cas, c'était à lui de briller sur le terrain. Prenant le recul nécessaire, je me mis à l'observer. Il était impressionnant le dadet, il comprenait vite. J'avais déjà eu l'occasion de le constater. Les trucs techniques, ça lui montait vite au cerveau. Il savait où poser les pièces, comment enchainer, une vision du monde où les choses pouvaient s'emboîter impeccablement. Par contre, il avait une personnalité digne d'un gosse malgré ses... combien déjà ? Il devait pas être si loin de la vingtaine. J'avouais que je lui avais pas demandé, mais c'était un gamin. Enfin par rapport à moi. Sa manière de répondre et son attitude me laissaient clairement douter de sa maturité. C'était un mélange sacrément bizarre.

Qu'importait toutefois la vérité à son sujet, du moment que je perdais pas un temps de dingue en explication, c'était parfait. Au but de plusieurs essais, il finit en effet par maîtriser ce que j'avais tenté de lui expliquer. Mereus tournoyait autour de Itori jusqu'à ce que je ne puisse plus la percevoir. Il prenait assez de vitesse pour troubler la vision et ses fils de chakra tenaient le coup. Comme pour s'assurer qu'il gérait bien le geste, il se décida à me prendre pour cible.

Super.

Je dirais pas que j'eus un moment de flip, mais bizarrement, je me sentais pas à l'aise non plus. Sa marionnette tournait à fond, je sentais mes cheveux volés dans tous les sens, et le vent qui se dégageait réussit même à m'éteindre ma cigarette. Il me fallut atteindre qu'il se décida de stopper son affaire pour répondre, parce qu'avec ce tour de manège, impossible pour lui de m'apercevoir.

" C'est pas mal. Clairement mieux que sur ma marionnette. T'apprends vite visiblement. "

J'avais envie de dire : chanceux. Quand je pensais au nombre d'essais que généralement un entrainement me réclamait... Mais le monde était ainsi fait. Il y avait des gens plus doués que d'autres. Prenant mon temps pour rallumer ma clope, je fis quelques pas en direction de Ningyo.

" Je crois qu'on peut dire que t'as maintenant les bases. Entraîne-toi encore un peu. Tu peux même jouer avec cette technique en incluant une seconde marionnette. Cela mettras à l'épreuve ta dextérité et ta cervelle. "

Quand je parlais de matière grise, je faisais référence à la mise en place d'une tactique, au choix du manipulateur. Je savais pas si mon camarade était du genre vicieux en combat, mais s'il était, cette bricole lui serait utile.

" Bon. Je dirais que c'est bon pour moi en tout cas. L'après-midi a filé plus vite que ce que j'imaginais. J'ai encore des bricoles personnelles à faire, mais je pourrais venir de voir demain si t'es libre. "

Je finis mon discours et mes gestes, posant mes yeux améthyste sur sa grande dégaine.

" Si t'as plus de questions, on a plus qu'à ce dire à demain. "

Bah quoi ? J'allais pas l'inviter à dîner, non ? En plus, j'avais vraiment du boulot, fallait que j'améliore ma poupée et ça se ferait pas en se regardant dans le blanc des yeux, hein. Cela me faisait penser aussi que je devais trouver un boulot qui payait bien.... c'était chiant d'être pauvre.

Technique à enseigner: