L'Art du soin II - Avec Uchiha Akira

L'Art du soin II

Il s’était passé tellement de choses depuis notre dernière entrevue… Bien sûr je l’avais recroisé, souvent entendu au détour d’une ruelle, mais je n’avais pas pris le temps de m’y arrêter. Ma grand-mère était morte, Kyoshiro aussi. J’avais plongé dans les arcanes les plus sombres de mon clan et je n’étais plus vraiment moi-même. Une ombre colérique, destructrice qui avait du mal à retrouver son humanité. J’oscillais toujours entre différentes émotions, réalités aussi. Je n’étais plus et depuis quelques jours, Yuriko avait aussi tiré sa révérence. Elle était toujours en vie, mais plus vraiment elle-même depuis longtemps. Plus vraiment présente, plus vraiment celle sur qui je devais me reposer pour refaire surface. Alors j’étais intrigué. Que pouvait-il bien attendre ou vouloir de moi et est-ce que je voulais le revoir, le retrouver ? Il était une page du passé, celui où la médecine n’était qu’un art incertain que je n’essayais pas de corrompre pour faire revenir ceux que j’avais perdus. Il était étrangement lumineux dans cet univers sombre et brutal. Il n’avait peut-être plus sa place dans mon univers aujourd’hui.

Pourtant je finis par y aller, l’esprit usé par ce que j’avais encore eu à faire. Pour tenir le cap. J’avais quitté le clan Tadake, refusant de m’imposer à Yuriko, pour retrouver cette maison froide et poussiéreuse chez les Uchiha. Au moins personne n’y avait touché depuis sa mort. À défaut de lui avoir offert une fin digne d’elle, ils avaient au moins respecté sa mémoire. Personne au sein du clan ne m’avait retenu ou arrêté lorsque j’y étais retourné tel un spectre. Personne n’était aussi venu à ma rencontre depuis qu’il était à présent établi que j’y vivais à nouveau. Dans un sens, mon père avait réussi. J’avais retrouvé le clan, je m’étais assombri et noyé dans la violence et maintenant… Maintenant je luttais. Hako, Yume et même Yuriko ne devaient pas faire face à cette nouvelle réalité. Je devais revenir pour elle.

Pourtant j’avais fui dans les ténèbres. Je m’y étais noyé.

En sortir pour rejoindre le Kamiko ne serait en rien une amélioration.

Arrivant au clan, l’on m’avait indiqué et accompagné jusqu’à une serre où l’homme se trouvait. Il semblait pris dans ses pensées, plus étrange que jamais et pourtant, je n’eus aucun mal à rompre sa tourmente en me signalant à lui. « Bonjour. » soufflais-je dans un premier temps. Mon regard, vide de toute émotion, balaya les lieux, notant chaque chose pour finalement revenir sur lui, « Cette invitation avait de quoi surprendre… » ajoutais-je d’une voix blanche. Qu’attendait-il de moi ? Cette invitation avait-elle un lien avec la récente démission de Yuriko ? Attendait-il plus d’informations ? Ou n’y avait-il rien de suspect à cette invitation ?

Mon esprit était corrompu par la noirceur. J’en voyais partout, quelles que soient les situations…

ft. Fumetsu

L'Art du soin II

Il était toujours aussi étrange, à la différence près qu’aujourd’hui, il ne m’intimidait plus. Serait-ce d’être devenu un monstre ou simplement la maturité ? Je n’en savais rien, mais il était certain que je pouvais le voir et l’écouter avec plus de lucidité que jamais. S'il avait vécu pour lui, il semblait plus à même de se tourner vers les autres aujourd’hui et évoquant le décès de ma grand-mère, il semblait penser que renouer nos liens serait important. Il voulait m’apprendre, mais au détour d’une phrase, il évoqua le fait que j’avais moi-même gagné en maitrise. Notre relation avait-elle une importance face à sa propre progression ? La paranoïa de ma haine semblait penser que non et pourtant je restais là, sagement immobile, prêt à me décider sans pour autant le faire.

Fronçant légèrement les sourcils lorsqu’il se plongea dans une tirade sur la mort, je ne pouvais nier une certaine sagesse ou intelligence que je n’avais pas pour prendre le même recul que lui. Je n’étais pas prêt à accepter la mort, sinon je n’aurais pas perdu autant de temps à en apprendre. Sinon la médecine n’aurait aucun sens, « Pourquoi soigné dans ce cas ? » demandais-je alors qu’une pointe d’amertume nouée ma gorge, « Cet art dont vous souhaitez m’abreuver, ou inversement, qu’importe, n’est-il pas là pour tromper la mort ? », je savais bien qu’une grande part de sa sagesse m’échappait, ou du moins que je refusais de l’entendre. Mais avais-je tort ? Je me fichais bien de mourir, c’était l’impact de ma vie sur les autres qui me dérangeait. C’était mon refus de les voir partir le problème, à moins que ce soit juste ma faiblesse à les défendre.

Si la mort devait être le sujet de notre entrevue, alors je ne resterais pas. La colère grondait trop pour que je l’accepte. « Mais vous avez raison sur un point, je ne suis plus celui à qui on devait apprendre. » ajoutais-je en sentant mes muscles se tendre sous ma peau. « Et j’ai appris que c’est dans les ténèbres qu’on apprend le mieux. », une façon comme une autre d’annoncer ce que j’allais lui offrir. Une distraction, rapide, pour ne plus parler de cette mort qui me rongeait, qui me consommait.

Composant une nuée de Mudra, je finis par traverser l’espace entre nous pour frapper son front avec une certaine violence. Sans attendre, j’y injectais suffisamment de chakra pour m’en prendre à un de ses sens les plus importants. La vue. Elle dût se brouiller avant de cesser, le plongeant ainsi dans une obscurité où seuls ses souvenirs lui permettraient de voir encore. « Les sens sont une arme mortelle, mais la vue est celle des illusionnistes dont-il peut être difficile de se défaire. », comme moi. Lui donner les armes pour me mettre à terre ne serait pas une bonne chose et pourtant, c’était réfléchi. Je sombrais sans réussir à me remettre sur pied. Il ne me restait plus qu’Hako et Yume, plus que la volonté de faire plier un clan, mais si j’échouais ? De quelle folie serait pris mon esprit ? Il me fallait quelqu’un pour me stopper avant que la noirceur de mon sang me fasse oublier mes combats, mes amis. J’allais lui apprendre comment mettre à genoux mon clan, moi. Comment me contenir, ou comment m’aider à les faire plier… « Essaie de comprendre. » ajoutais-je de la voix plus froide alors que je me reculais. Le bouclier ou l’épée ?

ft. Fumetsu

L'Art du soin II

Il faisait vibrer une part de mon âme que j’essayais au plus profond de moi de faire taire. Une part de moi brutale. Le silence fut ma réponse, car il n’y aurait rien que je puisse dire qui ne puisse pas me trahir en cet instant. Je préférais les gestes aux mots aujourd’hui. Je n’étais plus un élève, j’avais dépassé ce stade depuis longtemps. Frappant sa tête au lieu de son esprit, je le rendis aveugle, me libérant de ses réflexions en le forçant à réfléchir, à trouver. Je ne voulais pas le faire taire, je voulais juste ne plus avoir à penser à ce qu’il pouvait éveiller. Je voulais maitriser la discussion et son esprit ne pouvait refuser une énigme. Je le connaissais assez pour ça, comme je savais que ça ne pourrait être que temporaire.

Il rentra toutefois dans le jeu, révélant au passage ses yeux que je n’avais pu voir jusqu’à présent. Il avait compris. Il avait saisi la base théorique de cette technique. Endommager le système nerveux en frappant le nerf optique. Il avança des théories qui étaient bonnes. Il n’avait pas besoin d’un livre pour être bon. Il avait son esprit. « Un civil perdrait la vue à jamais. » soufflais-je alors qu’il retrouvait la lumière. « En fonction de l’influx, le temps de la cécité variera, ses dégâts aussi. » ajoutais-je en activant simplement mon sharingan. « Elle me privera de mon Sharingan tant que l’influx n’est pas rétabli, ou que je ne me soigne pas. », c’était le moyen le plus simple pour lui de visualiser son avancée. « Désactivez mon Sharingan. » lui ordonnais-je presque. Il fallait que je l’arme exactement de la bonne façon. Qu’il devienne ce danger réel qui pourrait me contrer si mon clan finissait par me consumer. « Il faut un coup à la tête, plus proche des yeux il sera, plus efficace il sera. La tempe est un bon endroit, même si la base de la nuque et la présence de la colonne pourrait très bien faire l’affaire. », qu’il y arrive, juste qu’il devienne cette épée pouvant trancher la tête de l’hydre.

L’arrogance du danger que je pouvais représenter était importante, mais je n’avais plus rien de raisonnable depuis trop longtemps. « Le Ranshinsho est une bonne base pour la compréhension des influx nerveux, il faut juste savoir le faire toucher avec plus de précision le nerf optique. », une technique que je connaissais sans la maitriser, mais un moyen comme un autre de le guider. Ma voix était toujours grave, froide, emprise d’une urgence qu’il ne devrait sans doute pas saisir. « Faire varier le nombre de tomoe pourrait être un bon indicateur d’avancée. Essayez. Jusqu’à ce que le chakra manque. » ajoutais-je droit, volontairement docile face à un danger qui aurait dû faire fuir plus d’un Uchiha.

ft. Fumetsu

L’Art du soin II [avec Akira]

Tandis que l’Uchiha lui expliquait d’un air détaché les tenants et les aboutissants du sortilège, le Kamiko ne pouvait pas s’empêcher d’imaginer l’immense tristesse contenue qui s’amoncelait en nuage noir derrière ces yeux. Ce je-ne-sais-quoi de merveilleux mélancolique provoquait chez certaines personnes des résultats étonnants et chez l’intendant de Konoha, des airs mortifères creusaient son visage, ses pensées et sublimaient ses actes. Ne pouvant s’empêcher de sourire, Fumetsu ressentit à la lisière de son esprit un doux rire. « Regarde-le. Il me supplie de le supprimer. Peint-le. Titre du tableau : « Abysse ». » Et effectivement, le jeune homme semblait prédestiné à sombrer dans un gouffre sans fond et sans nom. L’abandon – et la méprise du soi – évident avec lequel il s’exprimait faisait frémir d’excitation Fumetsu : une sensation disparue, quoique jamais définitivement, qui se promenait le long de son échine. Face à lui, là, à quelques centimètres, les sharingans rougeoyaient malgré la légère teinte voilant la beauté naturelle des pupilles. L’interaction d’une dangerosité sans nom se revêtait d’une sensualité exquise pour qui versait dans l’adoration de cet Art sublime qu’est la Mort. Se frottant le menton à l’écoute des explications, il se concentrait de nouveau, authentiquement intéressé bien que le doux souvenir de son obsession passée venait le hanter et le détourner de ses réflexions. Néanmoins, ne laissant rien paraître derrière le masque habituel de l’insolence et de l’orgueil, il résuma d’une voix guillerette et mélodieuse.

« Si je résume bien, sans m’attarder sur les alarmantes fluctuations de ta voix, il faut préparer un influx de chakra en amont de l’impact ; suffisamment bien dosé, cela va de soi. La puissance de la frappe ne change nullement le résultat, n’est-ce pas ? Alors une petite tape sur le front, au plus proche des yeux – la tempe, la base de la nuque, pourquoi pas –, c’est que je refuserai de vous endommager de manière permanente. Laissez-moi le temps de maîtriser les aléas de la médicine avant de vous frapper… » Il riait alors, souriant d’un air convenu et se leva pour pratiquer.

Les afflux de chakra dédiés à la médecine différaient radicalement avec le pouvoir artistique et sempiternel des Kamiko. La sensation que celui-ci procurait à son corps quand il parcourait librement son corps, la facilité avec lequel le malléer et le conduire jusqu’au bouquet final. Heureusement que l’esthète considérait la technique médicinale comme un Art ; tant et si bien qu’il modifia son corps irrémédiablement, prouvant sa supériorité sur la Mort. Fumetsu était Art. Fumetsu était Immortel. Alors il s’échinait à propager son chakra dans son corps s’amusant à titiller de temps en temps les centres nerveux afin de déterminer le niveau de décharge adéquat pour provoquer un aveuglement temporaire. Le concept en lui-même ne différait pas totalement de ranshinshô, en effet. Le Kamiko dansait subrepticement, alors, s’amusait et laissant s’échapper quelques petits rires gracieux tandis que le chakra dansait, lui aussi, en lui. Il lui fallait maintenant convoyer le chakra dans un seul but : le nerf optique. Son premier essai, il le fit sur lui-même et réussit à provoquer un aveuglement partiel. « C’est une tout autre paire de manche d’aveugler plutôt que de s’en libérer. Il faut doser parfaitement sinon – et ce serait une tragédie – il me faudra récupérer des yeux pour remplacer les miens… » Las de soi-même, il impulsa une nouvelle fois une décharge pleine dans le nerf optique et les ténèbres enveloppèrent le monde.

Ouvrant les yeux dans un noir suprême, il riait alors, étirant ses traits arachnéens dans un sourire onirique. « J’arrive, Akira. Je vais pouvoir remplacer la beauté rougeoyante de tes yeux par l’immaculée blancheur. » En son cœur, l’artiste souffrait d’un dilemme. Et si… ?

Récapitulatif combat:

Codage par Libella sur Graphiorum