Les temps sont difficiles mais bien plus encore pour ceux qui n'ont pas la chance d'avoir un bon foyer et être né du bon côté de la barrière. Bien qu'il ne soit pas étendu, il existe un quartier assez pauvre à Konoha, au nord du village où se sont rassemblés une tranche de la population qui n'a pas su remonter les difficultés de la vie. Toutefois, depuis peu, les choses tourneraient au vinaigre. On rapporte que de nombreuses rixes s'y déroulent. La tensio grandit et le conseil craint que cela finisse mal. Veuillez vous rendre dans le quartier pauvre et voir ce que vous pouvez faire pour aider la population, et surtout faire en sorte que les violences cessent.
Commanditaire : Le conseil de Konoha Récompense :60 ryôs
Straight outta Konoha
Avec un œil perplexe, Shishio contemplait le ciel gris qui s’étendait paresseusement au-dessus de Konoha en cet humide jour de février. Assis en tailleurs sur une échoppe au toit mal entretenu, il avait croisé les bras pour mieux se croiser la tête en attendant que sa partenaire du jour le rejoigne.
Quelques jours seulement après avoir pu remettre le pied sur le terrain des missions, le bureau du Hokage lui avait fait parvenir un ordre peu orthodoxe – en raison de son expérience dans le contrôle de foule au sein de la police militaire des Uchiha, il avait été désigné pour assister Hyuga Chiyo dans une mission consistant à calmer les relents de querelles entre bandes organisées dans le quartier le plus pauvre de Konoha. Dame Hokage, cependant, était mieux placée que personne pour savoir que « l’expérience » de Shishio au sein de la police militaire ne valait pas un clou. Pendant les deux ans qu’il y avait passés, il avait été le pire boulet que la milice Uchiha ait jamais eu à se traîner, s’attirant les moqueries et la colère de tous ceux qui avaient eu le malheur de travailler avec lui. De toute évidence, ce n’était pas pour cette raison qu’on l’avait envoyé sur place – même si c’était, sur le papier, une excellente justification pour qu’il soit sur cette mission sans que personne ne s’en étonne.
Connaissant sa tutrice, il n’avait donc qu’une petite poignée de possibilités pour expliquer sa présence. Soit elle souhaitait qu’il apprenne quelque chose sur lui-même au cours de cette mission… Soit elle souhaitait qu’il rencontre quelqu’un. Il ne connaissait la demoiselle Chiyo que de nom – obsédé comme il était par l’étiquette, il aurait été bien surprenant qu’il ne retienne pas le prénom de la Princesse Hyuga en personne – aussi il était bien trop tôt pour comprendre ce que Yurikô espérait de lui, cette fois-ci. Dans tous les cas, cette situation ne lui plaisait pas. Il faisait confiance à la Tadake et savait que, d’ici la fin de cette journée, il finirait par tomber d’accord avec elle ; c’était le flou qui précédait cette révélation qui le dérangeait véritablement.
Toujours était-il que, jusqu’à ce qu’il comprenne pourquoi lui, il lui restait une mission à accomplir. Ne sachant trop comment se présenter pour visiter un quartier pauvre, il avait décidé de faire sans ses habits marqués du signe des Uchiha cette fois-ci : après tout, il était bien placé pour savoir que son clan attirait de nombreuses rancœurs, particulièrement chez les habitants les plus défavorisés de Konoha. Il s’était donc vêtu d’un simple survêtement aux couleurs sombres brodé en fil rouge sombre de la feuille du village sur les épaules et le dos – une tenue sobre au possible – et s’était chargé de son sac à dos aux nombreuses lanières internes pour y stocker autant d’armes qu’il le pouvait. Il n’avait aucune idée de comment cette mission tournerait ; il espérait que tout puisse se régler par la diplomatie, mais il avait vu suffisamment de rixes entre organisations urbaines pour ne pas vouloir prendre un tel pari. S’il fallait se battre… Eh bien, au moins, il y serait prêt.
Entendant derrière lui les pas de la demoiselle Hyuga, il se retourna pour mieux la saluer d’une basse révérence.
« Dame Chiyo, » commença-t-il simplement, « mon nom est Uchiha Shishio. J’ai été choisi par nos supérieurs pour vous assister au cours de la mission d’aujourd’hui, je suis à votre service. »
Après avoir marqué une pause, il jeta un œil vers la rue qui se trouvait en contrebas, en face du bâtiment sur le toit duquel il s’était installé.
« Cette rue était le théâtre du dernier incident qui a lieu, » expliqua Shishio, « il y a trois jours de cela. Apparemment, le gérant de ce magasin était présent. J’ai supposé que ce serait une première piste digne de ce nom – l’interroger pourrait nous mener aux chefs des bandes en place afin de comprendre les doléances de chaque parti. Qu’en pensez-vous ? »
Il fallait le voir pour le croire. Il y avait encore des garçons polis dans ce monde. Devant tant de déférence de la part du jeune Uchiha, Chiyo sourit gentiment. Elle devait avouer qu’elle était plutôt ravie de ce spectacle. Elle inclina la tête en réponse à son camarade :
« Hyuga Chiyo, ravie de vous rencontrer »
Bien qu’il connût déjà son nom, la moindre des politesses était tout de même de répondre à ses présentations. Évidemment, le garçon avait pensé à tout, laissant Chiyo tel un poisson hors de l’eau. Elle le sentait mal. Deux descendant de clans riches et puissants, figures de proue du village … Quelque chose allait mal tourner et c’était évident pour la belle danseuse. Ravalant cette idée, elle hocha la tête suite aux explications de Shishio.
« Effectivement, c’est un bon début. Par mesure de sécurité … je suggère qu’on emploi un henge. Nos clans ne pas vraiment les plus appréciés ici. »
Il n’y avait pas à nier que les Hyuga et les Uchiha étaient diamétralement opposés à la population de ce quartier et qu’au final, bien que Shishio et Chiyo étaient de fiers shinobi du village, ils restaient des étrangers qui n’avaient aucune chance de comprendre. Du moins, se serait ainsi qu’ils seraient perçus par les citoyens et cela rendrait leur tâche incroyablement plus difficile.
« Commençons par aller voir la boutique, on verra ensuite quelle approche serait la meilleure. »
Sur ses paroles, la jeune femme employa un henge avant de descendre de son perchoir dans la rue. Derrière sa nouvelle apparence, on ne voyait pas ses yeux dont elle était pourtant si fière ou même les traits les plus classique des Hyuga : leur peau pâle comme la neige ou même les cheveux de jais porter par la plupart d’entre eux. Non, un teint légèrement bronzé, des cheveux mi-longs bruns et des yeux de la même couleur. C’était passe-partout et elle se doutait qu’ainsi elle n’attirerait pas l’attention trop sur elle. Déjà que sa posture bien trop droite ou même son maniérisme était suffisant pour vendre ses origines. Au moins, ce n’était pas comme si elle se pavanait Byakugan en vue de tous, en les narguant.
« Excusez-moi, le conseil du village nous envoie. On se demandait si vous saviez quelque chose par rapport aux incidents qui ont eu lieu ici. - Ça s’voit qu’z’êtes pas du coin, hein. En vrai, c’pas comme si y’avait d’quoi d’nouveau. C’est les gosses. C’est toujours les gosses. Ils veulent de l’argent faciles et après ça tout croche. C’pas toujours facile de pas v’nir d’un bon clan ou juste de pas être ninja. C’est l’argent qui manque ici. »
Ce n’était pas exactement le genre d’aveux que la belle Hyuga s’attendait d’entendre. Non seulement elle n’avait rien tirer de pertinent, mais en plus, elle avait l’impression que le tout devenait un poil plus compliqué. Mais devant l’air confus de la jeune femme, le marchand éclata d’un rire gras avant d’ajouter :
« Écoutez, toué deux, passer à l’orphelinat, la moitié des fauteurs de marde viennent d’là. Z’allez comprendre un peu plus. »
Lentement, Shishio hocha la tête. Il avait pris la peine de changer de tenue pour ne pas être immédiatement identifié comme un Uchiha, mais une précaution de plus ne pouvait pas faire de mal. Suivant de près sa partenaire, il joignit ses mains entre elle, malaxant son chakra rapidement. Murmurant le nom de la technique entre ses dents pour mieux se concentrer sur son exécution, il ferma les yeux tout en visualisant l’apparence qu’il adopterait. Quand il les rouvrit, ses iris étaient bruns plutôt que noirs. Il avait grandi d’une bonne dizaine de centimètres et ses épaules étaient plus larges qu’auparavant ; sa mâchoire était plus carrée et ses traits moins délicats, sa chevelure plus longue était désormais réunie en une courte queue de cheval à l’arrière de son crâne. Pour le dire crûment, il était passé de son corps d’adolescent élancé à celui d’un homme digne de ce nom. *Un déguisement n’est complet que si l’on y adapte ses manières,* se disciplina-t-il intérieurement tandis qu’il vérifiait que les changements physiques prévus avaient bien eu lieu. Aussi, lorsqu’il descendit du toit pour suivre Chiyo, il se força à enfoncer les mains dans les poches et à modifier sa posture, se donnant un aspect décontracté qu’il ne suivait absolument pas, à l’intérieur.
Malgré ces efforts pour avoir l’air plus détendu qu’il ne l’était vraiment, il ne put s’empêcher de serrer les dents en entendant les réponses que le marchand avait à offrir à la demoiselle qu’il accompagnait, vis-à-vis des fauteurs de trouble. Aussitôt sortis de l’échoppe, il se tourna vers elle, un air inquiet dans les yeux.
« Un orphelinat, hein ? Ça n’annonce rien de bon… » Il hésita un peu avant de poursuivre, peu à l’aise. « Si ce sont des enfants qui n’ont aucune autorité parentale pour les aider à se développer, et qu’en plus ils vivent dans des conditions miséreuses, c’est inévitable qu’ils finissent par transgresser les règles, non ? J’aurais du mal à les blâmer, en tout cas… Et ce sera complexe d’arranger leur situation en deux temps trois mouvements. »
Dans tous les cas, la prochaine étape restait claire ; accompagné de la demoiselle, il se dirigea en direction de l’orphelinat du quartier nord de Konoha. Il savait que le bâtiment existait, bien sûr – il avait révisé toute la géographie de la zone urbaine en prévision de cette mission – mais il n’avait aucune idée des conditions qu’il constaterait sur place. La plupart des habitants actifs de Konoha suivaient le métier de shinobi, et ce n’était pas exactement le métier le plus sûr du moment. Shishio ignorait comment il réagirait s’il se retrouvait confronté à des enfants de ninja tombés au combat ; était-il vraiment légitime pour faire la leçon à la progéniture d’hommes plus braves que lui, tombés au champ d’honneur pendant qu’il se reposait tranquillement dans une chambre cossue de l’hôpital de Konoha ?
Il était encore perdu dans ses considérations quand les deux jeunes gens parvinrent en vue de l’orphelinat. C’était un large bâtiment gris, dont l’état défraîchi des murs trahissait le manque de subventions. Sur le terrain vague qui lui faisait office de jardin, de très jeunes enfants jouaient à se courir après – au moins, ceux-là n’avaient pas l’air malheureux. Sans doute étaient-ils encore trop jeunes pour réaliser les difficultés de leur situation ; ils n’avaient pas encore perdu l’innocence qui permet à tout enfant de penser que son cas est une généralité, contrairement à leurs aînés suffisamment âgés pour découvrir l’amertume et la jalousie au contact du reste du village.
« Avez-vous déjà une idée derrière la tête, Dame Chiyo ? » demanda l’Uchiha très sobrement. « Nous n’avons malheureusement pas le pouvoir d’augmenter le financement de cet orphelinat d’un claquement de doigts… Devrions-nous essayer de diriger les frustrations de ces enfants vers des activités plus constructives ? Enfin, il nous resterait tout de même à trouver un moyen de les pousser à nous écouter. » Arrachant son regard attristé de la façade en bien piteux état de l’orphelinat, il les dirigea directement sur l’apparence factice de la jeune femme. « Dans tous les cas, mon rôle aujourd’hui est de vous assister. Je me suis permis de vous faire part de ce qui me passait par la tête, mais… La décision finale est vôtre, et je vous aiderai avec tout ce que j’ai. Ce qui n’est, en toute honnêteté, pas grand-chose. »
« Pour l’instant, nous ne savons pas ce qui se passe réellement, mieux vaut éviter de bondir aux conclusions. Commençons par aller voir là-bas et, il n’est pas nécessaire d’ajouter le « dame » avant mon nom. Aujourd’hui, nous sommes ici à titre d’égaux. »
Malheureusement, Chiyo devait reconnaître que ce que disait le garçon était plutôt vrai. Si c’était bien les orphelins qui causaient le plus de problèmes, il faudrait trouver une solution efficace et augmenter les fonds ne serait pas quelque chose d’aisé. Peut-être faudrait-il une autre approche ? Elle avait beau réfléchir, mais tant qu’elle ne savait pas exactement ce qui se passait, elle ne pouvait pas mettre de plan en place.
Le bâtiment devant eux était bien fade, clairement pas un endroit pour des enfants, mais ce n’était pas à elle de dire quoi que se soit à ce sujet. Il fallait qu’elle se concentre sur l’essentiel, sur la mission. Trouver ce qui se passait, venir avec une solution.
Elle fit donc signe à Shishio de la suivre alors qu’elle s’approchait enfin du bâtiment. La concentration toujours maintenue pour garder le henge bien en place, elle entra par la porte principale. Deux enfants passèrent en riant et courant de part et d’autre du duo avant de sortir, une femme sur leurs talons, probablement l’une des éducatrices. Dans la pièce, il n’y avait que quelques chaises, mais pas vraiment plus. Vieilles et usées, tout comme le parquet. Un spectacle désolant pour ceux qui venait d’une strate sociale aussi aisée que les shinobis.
« Trouvons quel … - Pardonnez-moi, mais que faites-vous ici ? »
Une voix douce résonna d’un des couloirs, alors qu’une autre femme, clairement plus âgée que la première en émergea. Des cheveux tournant au gris tiré dans un chignon, des traits légèrement affaissés par la fatigue et des lunettes rondes, sur son visage, malgré tout cela, on pouvait voir une douceur, une certaine joie de vivre également. Chiyo s’inclina poliment devant elle avant de lui répondre :
« Nous enquêtons sur les altercations dans le quartier et l’on nous pas dit de passer par ici. - Je vois. Venez avec moi, ne discutons pas de cela devant les enfants. »
Et le vielle femme rondelette ouvrit la marche, menant les deux shinobis vers son bureau. À la mention des altercations, son visage s’était un peu fermé, il était clair qu’elle savait quelque chose. La question demeurait : quoi ? Heureusement, cette question ne resta pas en suspend bien longtemps, puisqu’en quelques secondes seulement, le petit groupe se retrouva devant la porte grincheuse qui menait au bureau de la matronne.
« Je n’ai pas de chaise pour les invités, elles ont été bougées dans la cafétéria, puisque nos en manquions, il faudra me pardonner. - Ce … Ce n’est rien ! C’est mieux que les enfants … enfin. »
Pour Chiyo, ce n’était pas une notion qu’elle avait l’habitude. Elle ne manquait jamais de rien, pas même de crème pour les pieds. Un nouveau pot apparaissait presque magiquement si l’ancien menaçait d’être fini dans la semaine. Non, elle ne manquait de rien du tout et pour elle tout ces problèmes-là se réglaient en achetant ce qui manquait. Bien sûr, elle était consciente que l’orphelinat ne pouvait se permettre de faire comme elle et c’était probablement ce savoir qui était à l’origine du tiraillement dans son ventre, du malaise qui la prenait toute entière.
« Je ne sais pas exactement ce que vous voulez savoir, mais ce n’est pas les enfants ! Ils n’ont rien fait de mal ! Ce n’est pas leur faute ! »
Il fut très vite évident, aux yeux de Shishio, que rien ne pertinent ne sortirait de la bouche de la matronne en charge de l’orphelinat. Ce n’était pas qu’elle avait l’air mal intentionnée, bien au contraire ; simplement, rien qu’à en juger par ce qu’elle affirmait avant même que Chiyo n’ait pu commencer à la questionner, il devenait clair que son objectif était de protéger les enfants et non de dire la vérité. Pour être parfaitement honnête, le jeune Uchiha trouvait cela admirable – à défaut d’avoir un bâtiment digne de ce nom pour encadrer leur enfance, ses orphelins étaient sous la responsabilité d’une femme douce qui tenait sincèrement à eux. Ce n’était pas suffisant, mais… Eh bien, il y avait au moins une chose positive dans leur vie déjà bien assez grise.
Retenant un soupir, le garçon regarda autour de lui, en quête d’un indice, de quelque chose qui pourrait le mettre sur une piste pertinente. Le bureau de la directrice de l’orphelinat n’avait rien d’exceptionnel – c’était une petite pièce carrée dotée de meubles de bois vieilli, dont les larges fenêtres offraient à la femme mûre une vue imprenable sur la cour intérieure de l’orphelinat. Le bâtiment en lui-même était d’une conception particulièrement simple : un carré de béton autour d’une cour, avec trois étages sans doute remplis de dortoirs. Les yeux rivés sur la fenêtre, il pouvait deviner le couloir d’en face, au travers deux vitres et quelques dizaines de mètres de distance. Plissant les yeux, il tâcha de se concentrer sur ce qu’il voyait, et…
« Toutes mes excuses… C’est terriblement grossier, mais je dois à tous prix aller aux toilettes. Pourriez-vous m’en indiquer la direction ? »
Il adressa à Chiyo un regard lourd de sous-entendus, essayant de rendre aussi clair que possible qu’il ne reviendrait pas de sitôt et qu’il était inutile de l’attendre, afin de filer dans le couloir, suivant de prime abord les directives de la directrice… Puis prenant un brusque virage aussitôt hors de vue de la vieille femme. Visualisant la forme du bâtiment dans sa tête, il se hâta en direction du point qui avait attiré son attention – quelques silhouettes en mouvement, dans le couloir d’en face, un étage au-dessus. Grimpant les escaliers quatre à quatre, il fut bien vite à l’endroit qui avait attiré son attention. De toute évidence, les enfants qui épiaient la conversation dans le bureau de la directrice avait détalé dès qu’il en était sorti, mais leur précipitation avait laissé des traces. Suivant des yeux les traces de boue les plus fraîches sur le sol, il fit quelques pas dans le couloir avant de trouver une porte coulissante légèrement entrouverte – manifestement, quelqu’un l’avait claquée à la va-vite. L’ouvrant à son tour, Shishio se retrouva nez à nez avec quatre gamins, allant de 10 à 13 ans à tout casser. Se laissant aller à un petit sourire satisfait, il ferma la porte derrière lui et leva les mains en signe d’apaisement.
« Je ne suis pas là pour vous chercher des noises, juste vous poser quelques questions. Tout va bien, d’accord ? - On n’a rien à te répondre, ninja ! » cracha presque le plus âgé d’entre eux.
Shishio soupira – de toute évidence, ce ne serait pas simple. Chiyo ne serait pas contente si elle apprenait ce qu’il faisait, mais… Joignant ses mains entre elles, il laissa s’échapper sa technique de métamorphose. Il n’était plus le jeune adulte qu’il avait prétendu être en l’accompagnant à l’intérieur de l’orphelinat, mais uniquement lui-même : un enfant à peine plus vieux qu’eux, qui n’avait de différent que les circonstances de sa naissance. Son audience avait l’air particulièrement surprise de ce brusque changement d’apparence – et il crut même voir une lueur épatée dans les yeux du plus jeune avant que celui-ci ne se discipline.
« Commençons par le début, ok ? Je m’appelle Shishio. Je ne suis pas là pour vous courir après ou vous punir, juste faire en sorte que les bagarres du coin s’arrêtent. Alors… Est-ce que vous voudriez bien me dire ce qui les cause, hein ? Vous vous battez avec d’autres gamins du quartier ? »
Les quatre orphelins se regardèrent entre eux, et quand le plus jeune d’entre eux ouvrit finalement la bouche, Shishio comprit qu’il avait gagné.
Quelques minutes plus tard, il ressortait du dortoir, non sans reprendre son apparence factice – il avait déjà eu de la chance qu’aucun des quatre ne reconnaisse son côté Uchiha – pour aller retrouver Chiyo et la directrice. Il en avait appris un paquet, entre deux ; lui qui avait craint qu’il y ait des bandes rivales prêtes à mettre le quartier nord à feu et à sang pour prouver leur supériorité sur l’autre, ce n’était qu’une bête histoire de concurrence commerciale. Un marchand un peu plus véreux que les autres avait eu la bonne idée d’offrir un peu d’argent de poche aux gamins de l’orphelinat en échange d’un peu de grabuge commis devant les boutiques qui lui tenaient une compétition sérieuse afin d’en faire fuir la clientèle et de pouvoir racheter leurs commerces pour une bouchée de pain. Un certain Mabuta Gozen, d’après le plus âgé des quatre enfants qui avait bien voulu parler à Shishio. Loin de souffrir de la pauvreté du quartier nord, il voulait au contraire l’exploiter pour en faire son fief personnel.
« Dame Chiyo ? » Appela le garçon en revenant vers le bureau, en quête de sa partenaire.
Le regard que Shishio lui envoya ne passa pas inaperçu et Chiyo hocha doucement la tête en sa direction. La matrone de l’orphelinat n’hésita donc pas un seul instant à indiquer au jeune shinobi le chemin qui mènerait à la salle de bain. Évidemment, Chiyo ne savait pas ce qui avait pu attirer l’attention du garçon et ce qu’il allait faire, mais elle ne comptait pas l’en empêcher. La belle Hyuga resta donc avec la directrice de l’orphelinat.
La femme faisait de son mieux pour être un bon hôte et, bien sûr, il n’échappa pas à Chiyo qu’elle était un peu nerveuse, qu’elle s’évertuait à cacher quelque chose. La conversation qui naissait entre les deux femmes était strictement polie et n’apportait pas grand-chose à l’enquête qu’essayait de mener la jeune femme. La matrone la ramenant souvent sur des annecdotes sur les nombreux enfants vivants sous son toit, tentant tant bien que mal de distraire Chiyo, chaque fois qu’elle approchait d’une possible réponse à ses questions.
Un moment pénible pour la genin qui espérait sincèrement que Shishio avait plus de chance qu’elle avec ses recherches. Heureusement, ledit garçon vint la rejoindre après un peu de temps, l’interpellant encore avec l’honorifique qu’elle lui avait demandé d’abandonner.
« Oh ! Parfait, tu es revenu Shishio ! Je crois qu’on peut partir. Se sera tout pour l’instant, si jamais il y a quelque chose, je vous recontacterai Hanae-dono. »
La dernière phrase était pour la matrone qui s’inclinait déjà, que trop heureuse d’avoir réussi à faire partir les deux shinobis qui enquêtaient.
Chiyo indiqua à son équipier du jour de la suivre à l’extérieur de l’orphelinat et guida la marche jusqu’au premier restaurant avec terrasse qu’elle trouva. Ce n’était pas le grand luxe, mais c’était parfaitement tranquille pour parler de la suite. Elle commanda deux boissons fraîches, l’une pour Shishio, l’autre pour elle et régla la note aussitôt.
« Je vais avouer que la matrone n’a pas vraiment aidé. Tout ce que j’ai compris c’est qu’elle nous cache quelque chose, mais je ne sais pas quoi. Je préférais sortir de là le temps de nous faire une tête avec tout ça. »
Elle soupira un instant, laissant un petit silence entre eux avant d’ajouter :
« As-tu réussi à trouver quelque chose ? Sinon, on peu aller questionner d’autre commerçant, probablement qu’on pourrait trouver des informations plus pertinentes de cette façon-là »
Les yeux rivés sur le jus de fruit tournoyant dans le grand verre qui avait été déposé en face de lui, Shishio portait toute son attention à Chiyo tandis qu’elle lui faisait un compte rendu de son entrevue avec la directrice de l’orphelinat. Malgré lui, il ne pouvait retenir un petit sourire ; c’était quelque peu puéril de sa part, mais il sentait une vive chaleur dans sa poitrine en réalisant que son idée de s’échapper du bureau pour enquêter directement auprès des enfants avait été la bonne. Il était rare que l’intuition du jeune Uchiha lui rende le moindre service ; aussi, pour une fois que son instinct s’était montré à la hauteur de la tâche, il ne pouvait s’empêcher de s’en féliciter intérieurement. Il fit bien attention à ce que sa satisfaction ne transparaisse pas trop cependant ; il redoutait l’idée que la belle Hyuga voit dans son air content une moquerie ou un quelconque manque de respect. Après tout, il était certain que rien n’aurait changé si les rôles avaient été inversés : si Chiyo n’avait pas engagé la conversation avec la directrice, c’est elle qui aurait remarqué les petits espions et qui aurait pu retrouver les enfants disposés à parler de leur employeur.
« Effectivement, j’ai trouvé quelque chose. Mais votre intuition est la bonne – il nous reste à rendre visite à d’autres commerçants. Enfin, à l’un d’entre eux, pour être précis, » commença-t-il, reprenant contenance pour lui répondre de façon aussi sobre que possible. « Mabuta Gozen. C’est un marchand du coin, il vend des vêtements de faible qualité mais abordables ; le genre de commerces qui fonctionne parfaitement dans le quartier nord. En revanche, il ne joue pas le jeu du négoce à la loyale. Si on en croit les enfants qui ont bien voulu me parler, toutes les rixes récentes remontent à lui. Il instrumentalise les orphelins en exploitant leur pauvreté : pour trois sous, ils sont prêts à se battre devant n’importe quelle boutique qui lui fait concurrence. » L’expression de Shishio avait perdu en neutralité au cours de son explication ; les agissements de cet homme le dégoûtaient intensément, et cela se devinait sans peine. Ninja oblige, il n’avait jamais prêté une attention énorme au concept d’honneur, mais quelqu’un capable d’aller aussi bas pour parvenir à ses fins… Ce n’était pas une façon de faire qu’il souhaitait imaginer. « De cette façon, il fait fuir les clients de ses concurrents… Et étend son territoire en rachetant leurs locaux pour une bouchée de pain. S’il obtient le monopole des vêtements bon marché dans le quartier Nord, il n’y aura plus aucune conséquence naturelle pour l’empêcher de monter le prix de ses articles de façon faramineuse. Sans concurrence pour le tenir en place, il donnerait le choix à tous les habitants du coin entre se ruiner chez lui et mourir de froid pendant l’hiver. »
Afin de donner à son interlocutrice le temps d’encaisser ce qu’il venait de lui transmettre, il but un peu de son jus de fruit, accueillant avec joie le goût sucré de la boisson qui envahissait sa bouche. Concentrant son regard sur le visage de Chiyo, il tâcha d’en interpréter les mouvements, même minimes, pour essayer de comprendre sa réaction. Il lui était très inconfortable de fixer quelqu’un pour ainsi dire dans les yeux, mais cette observation était une part importante de la présentation entre deux personnes pour lui. En observant la princesse Hyuga, il se faisait une bien meilleure idée d’à qui il avait affaire.
Après quelques instants, il se contenta d’attraper le sac à dos posé à ses pieds, l’agitant un peu dans les airs, faisant tinter les armes d’acier qui en recouvraient l’intérieur.
« Qu’en dites- vous, Dam… Je veux dire, qu’en dis-tu, Chiyo ? Devrions-nous rendre visite à Mabuta Gozen pour lui filer une frayeur façon ninja de Konoha ? Sa demeure se trouve à l’ouest d’ici ; malgré ses stratégies de magnat, il est encore loin d’avoir amassé la fortune qu’il convoite. Je doute qu’il ait les moyens de s’offrir une défense sérieuse, ce ne sera pas bien compliqué de lui ficher un peu la trouille – juste ce qu’il faut pour qu’on ne l’y reprenne pas. »