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Plonger dans les ténèbres • ft. solo

Myōshin Junko
Myōshin Junko
Uzushio no Jonin
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Myōshin Junko
Technique à apprendre:

« Junko, je te présente Jirō. Il assure la protection du monastère, avec Linji.
Oh ? On va se faire attaquer par des méchants ?
Les choses sont différentes dehors, gamine. Mais t’en fais pas, je suis là ! »

[…]

Un sourire un peu niais apparut sur son visage, tandis qu’elle se remémorait le jour de leur rencontre. Elle était jeune, innocente et ne savait pas ce qu’il y avait dehors, à l’époque. Les choses avaient changé depuis ; il était certainement le seul qui avait encore sa confiance, cela dit. Il n’avait jamais cherché à lui dissimuler la vérité. Mieux encore, il avait accepté de poursuivre leurs entraînements secrets – qui n’étaient, à présent, plus si secrets.
Elle remonta ses genoux contre sa poitrine, les entourant de ses bras, et le regarda. Il était beau, lorsqu’il maniait le shinai. A cette pensée, ses joues rosirent légèrement. En dépit de leur différence d’âge, elle devait admettre qu’elle avait un petit faible pour lui. On ne pouvait pas honnêtement appeler cela de l’amour, cependant – elle ne pensait plus être capable de ce sentiment, le souvenir de son pèlerinage étant encore trop frais dans sa tête. Cela ressemblait plus à une forme d’admiration, sur fond d’amitié complice, même si leur proximité rendait les choses un peu ambigües.

Leurs regards se croisèrent, il lui sourit avec douceur. Lui, il l’aimait éperdument, au point de rompre son pacte avec les Dieux – mais elle ne s’en rendrait compte que quelques années plus tard. Plusieurs fois déjà, elle avait profité de cette faiblesse chez lui – jamais avec l’intention de lui nuire, évidemment. Il s’agissait surtout de lui soutirer l’une ou l’autre anecdote croustillante sur le Maître, ou d’obtenir une permission stupide qui lui avait été refusée ; des actes d’une enfant, somme toute.
Comme il venait vers elle, elle se leva, prête à réceptionner l’arme qu’il lui lancerait. Mais contre toute attente, il laissa tomber le shinai à terre. A la place, il l’entoura de ses bras et la serra contre lui, dans un geste plein de tendresse. Elle fut surprise et un peu troublée, mais elle n’osait pas le repousser. Quand il relâcha son étreinte, une lueur triste brillait dans ses yeux. Il y avait un quelque chose de nostalgique, comme s’il était sur le point de la quitter. Et peut-être comprit-elle, au fond, car elle se mit à pleurer silencieusement.

Mais des larmes, elle n’en avait plus, et son visage se tordait dans une grimace de douleur tandis que le décor changeait brusquement et que l’illusion se brisait.

Elle n’y arrivait pas ; allongée à même le sol, Junko semblait absente, plongée dans un autre monde. Voilà plusieurs jours qu’elle avait eu la nouvelle. Plusieurs jours qu’elle essayait d’en finir avec toute cette histoire. Mais elle n’y arrivait pas. Elle avait beau se forcer, puiser dans ses ressources, s’enfoncer toujours plus loin dans son monde imaginaire, il revenait toujours. Ils souriaient, ils étaient heureux et puis… Et puis il disparaissait, d’une façon ou d’une autre. Elle avait tout essayé, elle s’était sincèrement excusée, elle lui avait promis qu’elle serait une mère parfaite cette fois, elle s’était même résolue à abandonner son métier, revenir au monastère. Mais il finissait toujours par la quitter. Quels que soient les situations, les lieux, les époques. Elle ferma les yeux ; encore, il fallait qu’elle recommence. Elle n’abandonnerait pas – pas cette fois. Elle ne voulait pas y croire ; pas lui, pas maintenant.

Alors, elle rechutait, elle se construisait un nouveau monde – toujours différent du précédent – avec l’espoir que, dans celui-ci, il accepte de rester à ses côtés. Qu’allait-elle devenir, s’il n’était plus là… Qu’allait devenir son fils, aussi. « Tu m’avais promis, Jirō. Tu m’avais promis… » Elle se laissa basculer sur le dos, posant son regard vide sur le plafond de son logement. Peut-être était-il en route, pour venir la voir, pour lui demander de revenir, pour qu’ils vivent de nouveau heureux, tous les trois ? Il avait pu se perdre et mettait plus de temps que prévu… Il ne pouvait pas disparaître, pas comme ça.

Elle crut entendre un bruit et se releva brusquement, manquant de perdre l’équilibre. Alors, elle le vit. Jirō… Elle ouvrit la bouche mais aucun son n’en sortit. Il était là, devant elle ; il avait l’air affaibli, il avait vieilli. Mais il souriait, malgré tout, et son sourire lui transperça le cœur comme un coup de poignard. Elle se mit à trembler, comme si son corps ne pouvait plus contenir ses émotions. « Je t’ai trouvée, Jun' ! » lança-t-il joyeusement, ne paraissant pas se soucier de ses tremblements. Il s’approcha et, doucement, lui prit la main. « Je suis là… » souffla-t-il tendrement ; son œil brilla d’une lueur malicieuse et amoureuse. Cette lueur lui avait tant manqué, elle s’en rendait compte à présent.

Alors, après plusieurs jours à se contenir, elle finit par pleurer pour de vrai.

Les tremblements s’intensifièrent à mesure que ses larmes coulaient, et elle peinait à prendre sa respiration entre deux sanglots. Elle voulut parler, mais elle s’étrangla. Alors, elle chercha à s’agripper à lui, à le serrer contre son corps avec fougue, comme pour se rassurer. Elle fit un geste en avant ; il souriait toujours. Mais cette main, si réelle, si palpable l’instant d’avant, lui échappait à présent. Et ses larmes de joies se teintèrent d’amertume tandis qu’une idée folle s’imposait à elle, subitement. Un spasme la parcourut, l’étranglant de plus belle. Elle ouvrit la bouche, cherchant un air qui semblait avoir disparu. La panique la saisissait brusquement : les petits picotements au bout de ses doigts devinrent de plus en plus désagréables, puis ses muscles commencèrent à se rétracter malgré elle. Elle regarda ses mains se recroqueviller sur elles-mêmes, douloureusement. Une crise de tétanie. Elle prit peur et, relevant les yeux, adressa un regard plein de souffrance à son amant. Mais il ne souriait plus. Lentement, il tourna la tête vers la fenêtre ; il faisait jour, dehors. Doucement, il lui tendit la main, comme une invitation. Elle voulut s’en saisir, mais son bras refusait de bouger et les sanglots et les spasmes la paralysaient. Alors, dans un geste ultime, elle se jeta en avant.

Elle heurta le sol de plein fouet.
Jirō n’était plus là.
Et elle, elle continuait de se recroqueviller sur elle-même.

Irrémédiablement.


[...] « Que vous sert, courtisane imparfaite,
De n’avoir pas connu ce que pleurent les morts ? »
— Et le ver rongera ta peau comme un remords.

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Myōshin Junko
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Tout l’hiver va rentrer dans mon être : colère,
Haine, frissons, horreur, labeur dur et forcé,
Et, comme le soleil dans son enfer polaire,
Mon cœur ne sera plus qu’un bloc rouge et glacé.

Elle ouvrit les yeux subitement, dans une grande inspiration, comme si elle sortait d’un cauchemar. Effarée, elle regarda autour d’elle ; il faisait sombre. Mais où était-elle ? Et comme elle se rendait compte qu’elle n’avait aucun souvenir de ce qui l’avait menée là, elle fut prise de panique et se releva brusquement – elle manqua de s’écrouler, se rattrapa tant bien que mal à un meuble. Elle était faible et sa tête lui tournait furieusement ; elle sentait battre son cœur dans ses tempes et sa vue devint floue un instant. Combien de temps s’était-il écoulé ? Combien de jours avait-elle passés ainsi, encore ? Elle ne mangeait plus, ne buvait plus, ne sortait plus. Et, surtout, elle luttait pour ne pas dormir. Elle luttait, s’épuisait, se droguait mentalement. Elle effleura la surface du bois, du bout des doigts. Il lui sembla que sa peau brûlait, à son contact. Elle ferma les yeux, expira douloureusement, à bout de force. A vrai dire, elle ne parvenait plus à discerner la réalité de l’illusion ; tout lui paraissait si réel et si faux en même temps. Elle l’avait voulu, dans le vain espoir de revoir son amour perdu, mais à présent, elle ne savait plus. Était-il venu, ou l’avait-elle rêvé ?

Lorsqu’elle rouvrit les yeux, un rayon de lumière perça à travers ses rideaux et lui brûla la rétine, l’aveuglant. Elle maugréa quelque chose d’inintelligible et se dirigea vers la salle d’eau, chancelante, se cognant aux quelques meubles qui peuplaient son chez-elle. Mais elle ne s’en rendait même plus compte, ignorant la douleur – ou peut-être que son état était déjà trop grave pour qu’elle ne remarque de nouvelles blessures.

L’eau était gelée. En relevant la tête, ses yeux se posèrent sur son miroir et son rythme cardiaque s’accéléra. « Qui… êtes-vous ? » murmura-t-elle difficilement. Un visage pâle, creusé la regardait froidement. Elle apposa doucement sa main sur le miroir. Lui aussi, il était gelé. Doucement, elle caressa le visage, du bout des doigts. La femme devait avoir été belle, dans sa jeunesse. Mais à présent, elle ressemblait à une morte. Ses lèvres étaient blanches et sa peau violacée sous ses yeux. Elle descendit doucement sa main le long du visage, jusqu’à son cou. Il paraissait si fin, si fragile. Il lui suffirait de traverser le miroir et de l’étrangler… Elle répéta, d’une voix plus rauque : « Qui êtes-vous ? »

Mais la femme ne répondait pas. Elle se contentait de la toiser, de son regard méprisant et hautain. Elle la jugeait ; elle jugeait le monde entier. Junko eut un petit rire. Cette femme, cette inconnue, se permettait de la juger. Et plus elle y pensait, plus elle riait – un rire qui devenait dément et inquiétant. « J’ai dit… QUI ÊTES-VOUS ?! » Violemment, elle abattit son poing sur le miroir – elle allait le traverser et détruire le visage de cette femme. Mais ce fut le miroir qui se brisa, tranchant la main de la folle, répandant son sang un peu partout.

Et Junko comprit que ce regard lui appartenait.

Elle recula, abasourdie, contemplant son visage dans les bris de glace. Elle était cet odieux personnage… Même dans l’échec, elle continuait d’être fière et arrogante. Jusqu’à la fin, jusqu’à ce qu’elle perde absolument tout, elle continuerait de jouer ce rôle. Elle se haïssait.
Et soudainement, elle songea à Jirō. Il la haïssait, aussi. Il ne l’avait jamais vraiment aimé, certainement… Sinon, pourquoi lui aurait-il infligé tout ça ? Oui, c’était certain, il l’avait toujours détestée. Il l’avait déjà punie, mais cela n’avait pas dû être assez… Alors, il lui portait le coup final : il partait. Sans un mot.
Elle regarda sa main ensanglantée. Et puis, il y avait autre chose, aussi. Quelque chose d’encore plus douloureux, une chose à laquelle elle n’avait pas voulu penser – et c’était peut-être pour cette raison que son esprit s’était autant focalisé sur Jirō, d’ailleurs. Oui, c’était cela, il y avait son fils, bien évidemment. Son fils, qui la haïssait, lui aussi. Elle étouffa un sanglot. Il ne fallait pas qu’elle y pense, il fallait qu’elle retourne dans une de ces foutues illusions avec Jirō ! Mais dans son esprit, tout s’embrouillait de nouveau.

Pourtant, étrangement, elle se rendit compte qu’elle n’éprouvait aucune tristesse à son évocation. Elle repensait à ce visage méprisant, elle repensait à la haine que ces hommes lui portaient, et elle ne parvenait pas à être triste. C’était comme si son esprit en avait assez qu’elle souffre de leur séparation. Comme si, au fond, elle se rendait compte qu’elle n’avait pas à les pleurer. En y réfléchissant bien, elle se demandait simplement « Pourquoi ? ». Pourquoi maintenant, pourquoi comme ça, pourquoi… Alors qu’elle s’était résignée, qu’elle refaisait sa vie, qu’elle survivait dans son coin. Ce n’était pas juste de la faire souffrir comme ça. Ce n’était pas juste, alors qu’elle faisait tout son possible pour les oublier. Elle s’était retrouvée une famille et elle donnait tout ce qu’elle avait pour s’occuper de ses gamins – Shun, Tsume, Sanada, Haiko. Alors, pourquoi s’amusaient-ils à la faire souffrir, encore ?

Et finalement, toute la colère qu’elle contenait jusqu’à présent éclata, froidement. Elle ne put lutter plus longtemps et dit à voix haute ce que son cœur renfermait, ces derniers jours : « Pourquoi donnes-tu signe de vie maintenant, hein ? Pourquoi… N’es-tu pas simplement mort ! » Et disant cela elle martelait de nouveau du poing les bris de verre. Elle voulait souffrir. Non, pire encore, elle voulait mourir. Elle s’en voulait, bien sûr, de souhaiter la mort de son enfant, et elle préférait encore prendre sa place… Elle voulait que tout s’arrête. Elle voulait les oublier.

Alors, lentement, elle abusa de nouveau ses sens. Elle construisait de nouveau un monde imaginaire. Mais cette fois, il n’y aurait ni Jirō, ni son fils, ni le Myōshin-ji, ni Uzushio. Ni même elle.

Elle voulait un monde noir et silencieux.
Un monde de ténèbres.

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Et si elle avait été là ?

Si elle avait lutté, des jours, des mois, des ans durant, contre la folie de son esprit.
Si elle avait accepté les interdits, réprimés ses envies, et chérit son petit.
Si elle n’avait pas renoncé alors qu’on la repoussait.
Si elle s’était fait pardonner auprès de tous ceux qu’elle avait bravé.

Si elle avait osé revenir sur ses pas…
Oui, certainement qu’il serait encore là.

Le sang qui s’était écoulé de ses mains était devenu froid et poisseux. Il s’en dégageait une odeur si forte qu’elle en avait des nausées, et des spasmes la parcouraient régulièrement. Mais si son corps donnait encore quelques signes de vie, son esprit lui semblait bien parti. Ses yeux exorbités ne voyaient plus rien et ses oreilles ne pouvaient qu’entendre le sifflement strident de son sang furibond. Elle semblait morte, le corps abandonné à son triste sort, telle une poupée brisée.

Au départ, elle crut que sa volonté avait été assez forte, car tout autour d’elle, le monde s’était assombri. Les murs s’étaient évanouis, cédant place à un vide infini. Mais très vite elle s’était aperçue de son échec : dans ce monde de ténèbres apparentes, son esprit ne pouvait s’empêcher de faire apparaître de petites bougies. Ces lueurs faiblardes formaient peu à peu un chemin dans l’obscurité ; elles incarnaient l’espoir, la vie, la joie, autant de choses dont elle n’avait plus envie. Pourquoi n’y arrivait-elle pas ? Pourquoi ne trouvait-elle pas la force de se plonger dans la nuit ?
Voilà la vérité : elle était fatiguée de vivre, mais terrorisée par la mort. Elle craignait la nuit comme on craint la peste. « Tant qu’on se souvient, j’existe. » disait-elle, sans vraiment être certaine qu’on se souviendrait d’elle. Alors, finalement, elle refusait de disparaître… Car si son corps n’était plus, qui serait là pour faire vivre sa mémoire ? Elle était seule, comme elle l’avait toujours voulu et comme elle l’avait toujours regretté.
Elle se trouva bien lâche. A quoi servaient toutes ces leçons sur la vie, si c’était pour abandonner devant les portes des Enfers ?
Doucement, elle porta la main vers l’une des lumières. Le feu de la bougie oscilla terriblement, tandis qu’elle s’approchait. Si l’espoir était si faible, elle pouvait bien l’éteindre, non ? Ce serait sa façon de ne plus fuir ses responsabilités. Elle suspendait son geste, le feu lui léchant presque les doigts. « Tu n’en as pas le courage… » murmura-t-on à son oreille. C’était vrai… Mais la voix ne s’arrêta pas là. « Alors que si tu n’avais pas été là… »

Si tu n’avais pas vu le jour,
Si tu n’avais pas vécu là-bas,
Si tu n’avais pas fui la guerre…

Oui, si elle n’avait pas fui ce jour-là, face à une mort certaine, elle ne serait pas revenue parmi les siens avec la rage de vivre et de vaincre. Elle n’aurait pas aimé Jirō et n’aurait pas eu d’enfant. Par-dessus tout, elle ne les aurait pas blessés comme elle l’avait fait. Elle sentit comme une lame lui transpercer le cœur, encore.
Alors, d’un coup, elle écrasa la pauvre flamme du plat de sa main. Mais contre toute attente, celle-ci ne disparut pas, et comme revigorée, la flamme rejaillit pour la brûler. Cela faisait mal, mais la souffrance ne lui inspirait plus rien. Elle attrapa la bougie et la lança au loin. Et regardant la lumière s’éloigner dans l’obscurité, elle se laissa tomber au sol.

Au fond, elle comprenait : son esprit négociait.

C’était certainement absurde et impossible… Pourtant, alors-même qu’il semblait vaincu, il s’accrochait. Il divaguait, à l’évidence, échafaudant toute sorte de plan, comptant toute sorte de probabilité.

Il reviendrait.

Si elle retournait là-bas, dès à présent…
Si elle écrivait à son tour…
Si elle…

Et à mesure que son esprit s’imaginait de quelle façon il pouvait bien renverser la situation, des bougies s’allumaient, et son monde obscur l’était un peu moins. Elle aurait beau s’en débarrasser, les jeter un peu plus loin à chaque fois, elles reviendraient, d’une façon ou d’une autre.

Junko comprenait bien qu’elle souhaitait s’échapper de cette situation insupportable. Elle comprenait bien qu’au fond elle espérait encore trouver une solution, refusant l’irrémédiable. Mais elle savait qu’elle ne pouvait que se blesser d’autant plus à imaginer son retour. Elle ne pouvait que sombrer, un peu plus encore…

Il lui fallait une fin rapide, quitte à ce qu’elle soit douloureuse. Alors elle brisa l’illusion. Et ses yeux qui ne voyaient rien l’instant d’avant découvraient le spectacle pathétique de son corps baignant dans son propre sang. « Prend ça, esprit malfaisant. » songea-t-elle spontanément, sans vraiment se rendre compte qu’elle s’infligeait tout ça à elle-même. « Il n’y a rien à faire. Tout est terminé. Tu vois… J’ai gagné. » Alors elle voulut retourner dans les ténèbres, pour voir toutes les lumières disparaître, mais elle avait atteint sa limite physique, et à peine son énergie concentrée, elle s’évanouit.


[…] Aigle, comme tu es horrible ! Tu es plus rouge qu’une mare de sang ! Quoique tu tiennes dans ton bec nerveux un cœur palpitant, tu es si couvert de blessures, que tu peux à peine te soutenir sur tes pattes emplumées ; et que tu chancelles, sans desserrer le bec, à côté du dragon qui meurt dans d’effroyables agonies. La victoire a été difficile ; n’importe, tu l’as remportée : il faut, au moins, dire la vérité... Tu agis d’après les règles de la raison, en te dépouillant de la forme d’aigle, pendant que tu t’éloignes du cadavre du dragon. Ainsi donc, Maldoror, tu as été vainqueur ! Ainsi donc, Maldoror, tu as vaincu l’Espérance ! Désormais, le désespoir se nourrira de ta substance la plus pure ! Désormais, tu rentres à pas délibérés, dans la carrière du mal ! Malgré que je sois, pour ainsi dire, blasé sur la souffrance, le dernier coup que tu as porté au dragon n’a pas manqué de se faire sentir en moi. Juge toi-même si je souffre ! Mais tu me fais peur. Voyez, voyez, dans le lointain, cet homme qui s’enfuit. Sur lui, terre excellente, la malédiction a poussé son feuillage touffu ; il est maudit et il maudit. Où portes-tu tes sandales ? Où t’en vas-tu, hésitant, comme un somnambule, au-dessus d’un toit ? Que la destinée perverse s’accomplisse ! Maldoror, adieu ! Adieu, jusqu’à l’éternité, où nous ne nous retrouverons pas ensemble !

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J’ai perdu ma force et ma vie,
Et mes amis et ma gaîté ;
J’ai perdu jusqu’à la fierté
Qui faisait croire à mon génie.

Le noir complet, enfin. Elle n’était plus ; la vie l’avait vaincue.

Junko avait été un adversaire féroce, fier et arrogant. Une femme intransigeante, autant (et peut-être même plus) avec elle-même qu’avec les êtres qui avaient croisé son chemin. Elle avait tout donné, chaque seconde de son existence, sans aucune retenue, elle avait dépensé toute son énergie, dans chacune de ses actions, dans chacune de ses paroles. Elle avait paru froide et distante, mais celui qui sait ce que signifie donner reconnaîtrait sa générosité. Son amour à elle n’était pas dans la douceur et le pardon. Et pourtant, elle n’avait fait que donner, encore et toujours, un amour incompris, mésinterprété, ou ignoré.

Junko avait lutté jusque dans ses derniers instants, contre un monde injuste et glacial. Un monde dans lequel être et respirer ne suffisait pas pour exister. Un monde où les Hommes préféraient encore s’entretuer que d’admettre leur faiblesse. Elle avait été une femme forte et elle n’avait certainement rien à se reprocher. Bien qu’abandonnant une partie d’elle-même par-delà l’isthme du Gel, elle avait toujours été convaincue du bien fondé de ses actions. Jamais, au grand jamais, n’avait-elle perdu de vue cette ligne, droite et directe, qui guidait ses pas.

Jusqu’à ce jour. Jusqu’à ce qu’on lui prenne ses yeux, jusqu’à ce qu’on lui coupe la langue et qu’on lui lie les membres. Mais la lutte n’avait pas été aisée. Pour maîtriser ainsi la rage et la colère qu’abritait le corps de la dame, il avait fallu bien plus qu’une chaîne. Il avait fallu détruire ce qu’elle avait de plus cher et de plus inaccessible. Une promesse, l’espoir d’une vie meilleure, non pas pour elle mais pour lui – pour son fils.

La mère qu’elle était aurait pu découper des montagnes et assécher des océans. Oui, elle avait été intransigeante, froide et distante. Oui, elle n’avait pas su s’occuper correctement d’un enfant qui pleurait et vomissait. Oui, elle n’avait pas ce que d’autres attendaient d’une mère : elle n’était pas cet être doux et servile qui essuyait la bouche de son gamin geignard et pardonnait ses excès de colère. Mais derrière chacun de ses actes, il y avait une volonté d’offrir le meilleur à un enfant qui, si elle avait suivi les conseils de ses maîtres, n’aurait connu qu’échec et déception, comme elle. Car elle-même avait été élevée dans le respect de règles dures et injustes ; on lui avait interdit de nombreuses choses sous de nombreux prétextes. Mais, par-dessus tout, on lui avait menti sur ce qu’était la vie.

La vie n’était pas une amie, elle n’avait rien de tendre et d’aimant. Alors pourquoi une mère devrait-elle prendre dans ses bras son enfant ? N’était-ce pas le bercer d’illusions que de lui faire connaître la douceur d’une caresse ? N’était-ce pas le trahir que de le plonger ensuite dans l’horreur de la guerre et de la mort ? Aux yeux de tous, elle avait été un être ignoble et abject, pourtant, ses actes étaient guidés par le sentiment le plus pur. C’était vrai ; elle aurait pu faire n’importe quoi pour lui, pourtant elle avait choisi de l’abandonner. Quelle femme cruelle… Mais la vie était cruelle, pas elle ! Elle… Elle n’avait fait que ce qui était juste, à ce moment-là. Elle était restée fidèle à elle-même. Par cet abandon, elle lui avait transmis tout son amour.

On l’avait cru paranoïaque, démente, obsédée par la guerre et la trahison. On oubliait qu’elle avait aimé inconditionnellement, qu’elle avait été heureuse, qu’elle avait été pieuse et pure. On la blâmait elle, sans se rendre compte qu’il fallait blâmer la vie. C’était elle la véritable ennemie. Et Junko le savait, elle l’avait compris de la façon la plus brutale qui soit. Elle avait vu ce dont elle était capable, cette Vie sournoise.

Junko avait été une adversaire terrible, parce qu’elle avait compris qui était son véritable ennemi et n’avait pas hésité à lui faire face, à chaque instant, alors que les autres Hommes se trouvaient des excuses et fuyaient le conflit. Elle avait accepté le blâme sans ciller, et sans ciller elle avait regardé la Vie droit dans les yeux et lui avait promis une vengeance effroyable.

Elle ne voulait pas la détruire. Elle voulait simplement tout donner, à chaque instant, et la changer, peu à peu, la rendre meilleure. Junko n’aimait pas détruire ; elle ne détruisait que ce qu’il était vraiment nécessaire d’éliminer. Mais changer les choses, ça, elle le pouvait, car elle était dotée d’une volonté extraordinaire. C’était sa façon d’aimer, et sa façon de se venger. Alors, elle aurait pu regarder son fils une dernière fois et lui dire : « Sois et respire. » Et cela aurait suffi à ce qu’il vive.

Mais Junko n’était plus ; la vie l’avait vaincue.

Il n’y avait plus d’espoir, plus de lumière. Il n’y avait plus qu’elle et la vie, triomphante, dont elle voyait ainsi la véritable couleur – un noir profond et insondable – et qui l’enveloppait dans ses bras comme une mère faussement aimante berce son enfant avant de le trahir.

Et les Hommes étaient donc condamnés à l’injustice et le désespoir, tandis que la guerrière vaincue sombrait dans les ténèbres...

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Myōshin Junko

On disait souvent aux endeuillés qu’après le déni, la colère, la négociation et la dépression, venait le temps de l’acceptation. Le temps de la guérison. Malheureusement, ce temps-là ne viendrait jamais pour la dame. Car ce qui aurait pu la sauver, à ce moment-là, n’arriva pas. Elle eut beau attendre, encore et encore, personne ne vint frapper à sa porte. Personne n’eut le courage d’aller jusque chez elle, ou peut-être que personne n’y pensa, tout simplement. Elle attendit longtemps, pourtant, rendue aveugle par ses propres illusions. Elle attendit si longtemps qu’elle en oublia la raison ; tout ce dont elle se souvenait, et tout c’à quoi elle pouvait penser, c’était à son désespoir et sa tristesse. Elle en avait oublié Jirō et son gamin, elle en avait oublié son ressentiment envers la vie et les êtres humains. Il n’y avait qu’elle et ce sentiment étrange de vide, entourés d’un noir absolu et oppressant. Et sans comprendre pourquoi, elle se sentait profondément attristée. Elle pleurait, puis riait, sans que rien ne l’explique ni le justifie. Elle restait immobile de longs moments, puis se levait et tournait sur elle-même, jusqu’à se donner l’envie de vomir. Elle se détestait, sans savoir quoi se reprocher réellement.

Si, au départ, elle eut du mal à trouver ses marques dans son nouveau monde, elle s’était finalement faite à l’idée que ce monde était le sien, à présent, et pour le restant de ses jours. Plusieurs fois, elle avait tâtonné autour d’elle et s’était palpé le visage. Mais elle croyait ne plus pouvoir faire confiance à son toucher, car ce qu’elle sentait sous ses doigts ne ressemblait pas à ce qu’elle s’imaginait – à défaut de pouvoir voir réellement. Elle avait l’impression d’avoir un visage hideux, et pourtant, lorsqu’elle portait la main à son front, elle ne sentait pas, sous ses doigts gelés, ses cornes démoniaques. Alors, elle n’avait plus confiance qu’en ce que ses yeux croyaient voir dans l’obscurité, au lieu de croire ce que tous ses autres sens lui faisaient sentir. Ainsi, peu à peu, l’illusion d’un univers parfaitement noir était devenue sa réalité, et puisque personne ne semblait s’en inquiéter, il s’imposa à son esprit l’idée que, peut-être, cet univers était la réalité. Après tout, elle n’était peut-être pas un cas isolé ? Elle fronça les sourcils. Pourquoi le serait-elle ? Il lui semblait à présent qu’elle avait toujours connu cet endroit, qu’elle avait toujours été aveugle, en un sens. « Oui, les Hommes naissent aveugles. » songea-t-elle. A cette pensée, elle se sentit désolée, envers la race humaine toute entière ; désolée de connaître la vérité et de ne pas pouvoir la partager, désolée de garder cela secret.

Mais que gagnait-elle à garder cela pour elle ? Elle se leva avec difficulté, tentant de garder son équilibre tant bien que mal, et écarta grand les bras. « Nous sommes aveugles ! Je le sais et je le dis ! » Elle eut un rire dément ; elle le disait ! Elle prononçait tout haut ce secret jusque-là bien gardé ! Mais son rire se mua soudainement en pleurs, tandis qu’elle baissait la tête et que les larmes coulaient le long de l’arête de son nez. « Nous sommes… Nous sommes… » sanglota-t-elle. « Seuls ? » Et sa voix se brisa. Elle ne voulait pas être seule… Pourquoi personne ne venait la libérer ? Alors, doucement au départ, elle laissa s’échapper son chakra de son corps. Elle ne voulait pas être seule… Et comme elle projetait plus violemment son énergie autour d’elle, elle fit le vœu que d’autres la rejoignent, dans ce monde horrible où elle ne voyait plus et où tout lui paraissait mort. Elle dépensait tout ce qu’il lui restait et l’illusion dans laquelle elle s’était enfermée prenait forme non plus seulement dans son esprit mais également dans tout l’espace autour d’elle. Et elle continuait, jusqu’à l’épuisement total, jusqu’à ce que plus une once de volonté ne l’abrite. C’était cela, son dernier acte de femme libre ; un appel au secours, sous une forme des plus singulières – et pourtant, si fidèle à ce qu’elle avait été.

Elle tomba finalement à genoux, alors que les ténèbres se dissipaient peu à peu. Elle n’avait plus la force de maintenir l’illusion. Ironiquement, la première chose que son regard rencontra fut un petit parchemin enroulé, abandonné sur le sol. Ah, cet objet… Elle le prit dans sa main avec délicatesse. Oui, bien sûr, c’était cela… Elle n’avait pas besoin de le dérouler pour le savoir : c’était ça, le fruit de son désespoir. Elle se souvenait à présent… Et tandis qu’elle le serrait soudainement de toutes ses forces entre ses mains, elle se mit à pleurer silencieusement. Jamais elle ne s’en remettrait…



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